RUSATIRA
, C’EST SCHINDLER.
Le général a eu le courage, en 1994, de sauver des civils qui
risquaient d’être massacrés. Ainsi, il n’y eut pas que Paul Rusesabagina,
il y eut d’autres « Schindler », connus ou moins célèbres.
Cette
attitude courageuse, dont témoigne pas mal de survivants, lui a épargné les gêoles
d’Arusha : autrement, il aurait eu de la peine à démontrer qu’il
n’avait pas participé à ladite planification du génocide, vu les hautes
fonctions qu’il a occupées dans l’armée et dans le parti unique sous la
dictature de la deuxième république.
Cependant, dans la guerre et l’après guerre, le général ne s’est
pas fait que des amis : Lorsqu’il décide de rejoindre le FPR, il ne part
pas seul. Il parvient à convaincre un certain nombre d’officier,
sous-officiers et soldats de le suivre. Pour ces militaires des FAR, le
raisonnement était simple : l’appréciation du général était
certainement correcte. Ils seront tous officiellement enrollés dans l’APR.
Alors
que le général parviendra à fuir, ses collègues seront plus tard liquidés
un à un par l’armée de Kagame, l’Armée Patriotique. Les familles de ces
hommes et femmes en veulent toujours au général…
Mais le général n’a pas commencé sa carrière en 1994.
Officier Supérieur dans les Forces armées Rwandaises, homme de
confiance du Président Habyarimana, agent de la CIA, cet officier est un témoin
non des moindres de l’histoire de la première et de la deuxième république.
Quel fut son véritable rôle dans le putsch qui renversa le président
Kayibanda ? Et que sait-il de sa (mise à) mort?
Si, comme le pretend-il, ses relations avec Habyarimana
n’étaient pas si bonnes, pourquoi ce dernier en aurait fait son proche
collaborateur pendant vingt ans ?
Dans le dernier livre du général, il subsiste pas mal de zones
d’ombres qui laisseront le
lecteur
sur sa faim: Très prudent, le général évite d’évoquer tout ce qui
pourrait le compromettre dans l’histoire récente du Rwanda, dont certains
acteurs sont toujours en vie.
Je me suis toujours méfié des récits autobiographiques : Il y en
a qui tournent à l’ »auto-justification », d’autres à l’ »auto-glorification ».
Et ce n’est pas le dernier livre du général qui me fera changer d’avis.
H.
Janvier.
Democracy_Human_Rights@yahoogroupes.fr |
De: |
"Habyalimana Janvier" <janvierhabyara@yahoo.com> |
Date: |
Fri, 22 Jul 2005 02:56:18 -0700 (PDT) |
---------------------
Jean
Christophe nawe L.Rusatira
mwaramutseho?
Hashize
iminsi mike ngeze kuri uru rubuga ariko muri iyo minsi mike nabonye
mwandikirana sinzi niba muziranye cyangwa mutaziranye.
Christophe
simuzi ariko Rusatira we ndamuzi . Ndetse muzi kuva kera yitwa SINGIRANKABO
akiri umwana muto ,yiga primaire. Nyuma yaho yaje guhindura izina sinzi
icyabimuteye ndetse n’abakoranye nawe mu gisirikare bo bavuze ko
yanahinduye na signature inshuro eshatu zose ubwo nabyo afite icyabimuteye .
Ibi
ntabwo aribyo binzinduye ,ahubwo nzinduwe no kunganira J.Christophe mu
kubaza Rusatira impamvu atatubwira icyatumye ahunga abo yakoranaga nabo
ejobundi aha.
Ndashaka
kumubaza niba noneho ubu ahuye n’umu Lieutenant ntavuze izina kuko
nzamuvumba yamusaba imbabazi. Uwo mwana w’umuhungu yamutumijeho ngo ave
kuri position mu Mutara aze amubwire yitwaje ibya parrain ,uwo musore yari
intwari iz’amarere yarazizungereje bizwi , nuko Colonel amaze kumuha
akabyeri ati ariko uzi abo urwanira n’abo urwana nabo , ati numvise ngo
warimbuye inkotanyi, izo nkotanyi murapfa
iki? Ati ushatse wacisha make, umwana w’umuhumgu aba confused arakimirana
asubira ku rugamba acitse intege,ibwo ibyakurikiyeho murabizi. None se ubu
mbe Rusatira we nkubaze ,ko kugeza ubu uwo musore amaze noneho kuba umugabo
w’igikwerere ahari nzamukurangire umusabe imbabazi ko wamubujije kurwanira
igihugu cyamubyaye umuca intege?Uzi icyo bihanirwa?
Ibyo
gutanga amakuru uyaha FPR mu kwa gatanu 94 byo simbivuze bizavugwa n’abandi.
Ibyo guterefona wa Munyamerikakazi umuha za numero za telephone za ba Chef
d’Etat major naba MINADEF bo mu kwa gatanu 94 ngo ababwire barambike
intwaro FPR yinjire muri
Kigali
nta nkomyi nabyo
simbivuze . Ese waba warabyanditse muri icyo gitabo cyawe ngo abagisoma
babimenye nabyo?Ibyo navuze haruguru byose se biri muri icyo gitabo
cyawe? Na CV yawe yose? Niba bitarimo habuzemo ukuri kwinshi.
Ngaho
komera cyane ariko wowe na J. Christophe mube muduhaye amahoro.
Frodouard
Habumugisha
Mon,
8 Aug 2005 11:30:19 +0200 (CEST)
Lettre ouverte de Karemera Edouard au General de
Brigade Leonidas Rusatira
Lettre
ouverte de Karemera Edouard au General de Brigade Leonidas Rusatira
Edouard
Karemera a.k.a. Rukusanya
Pour un dialogue en toute vérité et en toute transparence
Arusha, Décembre 2005
De : Edouard KAREMERA UNDF- ICTR
P.O. Box 6016 Arusha.
Pour : Général Léonidas RUSATIRA E-mail : ramuka1@yahoo.fr
Objet : Dialoguer pour espérer ensemble in « Rwanda, le droit à
l'espoir ».
Bien cher Compatriote,
Lettre ouverte de Karemera Edouard au General de Brigade Leonidas
Rusatira - decembre 2005
Pour
un dialogue en toute vérité et en toute transparence
Arusha, Décembre
2005
De
: Edouard KAREMERA UNDF- ICTR
P.O.
Box 6016 Arusha.
Pour
: Général Léonidas RUSATIRA E-mail : ramuka1@yahoo.fr
Objet
: Dialoguer pour espérer ensemble in « Rwanda, le droit à l'espoir ».
Bien
cher Compatriote,
Je
vous remercie infiniment pour l'invitation au dialogue que vous avez adressée
généreusement à toutes les filles et à tous les fils du Rwanda notre mère
patrie, dans votre récent ouvrage publié aux Editions L'Harmattan 1.
Ma joie est d'autant plus grande que vous êtes parmi les rares auteurs qui
reconnaissent encore aux pestiférés enfermés dans les prisons rwandaises en
général, ceux de la prison onusienne d'Arusha en particulier, le droit à la
parole. Vous écrivez en effet : « Tous les survivants, où qu'ils soient,
même en prison, injustement ou de raison, ou exilés ou interdits de liberté
d'_expression, restent les membres de notre grande famille. Ils sont, de ce
fait, appelés à prendre part à ce mouvement d'ensemble pour une renaissance
nationale 2. »
Je
voudrais également vous dire que j'adhère parfaitement à votre courageuse
interpellation des rwandais de notre génération telle que formulée en ces
termes : « Le génocide a exterminé les Tutsi. Des massacres d'allure génocidaire
ont décimé les Hutu. Les chiffres doivent être plus effrayants encore. Les
connaître et reconnaître fait peur. Il faut pourtant s'y résoudre pour
aider les rwandais à se donner la paix pour reconstruire ensemble leur pays.
Nous devons épargner de ce débat les générations futures. Ayons assez de
courage et de patriotisme pour le trancher nous-mêmes, évitant ainsi de piéger
ceux qui nous suivront 3. »
Par
ailleurs, j 'accepte sans réserve la formule préconisée pour aborder ce
dialogue.
1
Général Léonidas Rusatira : « Rwanda,
le droit à l'espoir ». Editions L'Harmattan, 2005.
2
Ibidem page 112
3
Ibidem page 110.
Vous
l'avez très judicieusement tirée des Ecritures Saintes, où le prophète
nous propose : «
Approchons pour plaider ensemble. »
4
Mais avant d'entamer ma plaidoirie, car c'est là l'objet de la présente, je
vous prie d'accepter qu'ensemble, à la suite de saint François d'Assise,
nous demandions humblement à Dieu de faire de notre dialogue un instrument de
paix, pour que :
«
Là où il y a le désespoir, nous mettions un peu d'espoir ;
Là
où il y a l'erreur et le mensonge, nous mettions la vérité ;
Là
où il y a les ténèbres, nous apportions un peu de lumière .
Que
dans notre dialogue, nous ne cherchions pas tant
à
être compris qu'à comprendre ; à être pardonnés qu'à pardonner. » 5
Mon
souhait le plus intime est que notre débat serve à éclairer le lecteur sur
ce qui s'est réellement
passé dans notre pays. Pour ce faire, il nous incombe de témoigner
correctement de
ce que nous avons vu ou vécu au lieu de nous contenter de distribuer,
arbitrairement, les certificats
d'innocence ou de culpabilité ou encore moins, de donner des leçons de
morale à tout
le monde ; ce qui est certainement utile mais pas prioritaire.
Ce
que je crois, car, figurez-vous, moi aussi j'ai des convictions qui ne me
quittent plus, «
la haine n'a pas d'avenir. Là où la haine a dépassé les bornes, et
c'est bien le cas chez-nous au Rwanda,
l'amour
ira beaucoup plus loin. » 6
Mais
en même temps, il m'importe de vous dire en
toute franchise, sans rancune ni parti pris mais sans complaisance non plus,
que « le
droit à l'espoir » que
vous appelez de tous vos vœux pour les rescapés de la tragédie rwandaise et
les
générations
futures ne peut ni ne va naître des contes, des anecdotes ou des demi vérités
sur
les épisodes cruciales de l'Histoire récente de notre pays. Ce sont là les
deux profondes convictions
que je tenais à vous faire partager avant d'entamer ce dialogue que je
souhaite exempt
de tout préjugé et, surtout, de toute animosité.7
Afin
de lever toute équivoque et ainsi faciliter notre dialogue, je tiens à vous
assurer, « in
limine
litis », que
j'ai toujours eu beaucoup de respect et d'admiration pour vous, à cause des
qualités intellectuelles incontestables, comme vous venez de le prouver une
fois encore en
4
Isai 41,1. Je ne résiste pas à l'idée
de vous dire ma nette préférence pour cette traduction en notre langue maternelle
que vous trouverez dans Bibiliya Ntagatifu, 1993, page 1343, en ces
termes : « Nimuze
dukoranire hamwe
tuburane ».
5
Transcription libre de la prière de St
François d'Assise
6
Stan Rougier « Au Commencement était
l'Amour », Editions Presses de la renaissance Paris, février 2003
7
Je tiens à vous assurer
que j'ai lu attentivement votre ouvrage pour compléter les indications que
j'avais sur vous et ainsi formuler mes observations à partir des éléments vérifiables,
car consignés dans votre livre.
publiant
« Rwanda,
Le droit à l'espoir ». Je souscris à beaucoup d'aspects de
votre analyse sur les causes de la tragédie qui a endeuillé toutes les
familles rwandaises et perdure encore. J'ai moi-même essayé de réfléchir
sur certains aspects de cette tragédie mais le cadre restreint de cet échange
ne me permet pas de beaucoup élaborer sur ma propre vision du drame rwandais.
J'aimerais tant avoir accès aux mêmes facilités de diffusion pour publier
comme vous. Mais c'est une toute autre question.
J'ai
lu avec beaucoup d'intérêt les chapitres 8 et 9 de votre livre consacrés à
ce qui me semble être votre programme politique qui pourrait se résumer en
ces deux principales idées : « La poursuite et le parachèvement de la Révolution
à l'intérieur du pays et le renforcement de l'intégration régionale par
l'abandon de la politique d'agression pratiquée vis-à-vis de certains de ses
voisins par le FPR actuellement au pouvoir » 8
J'apprécie
le ton et les termes de votre épilogue qui tranchent nettement avec le flou artistique,
le parti pris et les procès d'intention décelables dans votre introduction
titrée : « Bis
repetita
» Je ne m'attarderai donc pas outre mesure sur tous ces
passages de votre réflexion qui ne me posent guère de problèmes. Mes préoccupations
sont ailleurs que dans les civilités.
S'agissant
maintenant de ma plaidoirie, je voudrais d'emblée vous indiquer que je plaide
non coupable et pour cause. Contrairement à vous, je suis maintenu en détention
provisoire depuis huit ans, sur base d'un acte d'accusation que le Procureur a
modifié cinq fois déjà, probablement parce qu'il n'est pas sûr des éléments
de preuve réunis pour appuyer les allégations portées contre moi. Je ne
suis donc pas prêt à renoncer à cette plaidoirie de non culpabilité que je
lui oppose depuis ma mise en accusation qui remonte au 7 avril 1999.
Je
plaide non coupable parce que ma qualité d'acteur et d'observateur privilégié
de certains de ces événements qui font l'histoire récente du
Rwanda, me donne la conviction que ce qui intéresse le lecteur n'est ni mon
aveu de culpabilité ni ma dénégation, mais la sincérité de mon témoignage
sur ces événements. J'ai également des arguments techniques pour affirmer
que les conditions juridiques requises pour qualifier de génocide, les
massacres interethniques survenus au
Rwanda entre avril et juillet 1994 ne sont pas réunies. Par ailleurs, je ne
pense pas vous apprendre grand-chose en vous disant que jusqu'à date,
le Procureur du TPIR n'a pas encore réussi à apporter la preuve de la prétendue
planification du génocide. Même le fameux
8
RUSATIRA,
Op.Cit., p.
fax
que Dallaire prétend avoir envoyé à New York le 11 janvier 1994 n'est pas
trouvable dans les archives de la Minuar ou du Secrétariat Général de
l'ONU, en sa version originale. Après une minutieuse enquête, l'avocat du Général
Augustin Ndindiliyimana vient de publier un important article dans lequel il
affirme que ce fax fondateur de la thèse du génocide est un faux 9
Ceci étant dit, je respecte votre position clairement exprimée
10 en ce qui concerne la qualification donnée aux dits
massacres survenus dans notre Rwanda entre avril et juillet 1994.
1.
Vous présentez
sous forme d'anecdotes des éléments clés, selon moi, pour comprendre votre
parcours professionnel et votre passé politique et, partant, votre carte de
visite.
1.1.
A deux reprises au moins,vous avez parlé de vos origines princières que vous
affirmez fièrement partager avec un autre illustre général des Forces Armées
Rwandaises, feu Déogratias Nsabimana 11,
comme vous originaire de Ruhengeri. Vous avez même trouvé opportunément des
ramifications avec les princes du Burundi voisin de votre dynastie dont
Mashira reste le lointain ancêtre. Loin de trouver ce judicieux rappel dérisoire,
je pense personnellement que c'est un argument de plus qui me conforte dans ma
démarche visant à questionner votre comportement, déroutant à maints égards.
En effet, j'ai eu bon lire et relire votre livre, je n'y ai pas trouvé de crédibles
indications sur votre contribution personnelle au bien être du peuple
rwandais, eu égard à ces origines princières certes, mais surtout au rang
que vous avez occupé dans la hiérarchie militaire et politique du Rwanda.
Ceci étant, je m'incline devant les actions humanitaires que vous affirmez
avoir accomplies au risque de votre propre vie, lors des troubles qui ont
endeuillé le Rwanda entre avril et juillet 1994 12.
1.2
Vous décrivez avec une fierté légitime les circonstances de votre
nomination par le Président Kayibanda comme directeur de cabinet du ministère
de la défense alors que vous étiez âgé de vingt six (26) ans à peine. Je
rectifie un peu pour préciser que vous avez été bel et bien directeur de
cabinet du Ministre de la Défense Juvénal Habyarimana, et que vous n'avez
pas supporté qu'un autre que vous soit nommé Ministre de la défense quand
il a fallu
9
Chris Black: « The Dallaire Genocide Fax:
A Fabrication ». December 1,
2005. www.
sandersresearch.com
10
Lire à ce sujet
l'exposé de cette position aux pages 104 à 105 de votre livre annoté.
11
A la page 21 de
votre livre, vous donnez votre arbre généalogique ; à la page 246 vous
rappelez les plus importantes des distinctions que vous partagez avec votre
collègue Nsabimana.
12Rusatira
: Rwanda, le droit à l'espoir, pages 223 à 233 notamment.
remplacer
Habyarimana13 . Vous avez occupé ce même poste pendant plus de
vingt (20) ans puisque vous l'avez quitté en juin 1992 pour vous retrouver à
la tête de la prestigieuse Ecole Supérieure Militaire (ESM). J'estime que
par respect pour vos lecteurs, il aurait été plus correct de vous exprimer
un peu plus sur le secret de votre longévité auprès du général
Habyarimana, sur vos réalisations majeures à ses cotés en particulier. Au
lieu de cela, vous avez préféré recourir à ces formules que même les érudits
comme vous risquent de ne pas comprendre:
« J'y
suis resté assez longtemps pour tout savoir sans rien savoir »14,
ou encore : « Il
m'a fait trop de bien pour en dire du mal ; il m'a fait trop de mal pour en
dire du bien »
15
.
1.3
Comme beaucoup de vos lecteurs, je sais de quel coté penchait votre
sympathie, après la restauration du multipartisme par la constitution du 10
juin 1991. Il est vrai que la nouvelle constitution interdisait à tout
militaire d'adhérer à un parti politique tant qu'il n'avait pas
officiellement démissionné de l'armée. Je suis également éclairé par vos
soins sur les circonstances qui ont entouré vos démarches déçues pour intégrer
les rangs de l'APR après sa victoire sur les FAR. Cependant, je reste sur ma
faim en ce qui concerne les motivations profondes qui vous ont poussé dans
cette direction. Le récit de votre fin de non recevoir opposée à la
proposition vous faite par le Président Bizimungu de vous confier le ministère
du plan ou de faire de vous son Chef d'Etat Major particulier, est surprenant
pour quelqu'un qui avoue être naturellement porté à occuper les premières
places 16.
1.4
Une autre anecdote qui devrait faire sourire si elle n'intervenait pas dans un
contexte dramatique est celle de votre animal de compagnie, le berger allemand
Kasi. Vous avez tenu à consacrer deux passages de votre livre à l'histoire
de ce chien. Vous insistez sans motif évident sur le fait qu'un Hutu de chez
vous mal intentionné à votre égard aurait faussement prétendu que vous
avez donné le nom de Kagame à cet animal. Vous conviendrez avec moi que,
quoique très grave, l'histoire de ce chien et votre obstination à porter le
titre pompeux de Général vous attribué par une armée qu'ils venaient de
mettre en pièces ne sont pas suffisantes à elles seules, pour convaincre
ceux de vos lecteurs qui s'interrogent légitimement sur les vrais motifs de
votre rejet par le général Kagame et ses hommes. Vous serez sans
13
Vous avez eu toutes les peines du monde
à travailler avec le Ministre Augustin Ndindiliyimana sous prétexte que
vous étiez plus ancien que lui dans le grade de Colonel. Vous avez carrément
refusé de travailler sous les ordres de James Gasana cette fois-ci sous prétexte
que c'était un civil. En réalité, depuis 1973, vous avez agi comme si c'était
vous le ministre de la défense, même si vos actes étaient suivis de très
près et couverts par le Président Habyarimana en personne.
14
Ibidem page 23.
15
Ibidem page 177.
16
C'est exactement
ce que vous avez écrit à la page 260 de votre livre.
doute
intéressé d'apprendre la rumeur qui a circulé dans les milieux rwandais de
la diaspora quand on a appris votre exfiltration du Rwanda par vos puissants
amis et protecteurs. Paul Kagame vous
aurait fait cette double réflexion: « Pour
être sûr que vous n 'allez pas me trahir à
mon tour, que puis-je vous offrir que Habyarimana ne vous a pas donné ?Car,
voyez-vous l'Histoire militaire nous apprend qu'on ne trahit jamais une fois. »
Je devine bien votre embarras.
2.
Vous avez à
juste titre identifié toute une série d'évènements de haute gravité mais,
hélas,
vous avez abordé ces situations aux conséquences dramatiques connues avec
tellement de simplification et de légèreté que vos récits ressemblent à
des contes de mauvais goût
2.1
Malgré votre solennelle promesse17 accompagnant l'incompréhensible
formule de la page 23, vous avez préféré entretenir le suspens sur un sujet
hautement préoccupant pour vos lecteurs. A ce niveau je vous pose la question
à laquelle tout lecteur de votre livre souhaite entendre votre réponse.
Est-il vrai qu'il y a eu un arrangement entre Habyarimana, Museveni et Rwigema
pour plonger le Rwanda dans la guerre, en espérant ainsi régler définitivement
et à moindre coût la lancinante question des réfugiés tutsi rwandais
devenue un véritable casse tête pour les deux présidents ?. Votre position
de directeur de cabinet du Ministre de la Défense avant, au moment du déclenchement
et après le déclenchement de la guerre dite d'octobre ne vous autorise pas
à prendre la rumeur à votre compte et à l'utiliser pour incriminer votre
chef tout en gardant l'illusion que vous allez facilement tirer votre épingle
du jeu. Les Rwandais n'ont rien à faire de votre conte. Ils ont le droit de
savoir si, comme vous le sous-entendez, il y a eu cette criminelle entente
entre les présidents Habyarimana et Museveni pour nous entraîner dans la
guerre. Vous ne pouvez plus vous réfugier derrière le secret d'Etat si
jamais il a existé, puisque vous l'avez déjà divulgué 18,
partiellement au moins.
2.2
Votre version des faits sur le déroulement des événements de la nuit du 04
au 05 octobre 1990 est un montage grossier mis à mal par vos propres propos 19
et démenti par les
17
Vous avez écrit
à la page 23 de votre livre : « En
écrivant cette phrase, je suis conscient de jeter un pavé dans la mare. Mais
la suite aidera à mieux comprendre. »
18
Vous écrivez à
la page 132 de votre livre que : « le
Président Habyarimana se croyait bien informé et ne voulait révéler son
secret à personne. Il le faisait dans l'intérêt du pays ; mais il est mort
sans l'avoir avoué. Il ne l'aurait pas reconnu puisque la guerre n 'avait pas
été ce qu'il avait espéré, ce qu'on lui avait promis, la promesse
fraternelle que l'autre président lui avait faite ».
19
Voir vos aveux sur
la tenue de réunions de crise dans votre propre bureau au Ministère de la défense
(page 132 à 133) et votre affirmation
mensongère sur la rentrée à Kigali du Président le soir du 03 octobre
1990, alors que vous savez très bien
qu'il est rentré tard dans la nuit du 04 au 05 octobre 1990.
informations
recueillies auprès d'autres témoins oculaires de ces mêmes événements.
Les Rwandais ont le droit de connaître qui sont les architectes de l'attaque
simulée de la Capitale Kigali, dans cette inoubliable nuit du 04 au 05
octobre 1990 et les vraies motivations qui les ont poussés à agir ainsi.
Vous me permettrez de relever que parmi les personnalités rwandaises en
charge de ce genre de dossiers et, par conséquent, susceptibles d'éclairer
les générations futures sur ce qui s'est réellement passé cette nuit là
et les jours suivants, vous êtes parmi les rares survivants 20 et,
de ce fait, avez le devoir de nous éclairer sur cette affaire. Car,
vous ne pouvez pas inviter les rwandais à «
dialoguer pour espérer ensemble » et leur cacher les éléments
pour faire un dialogue franc et constructif.
2.3
Le régionalisme a été et reste encore un sérieux contentieux entre les
Rwandais. Vous en témoignez éloquemment dans votre récit 21,
sauf que par la suite vous le traitez avec une légèreté déconcertante. Je
voudrais vous dire mon total désaccord avec vos allégations selon lesquelles
les natifs de votre région, le Bukonya, auraient été persécutés par le régime
Habyarimana, après la fuite de l'Homme fort de Ruhengeri, le colonel Alexis
Kanyarengwe 22. Comment voulez-vous que les Rwandais natifs des régions
qui ont effectivement souffert du régionalisme- ce fléau qui a largement
contribué à la chute de la première et de la deuxième République-,
prennent vos fausses incriminations au sérieux. Pour illustrer mon propos ,
je me permets de citer au point 2.4 ci-après quelques exemples de
personnalités toutes natives du Bukonya, dont l'audience auprès du président
Habyarimana était notoirement connue.
2.4
Vous avez été nommé au Comité Central du MRND en remplacement d'Alexis
Kanyarengwe tombé en disgrâce pour avoir mené clandestinement et de concert
avec Théoneste Lizinde leur campagne contre le projet de la constitution du
20 décembre 1978. Le Ministre François Ngarukiyintwali et le Docteur
Akingeneye, médecin personnel du président Habyarimana, n'ont jamais caché
qu'ils étaient tous les deux les collaborateurs les plus écoutés du Président.
Personne ne peut raisonnablement contester que pendant de longues
20
Au moment de ces événements les
responsables militaires en charge de ce genre de dossiers étaient : le général
Habyarimana Juvénal, Président de la République et Ministre de la Défense,
les colonels Laurent Serubuga et Pierre Célestin Rwagafilita, respectivement
chef d'Etat Major adjoint de l'Armée et de la Gendarmerie ; les colonels Elie
Sagatwa et Léonidas Rusatira, respectivement Secrétaire particulier du Président
et Directeur de Cabinet du Ministre de la Défense. Du coté des civils, les
premiers concernés par le dit dossier étaient les ministres Mugemana Jean
Marie Vianney de l'Intérieur et Mujyanama Théoneste de la Justice, le
Ministre à la Présidence Siméon Nteziryayo et le Chef du Service de
Renseignements, à l'époque Monsieur Augustin Nduwayezu, ainsi que le
Procureur Général de Kigali, Alphonse Marie Nkubito. Sur ces dix
responsables, six sont déjà morts ; raison pour laquelle ils devraient se décider
à parler, sauf à vouloir partir avec le secret.
21
Rusatira, op. cité page177 à 179 et 284
à 286, notamment.
22
Vous avez écrit à la page 178 de votre
livre : « Tous les Bakonya dont l'auteur de ce texte furent fichés… ».
années,
Jean Damascène Hategekimana a figuré parmi les conseillers économiques les
mieux écoutés du Président Habyarimana et qu'il a été un de ses meilleurs
ministres des Finances. Malgré vos affinités, il ne vous suivrait
certainement pas dans vos incriminations. Ce n'est pas non plus la nomination
du Professeur Ferdinand Nahimana à la direction de l'ORINFOR, au plus fort de
la crise, ou celle de Fabien Neretse à la tête du projet GBK, au moment où
le Président faisait face aux critiques les plus acerbes de la Banque
Mondiale, suite aux nombreuses indélicatesses qui ont prévalu dans l'exécution
de ce grand projet implanté d'autorité dans son Bushiru natal, qui prouvent
que les natifs du Bukonya étaient persécutés ou n'avaient pas la confiance
du Président Habyarimana. Pour espérer convaincre les gens, vous auriez
mieux fait de citer au moins quelques noms de fonctionnaires natifs du Bukonya
qui ont été victimes de votre prétendue persécution par le régime de
Habyarimana.
2.5
Vous avez donné au chapitre 6 de votre livre ce titre choc : « D'un
complot à l'autre ». Il a retenu toute mon attention. Il m'a inspiré le
double commentaire qui suit. Les développements que vous avez consacrés aux
complots ourdis contre vous rentrent parfaitement dans la philosophie générale
de votre livre que je pourrais schématiquement résumer par ce dicton de chez
nous : « Ujya gutera uburezi arabwibanza 23
». Par ailleurs, je suis très surpris par l'amalgame que vous
avez fait, inconsciemment peut-être, entre des situations totalement
incomparables. Selon moi, il n'y a vraiment pas lieu de placer sur le même
niveau ou même d'établir de parallélisme entre les assassinats politiques
des personnalités telles que Emmanuel Gapyisi, Félicien Gatabazi, Martin
Bucyana ou Fidèle Rwambuka avec les accidents de la route dans lesquels ont péri
l'ancien Ministre de la Santé François Muganza, l'ancienne député Félicula
Nyiramutarambirwa et l'ancien directeur de Kinyamateka, l'abbé Silvio
Sindambiwe. Malgré les déclarations fracassantes de certains politiciens de
l'opposition accusant le Président Habyarimana et le parti MRND, vous
conviendrez bien avec moi que les familles de Félicien Gatabazi et Emmanuel
Gapyisi n'ont jamais été dupes. Maintenant que les responsabilités de Paul
Kagame et ses hommes de mains dans ces assassinats ont été dénoncées de
sources bien informées, rien ne vous autorise à parler encore de mystère ou
à incriminer des rivaux politiques non autrement identifiés avec le risque
d'alimenter de nouveau les anciennes suspicions.
23
Ce dicton rwandais correspond plus ou
moins au proverbe français : « Charité
bien ordonnée commence par soi-même.»
2.6
La confusion devient encore plus grave quand vous trouvez un lien entre ces événements
et l'emprisonnement des auteurs de la tentative de Coup d'Etat de 1980 parmi
lesquelles figuraient les officiers des FAR Lizinde, Biseruka, Maniraguha et
Muvunanyambo, pour ne reprendre que les noms cités dans votre livre. Elle
atteint le comble quand vous arrivez à faire ce circuit rapide qui vous
permet de mettre dans le même sac les événements de Rucunshu, le Coup d'Etat
du 05 juillet 1973 et l'Attentat terroriste du 06 avril 1994.
2.7
Tous les Rwandais de votre génération qui ont suivi la prise du pouvoir au
Rwanda par les militaires putchistes de 1973 savent comment les rivalités
entre les auteurs du coup d'Etat du 05 juillet 1973 se sont développées à
partir de la création du MRND en 1975 et progressivement ont fini par déboucher
sur la tentative avortée de Kanyarengwe et Lizinde de renverser Habyarimana,
après le Référendum constitutionnel de 1978. Les plus avisés des rwandais
de cette époque dont vous-même ont eu vent de la campagne menée
clandestinement par le très énigmatique ministre de l'intérieur,
colonel Kanyarengwe, et le tout puissant directeur général du Service
Central de Renseignement, le Major Lizinde, contre le projet de constitution
du 20 décembre 1978 dont la promulgation a eu pour effet de concentrer tous
les pouvoirs entre les mains du Président Habyarimana. Alors qu'il cumulait déjà
les fonctions de Président de la République et Chef du Gouvernement, avec
celle de Ministre de la Défense et Chef d'Etat Major des FAR, il y ajoutait
celles de Président du MRND avec la garantie inscrite dans la Constitution
que le Président du MRND est le seul candidat aux élections présidentielles.
Le poste de responsabilité de premier plan que vous avez occupé au cabinet
du Ministre de la Défense bien avant l'avènement de la IIème République
vous place parmi les personnes les mieux informées de tous ces événements
majeurs ; ce qui rend très peu crédible votre version des faits tendant à
nier cette tentative de putch de Kanyarengwe et Lizinde. En tout état de
cause, votre récit n'apporte aucun éclairage à ceux qui n'avaient pas accès
aux mêmes éléments d'information que vous, à ceux qui sont nés après ces
événements et, encore moins, aux génération futures.
3.
A plusieurs
endroits de « Rwanda, le Droit à l'espoir », vous vous contentez de livrer au
lecteur des demi vérités alors que, objectivement, vous figurez parmi les
Rwandais les mieux
informés au regard de votre niveau intellectuel et votre profil
professionnel.
3.1.
A la page 128 de votre livre vous rapportez : « Le Comité Central du
Mouvement Révolutionnaire National pour le Développement (MRND), parti
unique au pouvoir au Rwanda de 1975 à 1991, avait décrété, en 1985, après
un débat qui fut simple formalité,
puisque
seules trois voix se firent discordantes, que le Rwanda, étant trop petit et
pauvre, n 'était pas en mesure d'accueillir ses réfugiés s'ils rentraient
en masse. Certains des membres de cet organe s'étaient opposés à cette décision
comme trois ans auparavant ils avaient été contre le refoulement des
rwandophones chassés par le gouvernement de Milton O bote. » Outre
la contradiction perceptible dans la formulation des idées développées dans
ce court passage que ne manqueront pas de relever les lecteurs attentifs de
votre récit, il y a lieu de relever que, sans être inexacte, la présentation
que vous faites ici de la position du Comité Central du MRND sur cette
lancinante question de réfugiés tutsi rwandais est de nature à induire les
lecteurs non avertis en erreur. En effet par un condensé, plus que rapide,
fait sans vous référer au document 24 adopté par le Comité
Central, vous avez donné un résumé réducteur de cet important document
adopté par le parti après plusieurs séances de travail de sa Commission des
Relations Extérieures, à l'époque présidée par le plus haut magistrat du
Rwanda, monsieur Joseph Kavaruganda. La réunion au cours de laquelle le dit
document fut adopté se situe en juillet 1986 et non en 1985 comme vous
l'affirmez erronément.
3.2
Vous avez omis de préciser que cette Commission du Comité Central
comprenait, outre les techniciens de haut niveau, les politiciens et les
diplomates chevronnés dont le Ministre des Affaires étrangères François
Ngarukiyintwari en personne. Vous omettez encore, involontairement peut être,
de mentionner que cette question a été régulièrement discutée par les
Congrès nationaux du MRND et que c'est en exécution d'une Résolution de son
VI eme Congrès que le Gouvernement et le Comité Central se sont
concertés pour finaliser et publier ce document qui donnait la position
officielle sur cette importante question. Vous ne rapportez pas fidèlement
ou, du moins, vous donnez l'impression de minimiser les mesures
d'accompagnement prises à l'époque par le Comité Central dont celle de dépêcher
des émissaires auprès des chefs d'Etats des pays limitrophes abritant les réfugiés
rwandais. C'est peut-être ici le moment de vous dire que, dans ce cadre, le
Président Habyarimana m'a dépêché auprès des présidents Ali Hassan
Mwinyi de Tanzanie et Kenneth Kaunda de Zambie pour leur remettre le dit
document et leur expliquer le sens de la décision du Comité Central du MRND.
D'autres membres du Comité Central ont été envoyés au Burundi, au Kenya,
en Ouganda et au Zaïre. J'estime que vous faites un faux procès au Comité
Central du MRND quand vous lui reprochez d'avoir tenu pour sérieux le problème
de la démographie galopante et la raréfaction subséquente des terres. Cette
situation réelle rendait aléatoire, voire
24
Le document a été adopté par le Comité
Central du MRND dans sa réunion du 26 juillet 1986.
irresponsable,
tout encouragement du retour massif des réfugiés. Je suis surpris de
constater que vous faites semblant d'ignorer un autre document très important
dont vous connaissez la teneur puisque le ministère de la défense était
représenté dans l'équipe pluridisciplinaire qui l'a élaboré. 25
Par ailleurs vous savez tout de même qu'en matière de retour des réfugiés
dans leur pays, le principe est la demande individuelle, le retour massif étant
une exception requérant des arrangements politiques préalables. La décision
du Comité Central du MRND n'ayant pas supprimé la possibilité pour les réfugiés
tutsi rwandais de demander individuellement à rentrer dans leur pays, je ne
vois pas pourquoi vous la condamnez, surtout qu'à ma connaissance vous n'êtes
pas parmi les trois membres du Comité Central qui se seraient courageusement
opposés à son adoption.
3.3
A divers endroits de votre livre26 vous consacrez d'importants
commentaires sur la constitution du Comité de crise et la formation du
Gouvernement intérimaire, le Communiqué du 12 avril 1994 et la Déclaration
de Kigeme du 06 juillet 1994. Ayant été acteur ou observateur privilégié
de ces épisodes majeures de la crise consécutive à l'attentat du 06 avril
1994, vous n'avez pas le droit de priver vos lecteurs de l'éclairage qu'ils
attendent légitimement de vous, sur tous ces événements. Je constate avec
une réelle déception que votre version des faits est inexacte en ce qui
concerne les négociations pour la formation du gouvernement intérimaire et
que vos commentaires concernant les deux communiqués dont vous êtes le
principal initiateur sont biaisés et manifestement intéressés.
3.4
Contrairement à vos affirmations, le 08 avril 1994, le général
Ndindiliyimana et le colonel Bagosora n'ont dirigé aucune réunion des
politiciens ni à l'ESM ni nulle part ailleurs. Tous les
témoins des faits et les éléments de preuve documentaire produits devant
les Chambres par l'Accusation et la Défense des accusés devant le
TPIR parlent de la réunion tenue le 08 avril 1994 au ministère de la défense
par les représentants des partis politiques MRND, MDR, PL, PSD et PDC. Tous
ces cinq partis politiques participaient déjà au gouvernement depuis le 16
avril 1992. La tenue de cette réunion avait été recommandée par les
responsables des secteurs d'opérations militaires réunis la veille à l'ESM 27.
Les responsables politiques devaient rapidement trouver les voies et moyens de
combler le vide institutionnel créé au sommet de
25
Il s'agit du Livre
Blanc publié le 15 janvier 1991 par le Ministère des Affaires Etrangères au
sujet de l'agression dont le Rwanda a été victime à partir du premier
octobre 1990. Le ministère de la défense était représenté par le Colonel
Anatole Nsengiyumva au sein du groupe de rédaction.
26
C'est notamment le cas dans les pages 53
à 60, les pages 155 à 158, les pages 179 à 180 et les pages 232 à 233.
27
Lire
à ce sujet, le Communiqué des FAR du 07 avril 1994.
l'Etat
par la disparition quasi simultanée du Président de la République, du
Premier Ministre et du Chef d'Etat Major des FAR. Conformément au mandat reçu
de la réunion du 07 avril 1994 à l'ESM, le colonel Bagosora n'a fait
qu'assurer le déplacement sécurisé des participants jusqu'au ministère de
la défense et la sécurité des lieux pendant que ces responsables des partis
délibéraient. Comme vous le savez, c'est à l'issue de ces délibérations
que nous nous sommes déplacés du Ministère de la Défense à l'Ecole Supérieure
Militaire pour présenter au Président Sindikubwabo et aux membres du Comité
de crise, les résultats de nos délibérations. Vous n'avez tout de même pas
oublié le déroulement de ces événements que, personnellement, vous avez
suivi de bout à bout à double titre 28
3.5
Il est inexact d'affirmer, comme vous le faites, que les politiciens réunis
le 08 avril 1994 pour combler le vide institutionnel créé au sommet de l'Etat
ont fait table rase de l'Accord de paix d'Arusha. Le point 2 du Protocole
additionnel au Protocole d'Entente du 07 avril 1992, signé le 08 avril 1994,
détermine la mission prioritaire du Gouvernement dont l'un des trois points
consistait à : « poursuivre les discussions avec le Front Patriotique
Rwandais pour la mise en place des institutions de la Transition à Base
Elargie, dans un délai ne dépassant pas six semaines. » La mise en
place rapide du gouvernement intérimaire permettait ainsi de donner au FPR
l'interlocuteur indispensable pour la mise en œuvre de l'Accord de paix. Dans
ces conditions, vous comprendrez à quel point je suis étonné par le soutien
que vous apportez aujourd'hui encore à la thèse défendue à l'époque par
le FPR avec l'appui du général Roméo Dallaire. Souhaitiez-vous comme eux
que le FPR profite du chaos qu'il venait de créer en assassinant le Président
Habyarimana et le Chef d'Etat Major des FAR et en reprenant la guerre sur tous
les fronts pour s'emparer du pouvoir par les armes et justifier cette mise
entre parenthèse des accords signés par l'impossibilité de les mettre en
application faute d'avoir le partenaire gouvernemental avec qui discuter ?
3.6
Je ne peux pas adhérer aux commentaires que vous avez faits relativement au
Communiqué du 12 avril 1994 dont vous reconnaissez être le principal
instigateur, aux cotés du général Marcel Gatsinzi. 29 Vous
avouez indirectement qu'en publiant ce Communiqué vous vouliez prendre
distance du Gouvernement intérimaire dont vos parrains, aujourd'hui bien
connus, vous demandaient de vous démarquer. Le colonel Charles Kayonga qui
28
Le colonel Rusatira était membre du
Comité de crise et Commandant de l'ESM.
29
Lire à ce sujet, la footnote (34)
reprise à la page 54 de votre livre ainsi que le passage plus explicite de la
page 68 de votre livre. Après votre livre, les éléments dont je dispose
actuellement me permettent de confirmer que vous avez caché vos vraies
intentions aux officiers cosignataires du communiqué du 12 avril 1994.
représentait
le FPR lors de cette rencontre organisée par la MINUAR, le 15 avril 1994, a
bien compris l'embarras dans lequel vous plaçait cette manœuvre et a monté
les enchères en conséquence. Le général Roméo Dallaire qui tirait les
ficelles et soutenait votre plan en parle avec autorité 30. Votre
manœuvre a échappé aux officiers d'Etat Major qui ont signé ledit
communiqué du 12 avril 1994 sans se poser beaucoup de questions, probablement
à cause de la situation difficile que traversait le pays et surtout de l'intérêt
qu'ils avaient à favoriser la conclusion rapide d'un cessez-le-feu avec le
FPR.
3.7
Pour ce qui est de la représentation des FAR lors de la rencontre du 15 avril
1994 organisée par Dallaire et présidée par monsieur Roger Boh Boh, votre
version des faits diffère de celle du général Roméo Dallaire. Vous écrivez
que c'est le général Gatsinzi qui, en sa qualité de chef d'Etat Major intérimaire,
a représenté les FAR 31, tandis que Dallaire affirme que vous
avez supplanté le général Ndindiliyimana et le colonel Gatsinzi pour représenter
vous-même les FAR. Alors je
vous pose aujourd'hui cette question : qui de vous deux dit la
vérité ? Mais la situation est beaucoup plus simple. Il se fait
que, au cours de cette période, il y a eu beaucoup de rencontres faisant
toutes intervenir le général Roméo Dallaire. Il se pourrait donc que vous
parliez de deux réunions différentes. Cette explication est confortée par
le représentant spécial du Secrétaire Général de l'ONU qui écrit que le
13 avril 1994, le FPR et les FAR ont signé une trêve de quarante-huit heures
pour permettre l'évacuation des ressortissants étrangers ; qu'ils ont signé
un nouvel accord de trêve le 14 avril 1994 et que, le 15 avril 1994, les
responsables du FPR et des FAR ont tenu des entretiens directs sous sa médiation
32.
3.8
S'agissant de la Déclaration de Kigeme, en date du 06 juillet 1994, vous
reconnaissez vous-même qu'elle s'inscrivait dans la même logique que le
Communiqué du 12 avril 1994. Comme le 12 avril 1994, vous avez réussi à
rassembler quelques officiers autour de votre projet de vous désolidariser du
Gouvernement intérimaire qu'après votre trahison du 12 avril 1994, vous vous
étiez empressé de rejoindre à Gitarama pour négocier le grade de Général
tant convoité. Pour mériter la confiance du FPR et celle de vos puissants
parrains, vous avez
30
Roméo Dallaire «
J'ai serré la main du Diable », page 382 à 383.
31
Le général Roméo
Dallaire qui était l'inspirateur de cette rencontre donne une toute autre
version du déroulement de cette
rencontre tenue le 15 avril à l'hôtel Méridien. Surtout, il a précisé qu'à
sa grande surprise c'était bien vous, colonel Rusatira qui allait représenter
les FAR et non le général Ndindiliyimana, ou le colonel Marcel
Gatsinzi. Ibidem, mêmes pages que celles ci avant citées dans la note (26).
32
Jacques Roger Booh
Booh, « le patron de Dallaire parle », Ed. Duboiris, 2005. page 166
accepté
de leur emboîter le pas 33 et accuser de génocide le Gouvernement
intérimaire alors que vous ne disposiez d'aucun élément sérieux de preuve
à l'appui d'une accusation de cette gravité. Je ne crois pas vous apprendre
grand-chose en vous faisant observer qu'à part vous et le général Gatsinzi,
personne d'autre parmi les dix officiers qui ont signé le Communiqué du 12
avril 1994 ne figure parmi les signataires de votre Déclaration de Kigeme. Il
vous a donc fallu manipuler de nouvelles figures et les entraîner dans votre
nouvelle aventure. Et cette fois encore, ceux parmi les officiers qui avaient
été abusés pour signer avec vous la fameuse Déclaration de Kigeme se sont
immédiatement désolidarisés quand ils ont découvert la supercherie. 34
3.9
A deux reprises au moins, vous avez émis des critiques gratuites sur les
personnes appelées à des responsabilités au sein du Gouvernement. Je pense
notamment à la nomination du D r
James Gasana à la tête du ministère de la défense nationale dans le
Gouvernement formé le 16 avril 1992 par Dismas Nsengiyaremye. Je pense également
aux membres du Gouvernement intérimaire formé le 09 avril 1994, particulièrement
au Président Sindikubwabo et au Premier Ministre Jean Kambanda. Vous avez dit
que le Président Habyarimana a nommé le D r
James Gasana ministre de la Défense parce qu'il voyait en lui un homme de
paille ; qu'il espérait ainsi trouver en lui un élément docile et profane
dans les affaires militaires à travers lequel il allait continuer à diriger
le dit ministère. Tout d'abord, je dois constater que pour les besoins de
votre thèse vous gommez allègrement les mois pendant lesquels le
portefeuille de la Défense a été confié au Général Augustin
Ndindiliyimana sous l'éphémère gouvernement Nsanzimana. Ensuite, je retiens
que vous ne contestez pas le profil de James Gasana dont l'ascension politique
a été des plus fulgurantes. 35 Dans ces conditions, il me parait
surréaliste de votre part de venir affirmer que le Président Habyarimana qui
l'avait appelé à toutes ces fonctions ne connaissait pas James Gasana au
point de le prendre pour un homme de paille et de penser, objectivement, qu'à
travers lui il allait continuer à gérer le Ministère de la Défense
nationale. En lisant vos affirmations, je devine que vous ignorez tout des
critères que nous avons suivi pour répartir les neuf ministères alloués au
parti
33
Le 13 avril 1994, le représentant du FPR
Claude Dusaidi a adressé au Président du Conseil de Sécurité une lettre
dans laquelle il accusait de génocide, le Gouvernement intérimaire. L'Administration
américaine va faire de même dès le mois de juin 1994.
34
Il s'agit des colonels Froduald Mugemanyi
et Venant Musonera et du Major Rwabukwisi.
35
De retour des études doctorales James
Gasana a successivement occupé les postes de directeur du Projet Crête Zaïre
Nil, et celui de Président de la Commission Nationale d'Agriculture, avant
d'entrer au Gouvernement comme Ministre de l'Agriculture de l'Elevage et de
l'Environnement. Quand il a été nommé Ministre de la Défense en avril
1992, il était déjà une des personnalités importantes de Byumba, membre du
Comité Central du MRND.
MRND
par le Protocole d'Entente du 07 avril 1992 entre les partis MRND, MDR, PSD,
PDC et PL. J'affirme que vous ne savez rien des discussions du Bureau
Politique du MRND qui a donné les orientations à suivre dans le choix des
militants à proposer au Président de la République pour occuper les ministères
alloués à notre parti par le dit Protocole. 36
3.10
Je suis étonné par les critiques formulées à l'endroit des membres du
Gouvernement intérimaire, à commencer par le Président Sindikubwabo que
vous qualifiez gratuitement de président fictif. Je me permets d'attirer
votre attention sur la longue expérience qu'avait le docteur Sindikubwabo
dans les affaires de l'Etat. Outre que c'est bien lui que la Constitution du
10 juin 1991 désignait pour assurer l'intérim du Président de la République
suite à la situation particulière créée par l'assassinat du Président
Habyarimana, le Docteur Théodore Sindikubwabo n'a pas assumé les fonctions
de Président de la République par intérim comme un homme sans aucune expérience,
parachuté à ce poste par opportunisme politique. Il avait été plusieurs
fois ministre depuis l'avènement de la République, avant d'être élu député
et, par la suite, Président du Conseil National de Développement. Aucun élément
ne vous autorise à dire de lui qu'il était « un
président fictif »37
Aucun élément non plus ne vous permet de qualifier d'extrémistes
sans expérience, les membres du Gouvernement mis en place le 09 avril 1994.
Pour preuve, je vous signale que le parti MRND a reconduit tous ses ministres
dans les fonctions qu'ils occupaient depuis le 16 avril 1992 au moins. Vous ne
pouvez pas raisonnablement nier l'expérience acquise par les personnalités
comme André Ntagerura, Casimir Bizimungu, Augustin Ngirabatware, ou Daniel
Mbangura. Ils avaient fait leur preuve au sein des différentes équipes
ministérielles dirigées par Habyarimana du temps du MRND parti unique, et au
sein de celles conduites par les premiers ministres issus du MDR, Dismas
Nsengiyaremye et Agathe Uwiringiyimana, du temps du multipartisme.
3.11
Dans les pages 213 et 214 de votre livre, vous faites une présentation
succincte de la situation qui a prévalu à l'intérieur du pays après le déclenchement
de la guerre du FPR et décrivez les difficultés pour le régime Habyarimana
de repousser l'agresseur venu de l'extérieur et de composer avec l'opposition
intérieure naissante mais très agressive, et vous concluez en ces termes : «
Le régime doit désormais faire face à un double front, intérieur et
36
Pour avoir conduit la délégation du
MRND qui a négocié ce Protocole et avoir dirigé toutes les réunions du
Bureau politique du MRND au cours desquelles ces questions ont été discutées,
je puis certifier que la nomination de James Gasana au poste de Ministre de la
Défense a obéi à des impératifs d'efficacité et aux critères de répartition
des postes nous alloués, dans l'intérêt du Parti et non pour satisfaire à
de basses préoccupations que vous voulez prêter au Président Habyarimana.
(Page 174 de votre livre)
37
C'est ce que vous affirmez à la page 180
de votre livre.
extérieur.
Il ne fit aucun effort pour récupérer l'opposition intérieure, mais chercha
plutôt à la diviser, préférant ainsi
partager avec son agresseur qui n 'en espérait pas tant. »
38 Et vous
ajoutez un peu plus loin : «Comment comprendre par exemple, que
l'application de l'Accord d'Arusha ait été bloquée par le conflit autour du
seul député de la CDR, alors que l'ensemble du dispositif à mettre en place
comportait une large majorité de Hutu ? C'est que pour Habyarimana,
contrairement au camp en face, tous les Hutu ne se ressemblent pas » 39Ces
deux imputations contre le Président Habyarimana sont injustes et sans
fondement.
En
effet, vous savez avec quelle patience le Président de la République et le
Premier Ministre Nsanzimana ont négocié avec les partis de l'opposition pour
les voir entrer au gouvernement jusqu'à ce que, après deux mois de
pourparlers sans succès, fut formé le premier gouvernement de coalition
comprenant les ministres issus des seuls partis MRND et PDC, le 30 décembre
1991. Vous avez été témoin des négociations entreprises dès février 1992
entre le MRND et les partis MDR, PSD, PDC et PL en vue de la formation d'un
gouvernement de large consensus national, afin de faire face plus efficacement
à l'agresseur FPR. Vous connaissez les dispositions du Protocole d'entente du
07 avril 1992 qui a permis la formation du Gouvernement de coalition dirigé
par Dismas Nsengiyaremye issu de l'opposition. Mais vous vous souvenez de ce
que, malgré cette main tendue du président Habyarimana et les importantes
concessions faites à ses adversaires politiques, du 29 mai au 03 juin 1992,
les représentants de ces partis regroupés au sein des FDC se sont rendus à
Bruxelles à l'insu du MRND qui venait de former avec eux un Gouvernement de
consensus national. Les délégations conduites par Faustin Twagiramungu,
Justin Mugenzi et Théoneste Gafaranga pour les partis MDR, PL et PSD
respectivement, ont comploté avec celle du FPR contre le Président
Habyarimana et le MRND 40. Vous vous souvenez encore de la déclaration
faite par Faustin Twagiramungu suite à l'offensive meurtrière du FPR sur la
ville de Byumba une semaine à peine après la rencontre de Bruxelles41.
A ce niveau, la question que je voudrais vous poser est la suivante : «
Du Président Habyarimana qui venait d'associer l'opposition à la gestion du
Pays dans le cadre de gouvernement de coalition formé le 16 avril 1992 et de
vos amis de l'opposition partis pactiser avec l'agresseur FPR, qui a trahi ?
Pourquoi pensez- vous qu'il faut toujours accabler Habyarimana même quand ce
sont ses adversaires
38
Rwanda, le Droit à l'espoir, page 213.
39
Ibidem, page 214.
40
Voir à ce sujet, le Communiqué de
Bruxelles du 03 juin 1992.
41
Vous l'avez reprise à la page 213 de
votre livre et commentée en ces termes : « Il voulait tourner en dérision
le Président Habyarimana et son secret désormais dépassé par les événements
».
qui
sont fautifs ? » Lors de sa déposition devant la
Chambre I du TPIR le 30 juin 2005, l'ancien ambassadeur américain au Rwanda,
Mr Robert Flaten, qui a beaucoup aidé l'opposition naissante, a qualifié ce
comportement d'inadmissible 42.
3.12
Vous avez porté des allégations intentionnellement mensongères contre le Président
Habyarimana, relativement à la conduite des négociations des accords de paix
d'Arusha d'abord, aux blocages survenus dans leur mise en œuvre ensuite. Vous
affirmez faussement que c'est autour du seul député de la CDR que la mise en
place des institutions de la Transition Elargie au FPR a été bloquée, alors
que vous savez très bien qui a bloqué quoi et pourquoi et vous en profitez
pour accabler Habyarimana. Avouez que c'est inadmissible de la part de
quelqu'un comme vous qui a eu le privilège de suivre de bout à bout les négociations
d'Arusha et les tractations entre tous les acteurs politiques, y compris la
Communauté internationale, pour la mise en application de l'Accord de Paix
qui les a sanctionnées. Ainsi par exemple, vous n'ignorez pas les divisions
survenues au sein des partis politiques, MDR et PL, quelques temps avant la
signature de l'Accord de Paix d'Arusha et leurs incidences sur sa mise en œuvre.
Vous n'ignorez pas non plus les intransigeances du FPR et son ingérence dans
les conflits au sein du PL. Vous n'ignorez surtout pas le communiqué du 25
mars 1994 signé conjointement par le représentant spécial du Secrétaire Général
de l'ONU, le représentant du Facilitateur et les ambassadeurs occidentaux
représentant les pays observateurs des Accords d'Arusha. Tous ces diplomates
demandaient instamment au FPR de mettre fin à ses ingérences dans le parti
PL et à son opposition à l'entrée du parti CDR dans le parlement de
transition.
3.13
Vous avez, à juste titre, consacré de longs développements à vous
expliquer sur les allégations portées contre vous en relation avec les
massacres survenus à l'Ecole Technique de Kicukiro. 43 Je ne ferai
pas de commentaires sur vos explications manifestement embarrassées,
s'agissant particulièrement de l'abandon pur et simple de l'ancien Ministre
des Affaires Etrangères, Boniface Ngulinzira. Je comprends qu'il ne soit pas
juste de vous tenir rigueur pour n'avoir pas réussi à sauver ces milliers de
personnes en danger de mort, qui vous appelaient
au secours ; surtout que comme vous le suggérez : «
Vous avez fait tout ce que vos
42
A l'audience du 30 juin 2005,
l'ambassadeur Robert Flaten s'est exprimé en ces termes : « C'étaient des négociations
curieuses : La plupart des partis de l'opposition se sentaient plus à l'aise
avec le FPR qu'avec leur propre gouvernement »
43
Il s'agit notamment des pages 233 à 253
de votre livre annoté.
seules
étoiles pouvaient faire 44
. » Là où je comprends moins bien, c'est quand vous
croyez approprié d'instrumentaliser 45 le retrait par le Procureur
de l'acte d'accusation porté contre vous. Or, vous savez comme moi que votre
libération est le résultat des pressions de vos puissants amis et
supporteurs dont certains témoins experts qui menaçaient de ne plus
collaborer avec le Procureur s'il refusait de vous relâcher 46.Vos
anciens collègues haut gradés des FAR affirment ouvertement que votre
transfert à Arusha a été contré par certaines puissances bien connues
auxquelles vous auriez livré des secrets militaires. Si ces accusations étaient
fondées, je n'hésiterais plus un seul instant à vous recommander gentiment,
de suivre les conseils donnés par votre ami Charles Karemano à votre détracteur
exalté, le fameux colonel Rwamuzinga Fidèle, pour ne pas un jour vous
entendre rappeler le même proverbe rwandais: «
Qui se gausse d'un prisonnier est pire qu'un chien. » 47
4.
En guise de conclusion, laissez-moi vous dire quelques mots en rapport
avec votre indélébile « Ego » qui risque de compromettre le généreux
projet pour le peuple rwandais meurtri.
Comme
je l'ai annoncé tout au début de cette réflexion, il n'est ni possible ni nécessaire
de réagir à tous les sujets abordés dans votre livre et sur lesquels je ne
partage pas totalement votre point de vue. Ainsi par exemple j'aurais
certainement discuté la question de l'assassinat des casques bleues belges,
la mise en place de la Commission Bagosora pour la définition de l'ennemi, la
manipulation des termes à l'instar du vocable « Interahamwe » que
vous traduisez faussement par «
ceux qui se battent ensemble » comme si vous n'étiez pas
rwandais, la plus grosse erreur de votre ami Dismas Nsengiyaremye lorsqu'en
date du 07 mars 1993 à Dar-es-Salaam, il signa en cachette avec Kanyarengwe,
le Document confidentiel 48 à l'origine du renvoi des militaires
français, le 15 décembre 1993, alors que le FPR se préparait à attaquer
avec l'appui de ses sponsors que vous connaissez. Je ne le ferai pas de peur
d'allonger excessivement cette lettre déjà trop longue.
44
Rusatira, op cité page 241.
45
Relire à ce sujet le Communiqué de
presse du 20 août 2002, reproduit in extenso dans les pages 105 à 106 du
livre annoté.
46
C'est bien le cas des témoins Experts
André Guichaoua et Alison Des Forges.
47
Rusatira, op. cité, page 248.
48
Le Premier
Ministre Dismas Nsengiyaremye et le Colonel Kanyarengwe avaient naïvement cru
pouvoir reconstituer l'ancien axe Gitarama-Ruhengeri, à l'instar de Grégoire
Kayibanda et Balthazar Bicamumpaka et ainsi se débarrasser facilement de
Habyarimana, Kagame et Twagiramungu. C'est ainsi que Nsengiyaremye signa en
cachette le retrait de militaires français.
Par
contre, je ne peux pas m'arrêter avant d'avoir attiré votre attention sur
l'intérêt que vous avez à prendre un peu de hauteur pour laisser à vos
compatriotes rwandais et à tous vos lecteurs le souhait de vous manifester
librement leur appréciation et leur attachement. Dans ce cadre, je me permets
de vous livrer très franchement mon appréciation. Après la lecture de «
Rwanda, Le droit à l'espoir », j'ai la preuve que le général
Rusatira croit fermement à ses lointaines origines princières et se considère
comme investi de la mission de sortir le Rwanda de
l'abîme où il a été plongé par les extrémistes de tous bords. J'ai des
indications précises sur les grandes lignes de son programme
politique. Malheureusement, son livre donne également cette impression que le
général Rusatira est trop sûr de lui-même et fait preuve d'un
extraordinaire « Ego » qui risque de compromettre son généreux projet pour
le peuple rwandais meurtri.
C'est
avec l'espoir de provoquer une relecture de certains passages de votre ouvrage
avec un peu de recul, que vous sont soumises ces quelques questions auxquelles
vous n'êtes pas tenu de répondre 49.
·
Pourquoi pensez-vous que vous êtes né pour
commander ?
·
Comment
pouvez-vous imaginer qu'avoir été major de votre promotion à l'Ecole
d'Officiers ou premier de classe au Collège vous désignait automatiquement
pour occuper les premières places dans le pays ?
·
Vous
avez affirmé quelque part dans votre livre que vous êtes un grand arbre qui
a grandi à l'ombre d'un chêne. Dois-je comprendre par là que c'est votre façon
de reconnaître qu'avant vous, le Général Habyarimana a lui aussi été
major de sa promotion à l'Ecole d'Officiers? Si oui, comment pouvez-vous
affirmer par la suite que par intérêt, vous auriez renoncé à lui faire
ombrage ?
·
Pourquoi
voulez-vous que l'on vous lance des fleurs pour votre docile participation au
coup de force du 05 Juillet 1973 qui a renversé le Président Kayibanda et
les institutions que vous aviez juré de protéger ? Auriez- vous oublié que
c'est vous qui avez escorté le Président Kayibanda jusqu'à Rwerere, son
funeste lieu de détention ? Pourquoi les vrais républicains ou simplement
ses enfants devraient vous féliciter pour cet acte d'ingratitude ?
49
Ces questions m'ont été inspirées par
la lecture de vos nombreuses digressions, particulièrement celles contenues
dans les pages 259 à 262.
Comment avez-vous pu imaginer que le
Général Paul Kagame allait faire de
l'inamovible directeur de cabinet du Général Habyarimana que vous avez été
pendant 22 ans, son confident ou simplement son collègue et collaborateur ?
Ne
pensez-vous pas que pour votre ouvrage, le titre «
Général Rusatira : Carte de visite »
aurait été plus indiqué ?
Je
voudrais conclure ma plaidoirie en vous redisant, mon général, que j'ai lu
avec intérêt et toute l'attention voulue votre livre. Je puis vous assurer
que je ne doute pas un instant de la noblesse de vos intentions. Cependant, je
vous avoue que je regrette cet « Ego », à mon avis excessif au
regard de la gravité des sujets que vous avez courageusement et librement décidé
de traiter. Afin de terminer par une note positive, je fais appel à l'héritage
commun que tous les deux nous tenons de notre passage au collège du
Christ-Roi de Nyanza. Le jeune frère que
j'étais, parce que vous entamiez la classe de Poésie quand je suis entré en
sixième latine, ce jeune frère qui n'est plus si jeune que ça 50,
vous rappelle ce paradigme appris de nos éducateurs humanistes : « Et
si multa scio, plura tamen ignoro »
51 .
Je
vous présente mes respects.
50
A toutes fins utiles, j'annexe mon
curriculum vitae.
51
Pour les non initiés au latin,
l'_expression signifie : « Même si je connais beaucoup de choses, j'en
ignore encore davantage ». Je ne pense pas me tromper en disant que la
modestie n'est pas votre fort.
5. L'auteur
Identification et études faites
Edouard
Karemera est né le 1
er septembre 1951, en
secteur Rucura de la Commune Mwendo, Préfecture Kibuye. Il est le quatrième
enfant de sa famille qui comprend quatre filles et trois garçons. Son père,
Nkerabigwi Thomas est mort en exil après la destruction du camp de réfugiés
hutu rwandais à Tingi Tingi, au Zaïre, en février 1997. Sa mère, Thérèse
Nyirabatoni est morte à Birambo, sur la route du retour forcé de l'exil au
Congo- Zaïre. C'était vers la fin de l'année 1996.
Edouard
Karemera a fait ses humanités gréco-latines au Collège du Christ Roi à
Nyanza, de 1964 à 1971. De 1971 à 1976, il a poursuivi ses études
universitaires à la faculté de Droit de l'Université Catholique de
Louvain en Belgique.
Fonctions exercées
dans l'Administration et au sein du Gouvernement
Rentré
au Rwanda en décembre 1976, Edouard Karemera a commencé sa carrière de
fonctionnaire au Ministère de l'Intérieur en janvier 1977 où il exerça
les fonctions de Conseiller juridique pendant un peu plus d'une année. En
mai 1978, il est nommé Secrétaire Général du Ministère de la Fonction
Publique et de l'Emploi. En janvier 1979, il est transféré du Ministère
de la Fonction Publique à la Présidence de la République où il va
exercer les fonctions de Conseiller Juridique jusqu'à son entrée au
Gouvernement, le 29 mars 1981.
De
mars 1981 à janvier 1989, Edouard Karemera exercera successivement, les
fonctions de Ministre de la Fonction Publique et de l'Emploi, Ministre à la
Présidence de la République Chargé des Affaires Politiques,
Administratives et Institutionnelles et de Ministre Chargé des Relations
Institutionnelles. Député National représentant la circonscription électorale
de Kibuye de 1982 à 1993, Edouard Karemera figurait sur la liste des
candidats députés du MRND à l'Assemblée Nationale de Transition élargie
au FPR. Du 25 mai au 17 juillet 1994, il a exercé les fonctions de Ministre
de l'Intérieur dans le Gouvernement Intérimaire.
Fonctions exercées
au sein du Parti MRND et à titre privé.
De
septembre 1979 à juin 1991, Edouard Karemera était membre du Comité Central
du Mouvement Révolutionnaire National pour le Développement (MRND). De
juillet 1991 à avril 1992, il a occupé les fonctions de Secrétaire National
du Mouvement Républicain National pour la Démocratie et le Développement (MRND).
Depuis juillet 1993, il était 1 er
Vice Président du Mouvement Républicain National pour la Démocratie
et le Développement (MRND).
Edouard
Karemera a dirigé la Commission Nationale de Synthèse chargée par le Président
Habyarimana de mener les consultations en vue des reformes politiques annoncées
dans son message à la Nation le 05 juillet 1990. Le Rapport de cette
Commission déposé en avril 1991 est à la base de la constitution du 10 juin
1991 qui a ouvert la voie au multipartisme.
A
partir de janvier 1989, date de son départ du gouvernement, Edouard Karemera
a évolué comme consultant en divers domaines juridiques et, depuis juin 1992
jusqu'à son départ en exil le 14 juillet 1994, en association avec un confrère,
il avait ouvert un cabinet privé d'assistance et de conseils juridiques «
BEACO »
Fait
à Arusha, décembre 2005
Edouard Karemera.
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Dossier: L. Rusatira et les Ex-FAR ARUSHA