Bonjour Emmanuel Mazimpaka,
Je m'en voudrais de ne pas répondre point par point à
vos interrogations.
1. "Je ne te croyais pas si
naïf. Ou peut-etre prends-tu tes désirs pour
des réalités." (Emmanuel Mazimpaka)
Ne vous en faites pas, monsieur Mazimpaka
(faites-vous- en-pas, comme dirait mon ami québecois), le juriste
que je suis comprend parfaitement l'embrouille du littéraire que
vous êtes en matière juridique. Car, voyez-vous, monsieur Mazimpaka,
le jargon juridique a ses règles propres découlant de la science
juridique qui, comme son nom l'indique, n'est pas qu'une question de
mots.
2. "Pourquoi à
ton avis, les pays du monde entier
accepteraient- ils de se brouiller avec un président d'un pays
indépendant, si petit soit-il, sur de simples accusations d'un juge
quelconque, quand bien même il serait français, et qualifié
d'antitérroriste? " (Emmanuel Mazimpaka)
Bien cher Mazimpaka,
Cette question que vous posez, vous ne la poseriez
certainement pas si vous saviez ce que c'est un mandat d'arrêt
international et les effets qui en découlent. Avez-vous déjà entendu
parler d'Interpol? Savez-vous quels Etats en sont membres?
Savez-vous quelles sont les oblligations de chaque Etat membre?
Ce qui vous induit en erreur, ce sont certainement
les mandats d'arrêt fantaisistes et arbitraires qui sont
régulièrement lancés par la "justice" rwandaise contre des innocents
(p.e. le mandat d'arrêt contre monsieur Emmanuel Bagambiki ou contre
monsieur l'abbé Wenceslas Munyeshyaka) et que les autres Etats
refusent d'exécuter. Mais il ne faudrait pas prendre l'exception
rwandaise pour la règle. Celle-ci est autrement conçue.
S'agissant des mandats d'arrêt internationaux lancés
par le juge français Jean-Louis Bruguière contre la bande de
criminels qui font le beau temps et la pluie au pays des mille
collines, en raison de leur rôle dans l'attentat du 6 avril 1994
contre l'avion présidentiel de Juvénal Habyarimana, lequel a
constitué l'élément déclencheur du génocide de 1994, une chose est
sûre: aucun des 25 pays membres de l'Union européenne ne peut
refuser de les exécuter. Ainsi le veut le droit européen. Quant aux
autres pays non européens membres d'Interpol, ils prennent le risque
de se brouiller avec les pays de l'Union européenne s'ils refusent
d'exécuter les mandats d'arrêt internationaux émis dans l'Union
européenne qui, ne l'oublions, compte en son sein deux membres
permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unies. Croyez-moi,
monsieur Mazimpaka, les autres Etats non européens réfléchiront deux
fois avant de prendre ce risque.
3. "A ton avis, est-il
plus urgent de juger
Paul Kagame, que de juger des génocidaires reconnus, qui pillulent
sur le sol francais , et ailleurs dans le monde?" (Emmanuel
Mazimpaka)
Bien cher Mazimpaka,
Il est urgentissime de juger tous les criminels, en
commençant par Paul Kagame, qui, lui, n'a pas commis
qu'un génocide mais au moins deux (un au Rwanda et un autre dans la
partie orientale du Congo voisin), sans oublier de nombreux crimes
de guerre et autres crimes contre l'humanité, tant il est vrai, cher
Mazimpaka, que c 'est bien Paul Kagame, patron du Front patriotique
rwandais (FPR), qui a fait abattre l'avion du président Habyarimana
le 6 avril 1994, allumant le brasier du génocide rwandais dans
lequel près d'un million de Tutsis vont trouver la mort. Pierre Péan
a, à bon droit et à juste titre, écrit que «l'apprenti dictateur n'a
pas hésité à abattre l'avion du chef d'Etat qu'il voulait remplacer,
sachant ainsi pertinemment qu'il allait déclencher de terribles
tueries visant notamment les gens de sa propre ethnie. Hitler?
Staline? Pol Pot? Non, Kagame, tout simplement, qu'un jour
l'histoire, lorsqu'elle aura déchiré le voile des manipulations,
rangera dans la catégorie des monstres sanguinaires. Un monstre
capable d'exploiter à son profit la tentative de génocide qu'il a
sciemment déclenchée. En somme, un Führer qui serait devenu
directeur de Yad Vashem, le musée de la Shoah...» (Roger
de Diesbach Patrick Vallélian, in La Liberté,
quotidien romand édité à Fribourg, 23 novembre 2005 citant Pierre
Péan, «Noires fureurs, blancs menteurs», Mille et une nuits, 2005,
544 pages).
Qui dit mieux?
4. "Je
termine par un paris avec toi: Et si Kagame et les autres mis en
cause ne sont ni poursuivis ni arretés, je dirais en d'autres
termes:
et si tes prédictions s'avèrent fausses?" (Emmanuel Mazimpaka)
Monsieur Mazimpaka,
Je ne peux pas parier que les
neuf criminels contre lesquels le juge anti-terroriste français
Jean-Louis Bruguière vient de lancer des mandats d'arrêt
internationaux seront à coup sûr arrêtés et jugés. Quant à être
poursuivis, ils le sont déjà. Je ne puis dès lors parier sur une
évidence. Au demeurant, le juriste n'est ni un medium ni un devin,
et la science juridique ne s'assimile pas à l'art de KURAGUZA IFURO.
Et si vous voulez que je vous le dise franchement: la probabilité
que ces 9 criminels soient arrêtés et jugés est faible (pas nulle,
mais proche de zéro). Il y va de la survie de Paul Kagame lui-même,
à moins que celui-ci n'ait une propension démesurément aigüe au
suicide, ce qui est loin d'être prouvé.
Tout ce que je peux vous dire, monsieur Mazimpaka,
c'est que si j'étais partisan du régime dictatorial de Paul Kagame
(Qu'à Dieu ne plaise !), je n'aurais qu'un seul souhait: que les 9
criminels concernés par les mandats d'arrêt internationaux du juge
anti-terroriste français Jean-Louis Bruguière soient arrêtés, jugés
(en France ou au T.P.I.R.) et, éventuellement, acquittés au bénéfice
du doute. Car, voyez-vous, monsieur Mazimpaka, le jugement d'un
criminel n'aboutit pas toujours à sa condamnation. Avez-vous déjà
entendu parler de l'affaire O.J. Simpson? Celui-ci a tué sa femme,
presqu'en direct à la télévision, et, en fin de compte, il a été
acquitté au bénéfice du doute. Un scénario semblable n'est pas
inimaginable pour la bande de criminels qui règnent en maître à
Kigali et qui ont fait abattre, le 6 avril 1994, l'avion
présidentiel de Juvénal Habyarimana précipitant ainsi le pays dans
une horreur apocalyptique. Mais, si ces criminels ne sont jamais
jugés, la probabilité qu'ils soient acquittés au bénéfice du doute
n'est pas proche de zéro puisqu'elle est nulle (0,0000000).
Comme je ne suis pas un chaud partisan du régime
dictatorial de Paul Kagame (c'est le moins que l'on puisse dire;
c'est une litote), il est hors de question que je souhaite
l'acquittement de Paul Kagame et de sa bande de criminels du même
acabit que lui au bénéfice du doute. Ce que je souhaite (ici c'est
le militant qui parle, non le juriste), c'est leur condamnation à de
la prison ferme à perpétuité. Et, croyez-moi, monsieur Mazimpaka,
grâce à leur arrogance et à leur inconscience, c'est déjà chose
(partiellement) faite. En effet, les mandats d'arret internationaux
du juge anti-terroriste français Jean-Louis Bruguière ont d'ores et
déjà un effet immédiat qui me satisfait entièrement:
CLOUER LES NEUF CRIMINELS CONCERNÉS AU SOL À KIGALI où
ils vivront désormais en quarantaine, isolés du reste du monde,
comme des lépreux. Si ce n'est pas de la prison ferme, cela y
ressemble beaucoup, d'où ma jubilation (totale). Ainsi donc, j'ai
déjà obtenu ce que j'attendais de la justice française. Le juge
Jean-Louis Bruguière a fait correctement son boulot. Je n'en
attendais pas davantage. Quant à Paul Kagame, auteur de nombreux
crimes ignobles contre l'humanité et sa bande de criminels qui
l'entourent, je leur dédie ces sages paroles du président Abraham
Lincoln:
Vive la République,
Vive la France,
Vive le droit.
"Les nations, disait Mao Zedong,
pourrissent comme les poissons, par la tête".
C'est bien là le mal rwandais (ce mal d'Etat, ce pourrissement par
la tête, si évident, si avancé).
Abatabizi bicwa no kutabimenya.