Les avocats de la défense au TPIR contre le transfert de détenus au Rwanda
(AFP 25/05/2004)


ARUSHA (AFP)- Les avocats de la défense officiant au Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) ont dénoncé mardi les négociations en cours en vue d'un éventuel transfert dans les prisons rwandaises de condamnés de la juridiction onusienne.

Les avocats se disent opposés, dans un communiqué transmis à la presse, "dans les termes les plus forts aux négociations entre les officiels des Nations Unies et le régime (du président rwandais Paul) Kagame" sur le sujet.

"Des membres du régime Kagame sont soupçonnés des même crimes pour lesquels les détenus du TPIR sont poursuivis par les Nations Unies", affirme l'Association des avocats de la défense (ADAD).

"Les négociations entre l'Onu et le régime Kagame sur le sort des détenus du TPIR rendent les Nations Unies directement complices de la couverture des crimes du régime Kagame", poursuit l'ADAD.

"Cette déclaration sent beaucoup la politique", a réagi le représentant du Rwanda auprès du TPIR, Aloys Mutabingwa, conseillant aux avocats de "faire leur travail de défense des accusés au lieu de s'adonner à la propagande politique".

"Le statut du TPIR est très clair", a rappelé le diplomate rwandais. Selon le règlement du TPIR, les peines d'emprisonnement prononcées par le tribunal sont exécutées au Rwanda ou dans un autre Etat qui en a manifesté la volonté.

Mais l'ADAD estime que transférer des condamnés du TPIR au Rwanda reviendrait à les placer "sous le contrôle de personnes suspectes de crimes de guerre".

Un transfert au Rwanda de détenus du TPIR serait "une abdication massive des Nations Unies", conclut le communiqué.

Une délégation du TPIR a entamé lundi une visite de cinq jours au Rwanda, où elle doit évaluer les centres de détention rwandais en vue d'un éventuel transfert de condamnés dans ce pays.

Au cours de la visite, la première de ce genre, la délégation en provenance d'Arusha (Tanzanie), siège du tribunal, doit également avoir des entretiens avec des responsables de la justice rwandaise.

Fin avril, Kigali avait réitéré son souhait d'accueillir des personnes condamnées par le TPIR, créé en 1994 par l'Onu pour juger les principaux responsables du génocide rwandais qui a fait au moins 800.000 morts selon l'ONU parmi les Tutsis et les Hutus perçus comme opposés à la politique du régime extrémiste hutu en 1994.

Selon le règlement du TPIR, les peines d'emprisonnement prononcées par le tribunal sont exécutées au Rwanda ou dans un autre Etat qui en a manifesté la volonté.

Le 20 mai, le porte-parole du TPIR, Rolland Amoussouga qui conduit la délégation en mission au Rwanda, a affirmé que Kigali et le Tribunal avaient entamé un "dialogue" à ce sujet mais que "c'est au président du TPIR", Erik Mose, de décider du transfert d'un condamné.

Jusqu'à présent, aucun condamné n'a été transféré au Rwanda. Actuellement, six condamnés du TPIR purgent leur peine à l'étranger, au Mali. Le Bénin, le Swaziland, la France, l'Italie et la Suède ont déjà signé des accords pour accueillir des condamnés du tribunal.