Tiré du journal "La Relève"
Trois
grands problèmes pour Ruhengeri !
Le coût de la vie dans la province de Ruhengeri est
devenu un phénomène économique difficile à maîtriser. Il affronte
essentiellement trois grands problèmes qui doivent être résolus dans un délai
limité pour éviter la dégradation continue des mœurs de la population.
En effet, la province de Ruhengeri doit apporter des solutions durables à
l'inaccessibilité de sa population aux biens et services, au changement
brusque du climat et aux différentes innovations.
Personne à Ruhengeri n'a voulu y apporter des analyses exhaustives. Mais,
certaines gens ont vite pointé du doigt la dévaluation monétaire au Rwanda
qui serait le premier facteur donnant naissance à ces trois problèmes.
C'est vrai, dit Furaha, une vendeuse au marché de Ruhengeri, que la monnaie
rwandaise a perdu sa valeur d'une manière exponentielle tout au cours de
cette dernière décennie. Aujourd'hui, c'est difficile d'accéder aux biens
et services, car leurs coûts ont augmenté presque du double. L'étalonnement
des vivres dans les marchés a remarquablement pris d'autres mesures en
fonction de cette dévaluation. A titre démonstratif, dans moins de trois
mois, un kilogramme de haricot est passé de 110 Frw à 170 Frw.
Souvenons-nous qu'il constitue le principal aliment de base des Rwandais,
a-t-elle ajouté.
A ce problème du coût élevé des vivres, vient maintenant le manque accru
de l'électricité qui semble paralyser les secteurs industriel et éducatif.
Les services nécessitant absolument l'usage d'électricité sont très chers.
La soudure, la plomberie, le moulin pour broyer les céréales et le manioc,
les travaux sur ordinateurs, les salons de coiffure, etc… sont des domaines
en profond sommeil.
La boucherie a augmenté le prix de la viande vu que certains commerçants ont
quitté la scène par manque d'électricité. Cette problématique a
directement créé un déséquilibre entre la loi de l'offre et de la demande,
c'est-à-dire les demandes en viande sont nombreuses par rapport aux offres.
Un kilogramme revient à 1000 Frw. En gros, les produits périssables ne sont
pas vendus en quantité suffisante par crainte de leur frigorification
incertaine. Ceci conduirait les commerçants à mener leurs activités dans
l'incertitude totale. Or, dans les affaires commerciales, l'incertitude
traduit la perte éventuelle, a démontré Mme Mukayisire, agent de la Banque
Commerciale du Rwanda (BCR) sise à Ruhengeri.
Les aléas climatiques inattendus qui se sont marqués à Ruhengeri, ont aussi
provoqué des pénuries de la pomme de terre. La sécheresse de Juin-Juillet
2004 a négativement disposé sur la production agricole en général. Cette période
si réduite ne pouvait pas toutefois créer la panique. Par contre, analyse
Evariste, un agent de trafic police, " une grande quantité de la
pomme de terre est exportée au Burundi. J'ai remarqué moi-même des camions
d'immatriculation burundaise transportant des vivres de Ruhengeri… La
province de Ruhengeri est par ailleurs devenue le carrefour commercial du
Rwanda et du Burundi ".
La sécheresse n'est pas le seul élément à mettre en jeu dans la hausse des
prix des denrées alimentaires. Il y a longtemps que la province de Ruhengeri
a connu de sérieuses périodes de sécheresse sans basculer dans la pénurie
de la pomme de terre comme c'est le cas aujourd'hui ! Le carburant est un
autre indicateur à considérer. Au cours de ces deux dernières années, le
prix du carburant n'a cessé d'augmenter sous un rythme croissant. Cette
situation a rendu le transport au Rwanda un secteur très coûteux tant aux
biens qu'aux personnes. Les répercussions qui en découlent ont eu des effets
négatifs sur le comportement des Rwandais devant les biens et services ; ce
qu'ils appellent actuellement " coût de vie dur ".
Les innovations entamées par la population en vue d'éradiquer la pauvreté doivent être revues. La province de Ruhengeri vit le paradoxe dû à la politique de décentralisation qui interpelle les Rwandais à innover et à créer des emplois. La population du district de Bugarura qui s'était regroupée en différentes associations de fabricants des briques cuites lance un cri d'alarme contre la mesure prise par le Ministère des Terres, Environnement, Forêts, Eau et Ressources Naturelles, lui interdisant d'utiliser le bois de chauffage pour cuire les briques. Des polémiques sur les tenants et les aboutissants des normes protectrices de l'environnement préoccupent grandement ces associations qui trouvaient leur essence de survie grâce à la vente des briques cuites. Considérant cette restriction émise par le Ministère ayant dans ses attributions, environnement, la population qui vivait essentiellement de la vente de braises et de briques cuites est maintenant dans la désolation. Une brique cuite revient à 15 Frw, pendant que son coût dans les 3 mois derniers revenait à 7 Frw. C'est encore un autre indicateur d'une vie dure en pleine expansion, a affirmé M. Kirizaboro, fabricant des briques cuites dans le district de Bugarura.
La protection de l'environnement est un problème préoccupant le Rwanda et le monde entier. L'amélioration des conditions de vie est un autre problème. Il revient alors à tout un chacun, les élites politiques en premier lieu, de pouvoir concilier les deux problèmes (protection de l'environnement et amélioration des conditions de vie) en vue d'asseoir une vie équilibrée de tous les citoyens rwandais. Sans cette approche, la population ne saurait pas ce qui remplacerait la braise pour chauffer les marmites et pour cuire les briques. Les bloc-ciments qui remplaceraient les briques cuites sont extrêmement chers. Ils sont à l'apanage exclusif des gens dotés de gros moyens !
Le
secteur agricole de la province de Ruhengeri est à la phase élémentaire.
Aucune technologie moderne n'est utilisée pour accroître la production.
Seule la bonne disposition climatique demeure l'espoir des agriculteurs
rwandais. Les Anglais disent " Wait and see ",
autrement dit " Attendons voir " si dans les jours à
venir le coût de la vie à Ruhengeri sera toujours critique.
Safari Byuma
Gitarama : La vie devient coûteuse et la population change les mentalités.
La région centrale du pays est dominée par une grande population occupant des parcelles souvent morcelées. L'agriculture et l'élevage constituent les principales activités de la plupart des gens. Etant donné que c'est au centre du pays, il n'y a pas une grande différence en matière des prix des produits venant des autres régions. Par ailleurs, tant les produits locaux que ceux venant d'ailleurs, leurs prix ne sont pas stables. On cite par exemple ceux des denrées alimentaires et d'autres produits d'usage familial comme le pétrole, qui ne cessent de croître.
Quand on parle des besoins primaires, on entend essentiellement l'alimentation, les soins de santé, l'habillement et le logement ( avec les biens liés comme les mobiliers, les ustensiles…). En second lieu, on parle de l'eau potable, de l'éducation, du transport et d'autres besoins qui sont de type secondaire.
Lorsqu'on passe dans la province de Gitarama, on s'aperçoit que certains besoins seront bientôt satisfaits alors que d'autres restent en suspens. Les initiatives des gens de la province de Gitarama en adhérant aux mutuelles de santé, en pensant à leur formation et à celle de leurs enfants prouvent que certains besoins fondamentaux sont en voie d'être satisfaits par la majorité des gens de la région. Le niveau de construction des logements n'est pas aussi moindre dans la région. Néanmoins, quand on parvient à s'entretenir avec les gens de Gitarama, on trouve que d'aucuns ne parviennent pas à accéder à une alimentation complète en quantité et en qualité.
Deux constats expliquent la situation : L'agriculture reste archaïque dans plusieurs régions alors que les terres deviennent de plus en plus morcelées et infertiles. Il y a également le problème d'accès aux denrées alimentaires qui ne sont pas produits dans la région suite à la pauvreté de la population.
Devant cette situation défavorable constatée, les gens de Gitarama commencent à manifester certains changements de comportement. De la part des jeunes gens surtout mariés d'abord, la planification familiale occupe actuellement une place importante dans la préparation de leur avenir. Dans la ville de Gitarama par exemple, on a pu s'entretenir avec des jeunes filles qui apprennent la couture. Pour elles, l'espacement et la limitation des naissances sont les secrets d'une famille qui veut stabiliser ses conditions de vie surtout en matière socio-économique.
Le changement de comportement a atteint également les mentalités de gens à l'égard du travail. D'aucuns ont déjà compris que les revenus tirés dans la seule activité d'agriculture (quelque fois accompagnées de l'élevage) ne peuvent pas développer leurs foyers, voire leur région. On découvre partout certains jeunes gens qui se lancent dans le commerce, d'autres apprennent les métiers comme la couture, la menuiserie, la vannerie, la maçonnerie et d'autres artisanats.
Les systèmes d'épargne commencent à se développer aussi dans la région. Les tontines sont devenues populaires dans les différents coins de la province.
Les populations des villes comme Gitarama et Ruhango ont accédé à des coopératives d'épargne et de crédit. Au niveau de la Ville de Ruhango par exemple, le Maire Donatien Murenzi affirme que la population commence à adhérer pleinement dans les coopératives d'épargne et de crédit. Deux banques populaires oeuvrent dans cette ville. Il y a aussi une banque des agri-éleveurs, " Banque Ingabo ". La population adhère aussi à des coopératives d'épargne et de crédit comme COOPEC Inkingi, Urwego, les Fonds de la jeunesse, des fonds des femmes et à d'autres associations comme celle des séropositifs de VIH. L'on ne peut pas passer sous silence les jeunes gens qui préfèrent quitter leurs foyers pour s'installer dans les différentes villes et d'autres centres de négoce. Le constat de certaines personnes de la ville de Gitarama révèle que ce phénomène d'exode rural a atteint les tout jeunes gens qui commencent à s'initier dans la vie post-scolaire. Certains commencent en assurant le commerce des œufs tandis que d'autres sont des domestiques dans les différents foyers.
Selon la population locale et les autorités dans la région, l'amélioration du niveau de vie devrait passer d'abord par l'accès aux revenus. Ce qui implique la modernisation des activités génératrices de revenus. L'agriculture passe au premier rang en adoptant les cultures favorables à la région et qui sont de grande valeur. La Maire Donatien Murenzi révèle qu'au niveau de leur région, on a adopté la culture du manioc car le marché est déjà prévu. En effet, une usine de transformation du manioc va bientôt ouvrir les portes dans la région. Elle pourra exploiter le manioc en assurant l'extraction de l'amidon, la préparation et l'empaquetage de la farine de manioc ainsi que la production d'une colle issue de certains déchets du manioc.
Quant à d'autres activités, les autorités locales sont incitées à chercher et protéger le marché des produits locaux. Il faudra également promouvoir les investissements dans le milieu rural afin que la population accède aux revenus.
Didier Semanyenzi.
A Cyangugu, le " coup de la vie " donne des bosses et fait des creux…
Cyangugu, province située au Sud-Ouest du Rwanda subit à sa manière, le coût de la vie et ses soubresauts particulièrement violents ces derniers temps. Région frontalière de la République Démocratique du Congo, elle ressent la première les frictions qui résultent de la mésentente entre les deux pays. Les nouvelles restrictions on matière d'environnement, la flambée des prix des denrées de première nécessité dont les produits basiques, la dépréciation de la monnaie, sont autant de facteurs qui rendent la vie amère à Cyangugu.
Eau et Electricité
De manière
exceptionnelle, Cyangugu est la seule région du Rwanda qui ne connaît point
de problèmes d'électricité en ses endroits électrifiés. Cela s'explique
par le fait que les deux centrales hydroélectriques, Rusizi 1 et Rusizi 2 que
le Rwanda a en partage avec la R.D.C et le Burundi, sont à proximité de
Cyangugu. Le bureau de la Société d'Electricité des Pays des Grands Lacs (
SINELAC) est près de Cyangugu, tandis que celui de la Rusizi 2 se retrouve au
Congo Démocratique.
Lorsqu'il y a coupure d'électricité en de rares cas, cela n'est dû qu'à
des pannes techniques.
L'eau par
contre serait entrain de se raréfier. La saison sèche en serait en partie
responsable. Quand l'eau baisse de quantité et que la pluviométrie n'est par
prête à se refaire la santé, la distribution d'eau est contrôlée pour une
meilleure gérance.
Le secteur Gihundwe est le plus concerné avec ses école secondaire et
Institut supérieur.
L'année 2004 en son début, a connu des pluies rares qui par ailleurs ont fini par disparaître plus tôt que d'habitude. Les plues s'arrêtaient en plein milieu de Juin les années précédentes. En 2004, à l'aube du mois de Mai, il n'y a plus eu de pluie. Cyangugu en était donc privé deux mois plus tôt. Les plantations de haricots en ont sérieusement pâti et la production a fortement baissé.
Bois
Cyangugu
reconnaît à Monsieur Chariot le mérite d'avoir été l'un des moteurs de
plantations d'arbres qui ont, au fil des ans, constitué de véritables forêts.
La déforestation quasi systématique qui a endeuillé les forêts du Rwanda
n'a hélas ! pas épargné Cyangugu. Aujourd'hui la région en porte les
marques qui ne laissent guère présager un retour à la normale avant de
longues années de reboisement systématique.
Le projet ARED s'était investi dans le reboisement de 2001 à 2004 mais les
fruits ne sont pas palpables. A ce jour, les trois districts de Bugomero,
Impala et Nyamasheke bénéficient du programme de reboisement du projet
HELPAGE-HIMO.
La sensibilisation grandit auprès des populations. La direction de l'agriculture, de l'élevage et des forêts à la province l'a entamé depuis de longs mois pour mettre en application les décisions et recommandations du Gouvernement pour la protection de la nature et de l'environnement.
Les populations avouent ne pas avoir d'autre possibilité de vivre. Surtout celles qui ne vivent que du commerce de charbon de bois. La quasi totalité des ménages n'utilisent que le bois sec ou le charbon de bois pour la cuisson des aliments et pour le chauffage, en temps de froid.
" Les populations ont beau comprendre l'importance et la pertinence de la protection de l'environnement, mais elles n'ont pas de solution de rechange. L'urgence est au reboisement rapide en plus des mesures de surveillance déjà en vigueur pour protéger les forêts et autres espaces verts ", affirme Monsieur Damien Migerero, Chef de la Division Planification à la Province.
Si la solution
miracle est de l'avis des responsables politiques, l'exploitation du fameux
gaz méthane, tous se conviennent sur une réalité : Ce n'est pas pour demain
!
D'où la nécessité de trouver les solutions intermédiaires et les plus
rapides possibles.
Les usines à
thé, les fabriques de ciment pourraient utiliser des tourbes, en remplacement
du bois. Les barres et pailles de riz sont aussi une autre éventualité à
envisager, en raison de la production considérable du riz à Cyangugu.
Cela serait certes, une solution partielle mais susceptible de suppléer la
grande exploitation de bois.
Les vivres
Cyangugu produit du basique tel : le riz, le haricot et la banane. La conjoncture économique actuelle a vu les prix de ces aliments sur le marché augmenter. La pomme de terre elle, coûte carrément les yeux de la tête. Les farines de manioc et de maïs ne sont pas non plus à la portée de toutes les bourses. Depuis la fermeture de la frontière d'avec la RDC, le prix du sucre avait fort augmenté. L'huile de palme également.
Le mois de
Juillet a été un véritable calvaire de flambée des prix. Celui d'Août a
connu des fluctuations : montées pour le sel, le riz, le maïs en grains
secs, la pomme de terre, le haricot sec, etc. Et baisse pour le charbon de
bois, le sucre, les pagnes, etc.
Les limonades de la BRALIRWA sont passées de 150 Frw à 200 Frw
Le Directeur des Affaires Economiques et Infrastructures, Monsieur Pierre
Birangamoya affirme que depuis la fermeture de la frontière rwando-congolaise,
les Rwandais ne se rendent plus au Congo Démocratique. Quand ils y vont, ils
sont malmenés. Par contre, les Congolais qui traversent la frontière
rwandaise ne courent aucun risque. Ils introduisent des produits manufacturés
et les vendent à l'aise et au détail. La législation rwandaise en matière
commerciale ne le permet pas. C'est pourquoi la direction provinciale des
Affaires Economiques et Infrastructures a, en date du 17 Août dernier, adressé
une correspondance aux concernés. Elle rappelle que la loi n°15/2001 du 28
Janvier 2001 portant modification et complétant la loi N°35/91 du 5 Août
1991, exige un registre de commerce et un affichage des prix des produits
commercialisés, une remise de facture au client, la possession de factures
prouvant l'acte d'achat et au prix mentionné. Le manque de ces pièces entraîne
des sanctions prévues par la même loi.
Pétrole, Essence et Mazout
Les stations vendeuses de produits pétroliers à Cyangugu sont très souvent à cours et en rupture de stock. La province subirait des défaillances d'approvisionnement. Plusieurs stations connaissent des pénuries, alors qu'elles sont sous-contrat avec plusieurs entreprises et même le bureau provincial. Ce dernier effectuerait ses paiements à l'avance, mais recevrait son dû trop souvent en retard.
Rapport salaire - coût de la vie
Rien qu'à
vouloir jouer à ce jeu du rapport salaires coût de la vie donne le vertige.
La dévaluation monétaire, les maigres salaires, la flagrante
disproportionnalité existant entre les salaires, le taux du chômage, la
flambée vertigineuse et continue des prix - qui n'épargne même pas les
produits basiques - le prochain assainissement de la fonction publique, sont
autant de variables qui rendent le coût de la vie extrêmement dur.
La main d'œuvre est devenue rare aussi bien pour le maçon que pour tout autre salarié journalièrement. Le coût de la vie donne de plus en plus de " bosses " et de " creux ".
Arnaud Nkusi
Gisenyi : Les conséquences du soleil dans tous les domaines de la vie
Lorsque nous
regardons un peu partout dans le pays, nous constatons que le coût de la vie
est devenu trop cher. Le soleil qui a duré un peu plus longtemps que prévu a
provoqué la diminution de la production des denrées alimentaires de façon
considérable. Cela est le résultat d'une mauvaise gestion de
l'environnement. En effet, il y a eu une grande consommation de la forêt, ce
qui a provoqué le tarissement de plusieurs cours d'eau, qui à son tour est
à la base du manque d'électricité dans le pays. La province de Gisenyi a
une particularité car elle a été affectée par ce soleil accablant. En
effet, personne n'ignore qu'au cours des années écoules, la province de
Gisenyi produisait des pommee de terre en abondance. Le kilo se vendait à 30
ou 35 Frw. Ce prix variait, il pouvait atteindre 45 Frw le kilo.
Actuellement, cette situation a changé. La production a diminué ce qui a
causé la montée du prix par kg. Il arrive à 80-85 Frw le kilo.
Selon différentes personnes que nous avons pu approcher, ce n'est pas
seulement le prix du kilo de pomme de terre qui a augmenté, mais tous les
produits agricoles.
Dans la province de Gisenyi, on nous a confirmé que ces derniers temps, on assiste à une flambée des prix des denrées alimentaires. Le kilo de haricots qui coûtait avant, 155 Frw, revient à 180 Frw. Un kilo de poissons frais qui s'achetait à 700 Frw coûte actuellement 2000 Frw. Ce qui est excessivement cher pour certaines familles qui nous ont confirmé qu'elles peuvent faire 2 à 3 mois sans consommer du poisson.
Nous nous sommes aussi entretenus avec des familles qui ont dû quitter la campagne pour la ville. Selon elles, la situation est plus que dramatique. En effet, à cause du prix de l'essence qui a augmenté, les commerçants font en sorte qu'ils récupèrent l'argent dépensé à l'achat du carburant. C'est à dire que s'ils achetaient le kilo de pomme de terre à 20 Frw, ils le proposent à 14 Frw. Le pays an à ce moment n'a pas d'autre choix que d'accepter. Si tel n'est pas le cas, toute sa récolte risque de pourrir dans la maison.
Un autre fait qui a peut être rendu le coût de la vie un peu cher c'est la surpopulation. En effet, avec la nouvelle politique du pays qui a redonné une bonne image du pays, les gens sont rentrés massivement. Or, la province de Gisenyi a accueilli beaucoup de gens venant du Congo voisin.
Pour résoudre ce problème, certains fonctionnaires et commerçants de la province proposent d'exonérer les produits alimentaires. Comme cela se faisait avant. Le peu de produits qu'ils reçoivent viennent du Congo voisin, mais ce n'est pas donné à tout le monde car les commerçants imposent des prix qui dépassent de loin les capacités d'un citoyen ordinaire.
Cette situation, si elle perdure, elle pourrait occasionner une très grande avancée du banditisme qui commence à se faire sentir. En effet, selon une dame résidant à Gisenyi, le banditisme devient petit à petit insupportable. Avant, on pouvait laisser les chaises sur la terrasse. Mais aujourd'hui, l'on ne peut pas prendre un tel risque. Pour elle, c'est le fait que les gens ont faim.
D'autres affirment que si le gouvernement ne prend pas des mesures d'ici peu, la situation pourra devenir insupportable. En effet, pour eux, ils ne comprennent pas pourquoi les prix grimpent d'une façon étonnante pour les produits locaux, alors que le cas n'est pas le même pour les produits comme l'huile de palme et le riz venant de la Tanzanie. Pour eux, l'Etat devrait intervenir afin que la situation ne devienne dramatique. D'ici peu, les fonctionnaires ne pourront plus suivre le rythme de la montée des prix alors que les salaires ne suivent pas le même rythme.
Blaise Gahizi.
Obscurité,
flambée des prix, désespoir … à Butare
" Où sont nos députés ? "
Ceux à qui le coût de vie semble difficile, ce ne sont pas ceux-là qui se recueillent toujours aux hôtel Ibis ou Faucon pour étancher une soif qu'ils se créent eux-mêmes perpétuellement. Ce ne sont pas non plus ceux-là que l'on aperçoit se baigner à la piscine de l'Hôtel Credo après s'être rassasiés de bonnes entrées chaudes au restaurant dont les prix ne les effrayent jamais. Ce ne sont pas, encore une fois, ceux-là qui décident d'aller vider leurs poches à la frontière Rwando-Burundaise, à quelques dizaines de kilomètres de Ngoma, afin de pouvoir prendre aisément de l'Amstel Beer provenant du pays voisin. " Ku Kanyaru ", disent ceux-là en se fixant rendez-vous du week-end.
Mais plutôt,
on les remarque dans différentes catégories, et on sait les différencier de
ceux qui sont nés avec une cuillère d' argent dans la bouche.
Sur la route Kigali-Akanyaru, dans l'étendue de la province de Butare, les
groupes de gens se sont faits enrôler dans les activités de réhabilitation
des chaussées. Au chantier, on voit même les femmes, les unes pousser les
brouettes remplies de cailloux ou de sables, les autres truelles à la main,
animées d'un courage exceptionnel malgré la poussière et le soleil
accablant.
Quand on leur demande pourquoi elles ont choisi un tel travail habituellement
réservé aux hommes, elles répondent presque de la même façon : "
c'est la vie qui nous a poussé à solliciter ce dur travail. Cela nous permet
de satisfaire quelques besoins primaires avec le peu d'argent que nous
recevons ". Ces femmes rentrent à des heures tardives et doivent préparer
à manger pour leurs enfants qui les attendent impatiemment.
Le purgatoire à côté du jardin d'Eden
Non loin de Bigega (Nyanza) se trouve un centre d'une grande renommée pour la préparation des brochettes. C'est à Mugandamure. Le taxi s'arrête, brusquement, les jeunes garçons introduisent les branches de bambou décorées de quelques morceaux de viandes en criant aux passagers, à travers les vitres : " Ceci est bon, prenez plutôt ça… " Persuadés, ces passagers offrent quelques monnaies en échange des brochettes. Ainsi ces jeunes parviennent à survivre au dépend de l'argent récupéré toute la journée durant.
A Gikonko, Save, Mbazi, abondent des vendeurs d'avocats. Mais à quel prix ? Au moment où à Kigali un seul avocat revient à 50 Frw, on peut facilement s'en procurer trois ou quatre à la même somme dans ces contrées du sud. Ces vendeurs attendent, sans autre choix, les passants inconnus qui deviendront leurs clients. Et quand la demande ne se manifeste pas, il rentrent désespérément paniers sur la tête remplis des fruits qu'ils ne pourront même pas consommer. Leur objectif n'est pas atteint car ils espéraient obtenir de l'argent qui servirait à l'achat de divers articles. Ainsi le coût de vie devient difficile. Alors qu'ils habitent tout près de l'ISAR (Institut Supérieur Agronomique du Rwanda). Cette institution qui abrite pas mal de chercheurs et beaucoup de produits issus de leurs recherches. En effet, quand on sillonne les champs de l'ISAR, on se croit facilement au jardin d'Eden mais à quelques mètres de sa clôture, c'est le purgatoire. Les populations environnantes cultivent sans espérer aux meilleurs récoltes. A l'intérieur de l'enclos, on mange à sa faim mais les pauvres des collines entourant l'Institut se lèvent le matin sans pouvoir espérer dormir la nuit : certaines familles mangent à peine une fois par jour !
Mort d'un élève à Save
Tous les
domaines de la vie sont touchés. Côté éducation, les parents se plaignent
du changement du calendrier scolaire. Ce dernier a affecté leur économie
qui, dores et déjà, était médiocre. Les écoles exigent une grosse somme
qui vient s'ajouter au minerval habituel. Les parents et les élèves
assistent à d'innombrables conséquences très choquantes dues à ce
changement.
Dernièrement, à l'école secondaire Ste Bernadette de Save, un événement a
endeuillé les parents, les élèves et leurs enseignants : Il s'agit de la
mort d'un élève finaliste. De quelle façon ? Pendant cette saison sèche,
les centres scolaires de cette région manquent d'eau. Pour cela, il a été décidé
que tous les élèves de ladite école doivent aller puiser de l'eau au lac se
trouvant à une certaine distance de l'internat. C'est là qu'ils lessivent
leurs habits et font leur douche (la plupart). Un certain mercredi du début
Août 2004, vers 17h00, un élève a plongé dans ce lac pour ne plus regagner
les rives. Il s'est noyé et rendu son âme vers 20h00 sans trouver aucun
secours de la part de la population riveraine. " S'ils étaient partis en
vacances en Juillet comme à l'accoutumée, ce danger n'aurait pas eu lieu
", disent les habitants de Save.
Si un tel accident s'est produit dans une école ce n'est pas à dire que les autres populations ne connaissent pas le problème de manque d'eau. " Nos autorités locales sont conscientes que " l'eau est source de vie " comme elles le disent toujours dans leurs discours mais elles ne sont pas capables de nous en disponibiliser ", indiquent ces habitants avant d'ajouter : " toutes les impossibilités sont renvoyées à la vision 2020 car selon les promesses, tous les rêves seront réalisés à cet horizon ".
" Nos députés somnolent au Parlement… "
En plus de
manque d'eau, à l'instar d'autres provinces, Butare fait face à la sévère
crise d'électricité. Le soir, l'obscurité gâche toutes les activités. A
la campagne, c'est le feu de bois qui assure l'éclairage et le chauffage.
Quelques familles sont capables de se procurer du pétrole pour allumer la
lampe. Pour d'autres, on ne se sert que de bougie ne fut-ce que le temps de
prendre le repas du soir. En ville, ils sont habitués à l'obscurité totale.
Plutôt la résignation au lieu de l'habitude (un adage rwandais dit "
ntawumenyera akago " : on ne s'habitue pas au mal).
Un de nos interviewés : " On a souvent entendu chanter le gaz méthane
du Kivu comme source d'énergie la moins chère pouvant constituer
d'alternative surtout dans cette période où la capacité énergétique du
pays ne répond plus à la demande. Nous ne savons pas quand la réalisation
du projet sera effective. Voici que nos produits alimentaires nécessitant la
congélation son abîmés, les salons de coiffure ne fonctionnent presque
plus, les travaux sur l'ordinateur (bureaux, café Internet, secrétariat
public,…) sont paralysés, etc ".
Et l'autre d'intervenir : " Ailleurs, on entend parler de démissions des
Ministres suite à un accident ou une panne quelconque en rapport avec ses
attributions. Mais chez nous, jamais.
Ca fait combien de temps qu'on n'a pas de courant électrique ? "
Concernant la hausse des prix sur tous les marchés, l'un de nos
interlocuteurs nous a expliqué que quand les prix des biens de consommation
augmentent régulièrement, le coût de la vie de la population - qui était
dores et déjà fragile - se détériore de plus en plus, vers une misère
sans précédent. Devant la situation économique incertaine où la monnaie
perd sa valeur, où le cours de pétrole reste croissant, où les échanges
internationaux sont caractérisés par une balance déficitaire chronique,
notre informateur anonyme se demande " où sont les voix de nos députés.
A la télévision nous voyons certains d'entre eux somnoler pendant les séances
du Parlement. Ils sont accrochés aux sièges de l'Assemblée Nationale,
immobiles, sans plaider pour la population qui les a mandatés. Ils ont gagné
notre confiance lors des législatives mais nous restons à nous demander
jusqu'à quand devrions-nous attendre la réalisation de leurs promesses. Ce
sont eux qui devraient d'abord nous rendre visite - comme vous le faites vous
journalistes - ensuite, examiner notre situation de vie, plutôt de survie ;
pour enfin, chercher des solutions en collaboration avec les autres autorités,
chacun dans ses pouvoirs. "
Femmes de la rue … enfants incarcérés au stade
C'est en pleine
ville où l'on assiste véritablement à un écart entre les démunis et les
parvenus. Ces derniers jettent les restes de leurs repas aux chiens alors que
ces premiers n'ont rien à mettre sous la dent. Il ne s'agit pas du spectacle
quand les femmes et les enfants se livrent à la mendicité. Du magasin à
l'autre, de l'hôtel à la gare routière les mendiants tendent la main aux
passants piétons et véhiculés. En face du Rectorat universitaire, près du
parking du taxi express dénommé Volcano, voici deux femmes, l'une portant un
enfant au dos. Elles se bousculent impitoyablement devant un passager s'apprêtant
à entrer dans le bus. Celui-ci les observe attentivement, des cheveux aux
orteils.
Curieusement, elles ne souffrent d'aucune infirmité. Elles se regardent méchamment.
La plus âgée dit à sa commère : " pourquoi me poursuis-tu
partout ? Laisse-moi chercher quelques pièces d'argent. Toi tu en as amassé.
Maintenant c'est mon tour. " A côté se trouve une fille, propriétaire
d'un Kiosque publiphone, qui a suivi la scène et dit au passager ému :
" tu sais qu'elles sont d'une même famille ? Celle-là est grande sœur
à celle-ci (en montrant du doigt). Même leur vieille maman mendie. " Le
passager qui sera l'auteur de cet article n'a pas manqué de s'entretenir avec
ces femmes qui, à leur tour, lui ont décrit la situation de leur vie
quotidienne.
On ne peut pas parler de coût de vie difficile sans mettre en relief ces
enfants qui n'ont comme logement que les terrasses des magasins, les maisons
inhabitées ou en construction. Certains mendient, d'autres assurent le
portefait. Ces derniers transportent les bagages quel que soit le poids. Pour
eux, manger ne fut-ce qu'une fois le jour ou la nuit est une règle. Récemment,
selon les informations reçues dans la ville de Butare, la police a procédé
à l'évacuation de ces enfants vers le stade Huye. " Là ils étaient
enfermés, sans nourriture ni eau, battus comme de petits serpents. N'eut été
l'intervention d'un groupe des jeunes qui les encadraient avant l'opération,
on ne sait pas si ces enfants seraient encore en vie. ", confie un étudiant.
Ils ont été récupérés par " leurs amis " mais sous condition :
Que la police ne les voit plus dans les rues de la ville. " On dit que
nous sommes le Rwanda de demain (Rwanda rw'ejo) alors que nous mourrons
aujourd'hui ", disent ce mayibobo. Qu'il y ait de mécanismes propres et
humains pour réhabiliter et protéger ces symboles d'innocence et d'avenir.
Désespoir et incertitude chez les salariés
Dans la vie des salariés, on remarque un désespoir lié au projet de reconfiguration ou réforme de la fonction publique. La peur de leur avenir proche ou lointain est perceptible. " Même si nous ne savons pas notre prochaine destination, nous préparons notre départ. Nous ne savons ni l'heure ni le jour où nous quitterons nos fonctions pour une vie incertaine ", disent bon nombre d'agents de la fonction publique en affichant un désespoir total face à ce qu'ils appellent " un futur chambardement ". Les rumeurs circulent d'un bureau à un autre : " les listes seront bientôt publiées ". Qui restera ? Qui partira ? Ils manquent d'information sûre à ce sujet.
Mutangana B. Steven
La
vie ne lui est pas toujours légère!
La Nouvelle Relève est descendue dans la Province d'Umutara pour se rendre
compte du coût de la vie. Elle a remarqué, hélas, qu'elle n'était pas du
tout facile à la population !
D'emblée, nous avons constaté que l'éducation, base de tout développement, n'est pas accessible à tous. Selon M. Vincent Nyagatare, Vice-Maire chargé des Affaires Economiques à la Maire de la Ville d'Umutara, l'éducation primaire ne pose pas beaucoup de problèmes puisque la Province dispose de beaucoup d'écoles et l'accès y est presque maximum. L'objectif ici étant d'atteindre 100% d'élèves à l'âge scolaire, ainsi que l'Education Universelle Primaire (UPE) envisagée par le Gouvernement en 2010. Cependant, a-t-il précisé, au niveau secondaire, il y a encore du pain sur la planche. Les écoles sont encore insuffisantes par rapport aux besoins. Ce qui fait que beaucoup d'élèves sont obligés d'aller chercher des places ailleurs. Certains les trouvent dans les provinces les plus éloignées, et ici, naît le problème de coût de transport et d'internat très élevé pour les parents dont certains préfèrent garder les enfants à la maison jusqu'à nouvel ordre. Beaucoup d'indigents ont abandonné leurs études suite au manque des frais scolaires jadis payés par le Ministère de l'Administration et des Affaires Sociales (MINALOC) sur les 333 élèves du cas (pour la ville d'Umutara), 22 seulement ont pu être réintégrés dans des écoles après décentralisation.
Au niveau de l'éducation tertiaire, les élèves qui terminent le secondaire, désireux de poursuivre leurs études supérieures ou universitaires, de même que des anciens finalistes qui travaillaient déjà, se heurtent au problème de manque d'une institution supérieure ou universitaire. Certains, qui en ont des moyens, vont poursuivre ailleurs (Kigali, Butare ou Kibungo).
Là, encore une fois, le problème de coût de transport, logement, restauration,…se pose avec acuité. D'autres préfèrent, purement et simplement, ne pas poursuivre les études mais plutôt chercher du travail. D'autres encore chôment sérieusement et préfèrent s'occuper du bétail.
Pénurie d'eau
La Province a, depuis longtemps, souffert du manque notoire d'eau. Ceci fait que la population effectue des kilomètres à sa recherche. Mme Immaculée Umurungi, ménagère rencontrée à la file sur une pompe d'eau en pleine ville nous a confié qu'elle venait de passer plus de 3 heures de temps sur la file qui, non seulement, était très longue, mais aussi l'eau venait en petite quantité qui, des fois même, tarissait. " Lorsqu'elle tarit, on est obligé de l'attendre avec espoir qu'elle reviendrait, puisque, de toutes façons, il n'y avait pas une autre solution en vue ", a-t-elle déclaré.
Pour le bétail, c'est pire : à cause de la saison sèche, les sources ont été asséchées, d'où migrations très fréquentes du bétail à la recherche d'eau dans le parc de l'Akagera. Selon M. André Kagabo, Vice-Maire chargé des Affaires Sociales à la mairie de la Ville d'Umutara, le bétail souffre, actuellement, d'un manque sérieux d'herbe qui est partout sèche. Ceci crée des maladies et amaigrissements surtout chez le gros bétail (vaches).
Quant à l'électricité, elle est fournie en ville ainsi que dans de grands centres commerciaux (Gabiro, Muvumba, Rukara…). Là aussi, actuellement, elle se heurte au délestage en cours dans tout le pays. Cependant, il y a un espoir d'extension du réseau et connexion des villages qui sont proches de la ligne électrique " Kiziguro-Nyagatare " inaugurée en 2003. Un projet de fours améliorés et autres formes d'énergie à moindre coût est en étude (panneaux solaires, séchoirs et chauffe-eau solaires) a promis M.Kagabo.
Cette pénurie d'électricité nous renvoie directement aux sources d'énergie qui fait également suer la population locale. Quand bien même l'électricité serait en permanence pourvue, la majorité de la population est pauvre pour utiliser des cuisinières ou réchauds. Elle utilise la braise (charbon de bois) comme principale source d'énergie de cuisson des aliments (en ville). Or, d'après bien des avis des ménagères rencontrées au marché de Nyagatare, la braise est devenue de l'or. Un sac qui coûtait 1200 Frw à l'issue de l'an 2003, coûte actuellement 2500frw. " Cette hausse des prix nous fait souffrir ! Or, nous n'avons pas d'autres sources d'énergie possible pour cuire nos aliments ! ", a déclaré une vieille dame. A la campagne, la population qui jadis, utilisait du bois de chauffage, se heurte, actuellement, à de restrictions du Ministère ayant l'environnement dans ses attributions. La population rurale réclame une solution de rechange puisqu'elle ne dispose d'aucune autre source d'énergie. Le projet de Biogaz n'est pas encore fonctionnel dans la province : " Nous sommes face à l'impossible ! ", s'est exclamé un vieux papa venu vendre une corbeille de patates douces au marché, en provenance d'un village avoisinant Nyagatare.
Nous avons également constaté que la grande majorité de la population est sous-alimentée. Selon beaucoup d'avis des personnes interviewées, même si la plupart pratiquent l'élevage bovin, elles se nourrissent très rarement de la viande. Elles en prennent si et seulement si elles vendent une vache ou en cas de sa mort subite. A part le lait produit en quantité suffisante, la population se nourrit du manioc et de haricot qui constitue un régime monotone. Les personnes adultes substituent le lait (qu'elles réservent aux femmes et enfants) à la liqueur locale appelée " Kanyanga " consommée en grande quantité et discrète (puisqu'elle est prohibée par la loi en vigueur. Une autre partie de la population agricole ne vit que des seuls produits cultivés. Ils pratiquent une culture d'autosuffisance. De l'avis de ces agriculteurs, la longue saison d'Umutara ne leur permet pas de récolter. D'ailleurs, vers les années 2000, 2001 et même 2002, la province a connu une famine extraordinaire de façon que certains en ont succombé.
Concernant l'habitat, une partie de la population dispose des maisons. Elle n'en endure pas le coût du loyer qui n'est pas si moins cher qu'on puisse le penser. Cette partie est constituée des Rwandais qui vivaient au pays depuis très longtemps (avant la guerre civile) et qui n'ont pas été affectés par le génocide de 1994, quelques survivants, rescapés et très peu de gens qui ont pu se construire leurs propres maisons du retour dans leur pays après plusieurs années d'exil dans des pays limitrophes et même ailleurs. Une autre partie est constituée de locataires qui nous ont affirmé que le coût du loyer n'est pas moindre comme on puisse l'imaginer. Une maison cadastrée à 3 ou 4 chambres (avec sanitaires) atteint facilement 60.000 francs rwandais. " Peu de gens peuvent se permettre ce luxe vu la pauvreté actuelle ", a déclaré un grand commerçant au centre de Nyagatare. D'autres maisons, qui de 30.000, qui de 20.000, 10.000 voire 5.000 sont réservées au petit peuple pour le loyer.
Troisième catégorie : les habitats regroupés
La population habitant ces agglomérations nous a avoué qu'elle ne payait absolument rien comme loyer puisque ce sont des maisons leur construites par l'Etat. Cette forme d'habitat a été conçue après le génocide par le Gouvernement d'Union Nationale pour résoudre le problème d'anciens réfugiés qui sont rentrés sans rien amener comme maison restée dans les pays de refuge. Cette population loue cette bonne initiative du Gouvernement. Cependant, même si elle ne se heurte pas au coût du loyer, elle se plaint de la façon superficielle dont ces maisons sont souvent construites : rien qu'avec la boue, aucun ciment, même sur le pavement, pas de fondation. Pendant la saison des pluies, beaucoup de ces maisons s'écroulent et certaines blessent les gens à l'intérieur ou à l'extérieur. Ceux qui ont des moyens (ils sont très peu nombreux) essaient de les renforcer avec du ciment ou même les agrandir (elles sont trop petites pour abriter toute une famille). Cette situation fait que beaucoup vendent leurs maisons de peur qu'elles ne s'écroulent à peu de frais pour aller vivre ailleurs.
D'aucuns ne trouvent pas raisonnables les tarifs des mutuelles de santé !
Même si une bonne partie de la population comprend le bien fondé des mutuelles de santé, une autre partie estime encore trop chèrs pour elle les tarifs. La contribution annuelle par membre de 600frw est raisonnable pour la population. Cependant, elle se plaint du fait qu'une fois le membre a déjà payé sa contribution annuelle, il doit encore payer 150 frw à chaque consultation médicale ainsi que 25% du prix de l'ambulance (pour les gens qui habitent loin d'un hôpital en cas d'urgence). Rappelons que les 600 Frw sont à payer en deux tranches : du 1er Mai au 30 Juin et du 1er Janvier au 28 Février de chaque année, mais dans sa totalité. Cependant, puisque les pauvres ne pouvaient pas trouver une tranche en un seul coup, il a été créé des associations regroupées auprès des autorités de base chez qui les membres versent de l'argent petit à petit jusqu'à atteindre le montant exigé. Pour ceux qui ont des difficultés à l'atteindre malgré tout, des dirigeants de base les aident à trouver des crédits au sein des banques populaires locales, remboursables dans un délai ne dépassant pas une année, à condition, bien sûr, que le membre soit issu d'une association connue.
Tout compte fait, le coût de la vie dans la province d'Umutara n'est pas si facile qu'on le pense pour la population.
Jean
Claude Rubingisa.