Alors que de mystérieux personnages ont récemment tenté de déterrer les cadavres retrouvés flottant en août sur le lac Rweru, Washington met la pression sur le Rwanda et le Burundi. Dans un communiqué publié vendredi, le secrétariat d'État américain demande aux deux pays d'ouvrir d'urgence des enquêtes impartiales sur cette sombre affaire.
Mis à jour à 17h50.
Le communiqué publié vendredi par Washington est limpide : les États-Unis demandent au Rwanda et au Burundi de mener d'urgence des "enquêtes rapides, approfondies, impartiales et concertées (…) avec le concours d'experts légistes indépendants et internationaux" pour faire toute la lumière sur le mystère des dizaines de cadavres vus flottant sur le lac Rweru depuis la mi-juillet, selon des pêcheurs qui ne les ont pas tous recueillis de peur d'être inquiétés.
Officiellement, donc, seuls six corps - quatre mi-août puis deux autres en septembre - ont été retrouvés ligotés dans des sacs de jute après qu'ils eurent dérivés le long de la rivière Nyabarongo-Kagera, qui prend sa source au Rwanda. La même rivière avait charrié de nombreux cadavres durant le génocide de 1994 et, en 2006, des corps d'opposants burundais, assassinés lors de violences politiques, avaient été jetés dans divers cours d'eau du Burundi.
L'aide du FBI
Les "victimes méritent d'être identifiées", leurs familles "de connaître leur sort" et les "coupables doivent être traduits devant la justice", explique la porte-parole du département d'État américain Jennifer Psaki, dans le communiqué distribué à Bujumbura. Selon des sources concordantes à Bujumbura, Washington aurait proposé l'aide du FBI pour éclaircir cette affaire qui embarrasse au plus haut point les autorités du Rwanda et du Burundi.
Une commission d'enquête mixte a été mise en place par les deux pays pour déterminer l'origine des cadavres, mais en réalité aucune investigation sérieuse n'a jusqu'ici été menée. Les corps ont été enterrés sans être autopsiés, ce qui n'empêche pas Kigali d'affirmer que les morts ne sont pas rwandais et Bujumbura qu'ils ne sont pas burundais… "Des témoins au Rwanda ont affirmé avoir vu des corps dériver sur la rivière Akagera ce qui renforcerait les présomptions que les corps viendraient du Rwanda. Sans que l’on puisse lier ces phénomènes entre eux à ce stade, la découverte de ces corps intervient à un moment où l’on enregistre une multiplication des disparitions au Rwanda", a déclaré de son côté Syriaque Ndayisenga, président de la Ligue des droits de la personne dans la région des Grands Lacs (LDGL).
Visiteurs du soir
Les semaines passent et le mystère s'épaissit. Dans la nuit de dimanche à lundi, "un groupe de personnes non identifiées ont accosté" côté burundais, à l'endroit où les quatre cadavres retrouvés en août avaient été enterrés, a révélé à l'AFP Aline Manirabarusha, gouverneure de la province burundaise de Muyinga qui borde le lac. Selon elle, les inconnus voulaient "déterrer" les cadavres mais ils "ont fui lorsqu'un veilleur de nuit les a surpris".
Depuis, l'administration locale a interdit la pêche sur le lac de 18h00 à 6h00 du matin. L'armée burundaise a elle envoyé un second bateau de la marine burundaise pour "sécuriser" la zone, ainsi que des renforts dans tous les petits ports du coin. Selon un haut gradé burundais, des renforts rwandais avaient précédé leurs collègues burundais dans la région.
(Avec AFP)