CENTRE
DE LUTTE CONTRE L’IMPUNITE
ET
L’INJUSTICE AU RWANDA
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Bruxelles,
le 11 juillet 2006
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BRUXELLES
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COMMUNIQUE
n° 93/2006
Rwanda :
Le Lt Colonel Patrick KAREGEYA est emprisonné parce qu’il a refusé d’être
contrôlé seul par l’Ombudsman.
Des témoins
rwandais ne sont plus dupes, l’Ombudsman Tite RUTAREMARA a été désigné
par le Chef d’Etat terroriste du Rwanda, le général Paul KAGAME, qui
s’en sert pour exercer un chantage permanent sur ses proches collaborateurs
TUTSI. Non seulement, il est supposé
protéger le citoyen contre les injustices liées à l’impunité des
individus qui se placent au dessus des lois et contre les abus de pouvoir,
mais aussi l’Ombudsman sert surtout à contrôler financièrement les
dignitaires Tutsi et Hutu dont le président Kagame veut se débarrasser,
terroriser ou saisir la fortune « mal acquise ».
C’est
parce qu’il aurait refusé d’être contrôlé seul et de « justifier
seul » l’origine de sa fortune devant l’Ombudsman que
l’ancien homme de confiance du président Paul KAGAME, le Lt Colonel Patrick
KAREGEYA, risque d’être condamné à 7 ans et 6 mois de prison ferme. Pour
une « prétendue désobéissance »
doublée d’un délit de « désertion » !
Le seul plaignant n’est personne d’autre que son chef hiérarchique et
chef d’Etat major général des FRD (Forces Rwandaises de Défense), le général
James KABAREBE. Cette peine a été demandée par l’auditeur militaire qui
prétend que les preuves, avancées par James Kabarebe dans sa lettre qui a été
lue devant la Cour militaire, sont suffisantes.
La
véritable raison de cet acharnement judiciaire est que KAREGEYA aurait osé
« suggérer » à Tite
RUTAREMANA que « si
contrôle il doit y avoir », le président Kagame devrait « justifier
lui aussi » l’origine de sa fortune colossale. En effet, tous
ceux qui enquêtent sur les maffiosi du FPR estiment que la fortune des chefs
militaires et politiques du Front Patriotique Rwandais (FPR) provient non
seulement des différents « butins
de guerre pillés au Rwanda en
1994 et en République Démocratique du Congo (RDC) depuis 1996
jusqu’aujourd’hui ». Une autre partie de leur fortune
proviendrait des détournements de l’aide extérieure, des fonds publics,
des recettes, des commissions perçues sur la vente des sociétés de l’Etat
bradées pendant leur privatisation. Le
FPR a pu mettre en place un système de « racket » basé sur les
« cotisations forcées »
prélevées obligatoirement en argent liquide, sans quittance et sans aucun
libellé. En effet, tous les employés du secteur public ou privé
subissent des pressions, des intimidations et des menaces pour devenir des
« adhérents forcés » et des victimes du FPR. Ce racket est
institutionnalisé de telle sorte qu’il existe une sorte de « percepteur
des cotisations forcées » dans chaque établissement public ou privé,
dans chaque société ou usine. Gare à celui qui ne versera pas sa cotisation
mensuelle forcée pour laquelle il n’obtiendra aucune quittance. Des commerçants,
des entrepreneurs indépendants ainsi que d’autres personnes disposant de
quelques revenus que ce soit sont obligés de payer « cette
sorte de rançon » pour s’assurer un minimum de sécurité
physique et éviter d’être « mis
en faillite » suite à un « embargo
occulte » qui peut mettre en danger leurs entreprises.
Toutes
ces cotisations qui proviennent de tout le pays et de tous les horizons sont gérées
dans les caisses noires du Front Patriotique Rwandais (FPR) qui n’est
redevable devant personne. Ni devant un contrôleur, ni devant un gestionnaire
de l’Etat. Seul le grand patron
Kagame gère et redistribue cette fortune provenant du racket parmi les autres
maffiosi du régime FPR pour s’assurer leurs services et leur fidélité.
Il peut désigner « qui parmi ces
proches collaborateurs » doit subir le contrôle de l’Ombudsman
Rutaremara quand bon lui semble. C’est cette dépendance et cette remise en
esclavage économique que le Lt Colonel Patrick KAREGEYA aurait tenté de
bousculer à ses risques et périls. Ce qui se serait traduit naturellement en
un crime de « désobéissance et
de désertion » !!
Entre-temps
la population rwandaise croupit dans la misère et la pauvreté totale, tout
en subissant une avalanche de directives et de lois liberticides : confiscations
des vallées et marais en faveur de quelques associations, barons et
dignitaires FPR qui sont déjà millionnaires ; interdiction
de couper son bois, de fabriquer soi-même des briques et des tuiles (toutes
les carrières ont été cédés à des militaires et autres dignitaires FPR) ;
interdiction de faire sortir son bétail
et le faire paître loin de sa maison (mort des petits éleveurs qui
pouvaient obtenir un fumier organique) ; interdiction
de construire sa maison avec son bois sans l’autorisation et parfois
l’autorisation d’empêche pas de subir toutes sortes d’abus et de
brimades ; bref la population rwandaise revit dans des conditions qui prévalaient
à l’époque de l’esclavage des monarchies féodales d’avant les années
1960.
Une
détention préventive plus courte et un procès rapide d’une journée !! :
Le
Lieutenant Colonel Patrick KAREGEYA a été arrêté le 15 mai 2006, pour la
deuxième fois. La première fois, il avait été arrêté début Mai 2005 et
porté disparu pendant des mois (six mois environ) jusqu’au point où ses
proches parents et amis se sont mobilisés pour réclamer des éclaircissements
sur son sort. Dans un document anonyme
signé le 21 juin 2005 par un certain « Katabirora » ses
proches mobilisaient l’opinion rwandaise et internationale sur la
disparition de cet ancien « bras
droit » de Paul Kagame.
Le
procès de Karegeya qui a débuté jeudi le 15 juin 2006 a été reporté au
jeudi 22 juin sur demande de ses deux avocats. En effet, Maîtres Jean HAGUMA
et Christophe NIYOMUGABO, qui ont affirmé avoir reçu le dossier de Karegeya
jeudi le 8 juin 2006, ont demandé un temps nécessaire pour examiner le
dossier de leur client, d’autant plus qu’une nouvelle accusation de
« désertion » était
venue alourdir le dossier. D’après l’article 479 (2) du Code Pénal, la désertion
est punie d’une peine de prison comprise entre un an et cinq ans. La Cour
Militaire leur accordé six jours supplémentaires.
Jeudi
le 22 juin 2006, le procès de KAREGEYA a repris devant la Cour Militaire de
Nyamirambo. Les plaidoiries ont pris une seule journée ! L’auditeur
militaire a demandé une peine de 7 ans et 6 mois de prison pour l’accusé
pour désobéissance et désertion. Les avocats de Karegeya ont demandé
l’acquittement pur et simple de leur client parce qu’ils estiment que
l’auditorat militaire n’a pas pu apporter des preuves solides si ce
n’est que la lettre du seul plaignant et chef hiérarchique, à savoir le Général
James KABAREBE. Ici l’adage rwandais « ntawe uburana n’umuhamba = on
ne discute pas avec son croque mort » retrouve toute sa raison
d’exister.
Retour
sur la séquestration de Karegeya à partir de mai 2005 :
Voici
la traduction française d’un extrait en anglais du journal « The
Monitor » du 3 mai 2005 : « Considéré à une époque
comme le bras droit du Président Paul Kagame, le Colonel Patrick Karegeya, a
été arrêté (en mai 2005 à Kigali (la capitale du Rwanda) pour
indiscipline. Le Général Charles Kayonga a déclaré à cette époque :
"c'est vrai que Patrick a été
arrêté pour indiscipline grave. Nous ne tolérons pas d'indiscipline de la
part d'un officier de son rang et de son statut". Kayonga n'a pas
donné de détails sur cette accusation d'indiscipline. Mais selon certaines
sources, l'arrestation de Karegeya faisait suite à des enquêtes sur des allégations
de corruption à la compagnie TRISTAR appartenant aux Forces Rwandaises de Défense
(FRD). Cette société a fait des affaires au Congo pendant la guerre civile
de 1998-2003. Selon le rapport d'enquête le colonel Karegeya serait impliqué
dans ce dossier. Pendant la guerre au Congo, dans laquelle était également
impliqué six autres pays dont l'Ouganda, les services de renseignement extérieur
rwandais étaient dirigés par Karegeya et celui-ci dirigeait aussi les
troupes rwandaises pendant les affrontements armés entre l'Ouganda et le
Rwanda à Kisangani. Il était également l'homme-clé de Kagame dans les
pourparlers facilités par la Grande-Bretagne entre Kigali et Kampala. En
2004, Karegeya avait quitté le service de renseignement extérieur pour
devenir le porte parole des FRD. Il avait été longtemps un élément
important dans les malentendus entre l'Ouganda et le Rwanda.
CONCLUSION :
Le procès de Karegeya, qui a pris une seule journée de plaidoiries, est le
procès le plus rapide tenu au Rwanda surtout lorsqu’il concerne un accusé
considéré comme un ancien « poids
lourd » du régime FPR. Le fait d’expédier un tel procès où il
n’existe aucune preuve matérielle (documents et témoins oculaires) cache
certainement beaucoup de choses. Il s’agit d’éviter le plus grand
scandale qui devrait obliger les maffiosi du FPR à « laver
leur linge sale en public ». Cela veut dire que le chef du Gang, le
président rwandais Paul KAGAME, aurait choisi de « laver
son linge sale en famille ».
RECOMMANDATIONS :
Le Centre recommande instamment :
1.
que
le Lieutenant Colonel Patrick KAREGEYA soit libéré immédiatement
puisqu’il a été arrêté sur base de « fausses
accusations ». Sa première séquestration de mai 2005 étant illégale,
le président Paul KAGAME doit être poursuivi pour séquestration de son
« ancien bras droit » qui ne peut être traité, en aucun cas,
comme son bétail.
2.
que
l’Ombudsman Tite RUTAREMARA contrôle tous les chefs militaires et
politiques du FPR qui ont amassé des « fortunes
mal acquises » au dépend des populations rwandaises et
congolaises ;
3.
que
les maffiosi du FPR soient contraints de remettre tous les « butins
de guerre » qui devraient être rendus à leurs propriétaires légitimes.
Pour
le Centre, MATATA Joseph, Coordinateur.
CLIIR* :
Le Centre de Lutte contre l’Impunité et l’Injustice au Rwanda est une
association de défense des droits humains basée en Belgique, créée le 18
août 1995. Ses membres sont des militants des droits humains de longue date.
Certains ont été actifs au sein d’associations rwandaises de défense des
droits humains et ont participé à l’enquête CLADHO/Kanyarwanda sur le génocide
de 1994. Lorsqu’ils ont commencé à enquêter sur les crimes du régime
rwandais actuel, ils ont subi des menaces et ont été contraints de
s’exiler à l’étranger où ils poursuivent leur engagement en faveur des
droits humains.