Index AI : AFR 47/004/2003
Amnesty International lance un appel au
gouvernement rwandais pour qu'il assure la sécurité des
personnes dont les noms figurent dans le rapport de la commission
parlementaire réclamant la dissolution du Mouvement Démocratique
Républicain (MDR), un parti d'opposition.
Le 15 avril, le parlement rwandais a voté en
faveur de la dissolution du MDR après avoir approuvé à une
large majorité le rapport de la commission parlementaire accusant
le MDR de propager une idéologie « de division ».
Quarante-sept noms étaient cités dans ce rapport, dont ceux de
deux ministres du gouvernement, de cinq députés de l'Assemblée
nationale de transition, de trois hauts responsables militaires et
d'un ambassadeur.
« La récente purge de membres du MDR et
sympathisants supposés avant un référendum constitutionnel prévu
en mai, une élection présidentielle en août et des élections
parlementaires en octobre, constitue une atteinte flagrante aux
droits fondamentaux de ces personnes », a déclaré
l'organisation.
Le rapport de la commission parlementaire va
au-delà de la dissolution du principal parti d'opposition et
attaque la Ligue rwandaise pour la promotion et la défense des
droits de l'homme, la LIPRODHOR - principale organisation
non-gouvernementale indépendante de défense des droits humains
au Rwanda. Lors d'une session plénière du parlement, le vice-président
de la commission parlementaire a accusé la LIPRODHOR d'avoir
obtenu des financements étrangers pour le MDR. La pression
s'exerce également sur les médias ; des journalistes ont été
arrêtés et/ou forcés de fuir le pays pour avoir fait paraître
des éditoriaux ou des dessins satiriques critiquant la politique
du gouvernement actuel à l'encontre du MDR.
Neuf ans après le génocide et le conflit armé
de 1994, le Rwanda se trouve à un carrefour, alors que la période
de transition définie par les accords d'Arusha touche à sa fin.
En dépit des promesses d'une nouvelle ère, des restrictions
partisanes concernant les libertés civiles et politiques font
obstacle à la réconciliation nationale et à la transition vers
la démocratie.
Les allégations infondées à l'encontre des
personnes dont le nom apparaît dans le rapport semblent faire
partie d'une campagne de répression orchestrée par le
gouvernement contre l'opposition. Les forces de sécurité
rwandaises ont dressé des listes de réunions clandestines
qu'aurait tenues le MDR dans les régions de Kigali et Cyangugu
pour y promouvoir son idéologie « de division »,
terminologie vague utilisée par le gouvernement pour priver
l'opposition de son droit de représentation en cette année d'élection.
L'action du parlement met en danger la vie et le
bien-être de toutes les personnes dont le nom est cité dans le
rapport. L'une des personnes nommées, le Dr Leonard Hitimana, député,
a « disparu » le 7 avril. Le président Paul Kagame a
réclamé la démission de Célestin Kabanda, secrétaire d'État
aux finances et à la planification économique, également cité
dans le rapport. Le gouvernement a publiquement appelé à la mise
à l'écart de toute vie publique de ces personnes.
Craignant apparemment pour leur sécurité, deux
hauts responsables militaires dont les noms figurent dans le
rapport, le général Emmanuel Habyarimana, ancien ministre de la
défense et le lieutenant-colonel Balthazar Ndengeyinka, représentant
l'armée au parlement, ont fui en Ouganda le 30 mars.
Il est clair que les proches, le personnel et les
amis des personnes dont les noms figurent dans le rapport courent
également des risques. Damien Musayidizi, secrétaire auprès du
ministre de la Défense ainsi que l'ancien secrétaire d'Emmanuel
Habyarimana ont « disparu » le 3 avril. Le commandant
Félicien Ngirabatware, directeur de l'école militaire de
Ruhengeri et ami personnel du général Emmanuel Habyarimana,
serait détenu au secret au centre de détention militaire de Kami
à Kigali suite à son arrestation le 1er avril.
Amnesty International appelle également le
gouvernement rwandais à protéger les droits fondamentaux que
sont le droit à la liberté d'opinion et d'expression et le droit
à la liberté de réunion et d'association pacifiques. Toutes les
organisations de la société civile et toutes les organisations
politiques pacifiques, y compris le MDR, doivent pouvoir jouir de
ces droits.
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