En écrivant dans l’édition du 1 juin 2012
du journal Libérationque les forces armées rwandaises (FAR) auraient
possédé des missiles Mistral, Maria Malagardis, illustre une fois de plus
les grand travers de la presse française : esprit partisan, vision
hémiplégique des évènements, non vérification de l’information, liberté
prise avec les faits, le tout couronné par une grande incompétence. Quant
au Figaro, son attitude est encore plus lamentable, puisque ses
journalistes ont, par suivisme, répercuté sans la vérifier la pseudo
révélation de leur consoeur. Reprise par toutes les radios et par la plupart
des chaînes de télévision, cette « information » a été présentée comme
susceptible de renverser ce que l’on croyait savoir sur les responsabilités
concernant l’attentat du 6 avril 1994, action terroriste qui coûta la vie au
président Habyarimana et qui fut l’élément déclencheur du génocide du
Rwanda.
Or, et importe de le dire haut et fort, il
s’agit là d’une nouvelle manipulation orchestrée par les soutiens européens
du régime de Kigali. En effet :
1) Ce document est connu de tous les
spécialistes depuis des années. Il a même été longuement étudié, analysé et
critiqué avant d’être finalement écarté par le TPIR en raison de son
inconsistance. Mais, Madame Malagardis ignore les travaux de ce tribunal qui
siège depuis 1996…
2) L’information qui est à la base de ce
document émane de l’association humanitaire Human Rights Watch qui, à
l’époque, était une des caisses de résonance des thèses du FPR.
3) C’est à partir de cette information de HRW que
le capitaine Sean Moorhouse, officier G2 (renseignement) de la Minuar,
rédigea cette note qui ne fait que reprendre l’une des multiples rumeurs qui
circulaient à l’époque à Kigali, l’information concernant ces missiles étant
d’ailleurs considérée par lui comme improbable.
4) Depuis, ce même officier a longuement
expliqué le sens de sa note, notamment aux « enquêteurs » rwandais qui
rédigèrent le « rapport Mutsinzi », ce montage grossier qui était supposé
démontrer la « culpabilité» française.
5) En 2011, dans une correspondance
adressée à l’expert belge Filip Reyntjens, le capitaine Sean Moorhouse
expliqua la genèse de ce document, mettant en évidence son caractère
totalement artificiel.
6) Toutes les armes des FAR, en dehors de
l’équipement individuel, avaient été placées sous séquestre par les forces
de l’ONU et elles étaient entreposées dans un hangar situé à Kanombe sous la
responsabilité du colonel belge Luc Marchal, adjoint du général canadien
Roméo Dallaire. Nous avons la liste détaillée de ces armements. Il n’y
figurait pas de missiles. Le lendemain de l’attentat, le FPR ayant repris
unilatéralement les hostilités, les FAR reprirent par la force leurs armes
afin de pouvoir résister à leurs ennemis.
L’affaire est donc claire, il s’agit d’un
nouvel enfumage qui s’explique par trois raisons :
1) L’étau se referme chaque jour un peu
plus sur les auteurs de l’attentat. Contrairement à ce que Kigali voudrait
faire croire, le dossier du juge Bruguière est en effet toujours d’actualité
et de nouveaux témoins acteurs qui viennent d’être entendus ou vont l’être
prochainement par les juges Trévidic et Poux le confirment. Quant au rapport
d’expertise qui leur fut remis, nous avons montré ses faiblesses, ses
incohérences et ses erreurs dans le numéro du mois de mai de l’Afrique
réelle ; les parties civiles ont d’ailleurs demandé une
contre-expertise.
2) Kigali veut, par voie médiatique, faire
pression sur les juges afin d’éviter la défaite judiciaire qui s’annonce.
3) Kigali a qui beaucoup perdu avec le
départ de Nicolas Sarkozy n’a désormais plus d’alliés au plus haut niveau de
l’Etat français. En mettant la pression sur Paris, le régime Kagamé se livre
donc à un chantage auprès du nouveau régime: l’abandon de l’instruction du
juge Trévidic contre la fin de la campagne anti-française.
Bernard Lugan
01/06/2012
Le 31 mai 2012, dernier jour fixé par les juges pour que les
parties puissent réagir, la presse (Maria Malagardis de
Libération) lance un scoop comme quoi un document vient d’être retrouvé
« par hasard » dans les archives des Nations-Unies montrant que les FAR
possédaient des missiles Sol-Air notamment des missiles Mistral de fabrication
française. Ce document découvert par « hasard par une journaliste britannique »,
Linda Melvern, serait un inventaire de l’armement des FAR dressé par la MINUAR
et adressé à Koffi Annan alors chef des opérations de maintien de la paix.
La zone dite « Kigali Weapons Secure Area (KWSA) » avait été
instaurée dans le cadre de la mise en pratique des accords de paix d’Arusha.
Dans cette zone, toutes les armes lourdes devaient être consignées et gardées
par les éléments de la MINUAR. De même, les magasins d’armes de toute la
garnison Kigali-Kanombe étaient gardés par la MINUAR et les militaires ou
gendarmes des FAR qui devaient prendre des armes dans le cadre de leurs missions
quotidiennes devaient les prendre sous le contrôle des éléments de la MINUAR. Le
Commandant du Secteur Kigali, donc responsable de la KWSA était le Colonel belge
Luc Marchal. Autrement dit, c’est à lui qu’incombait la responsabilité de faire
les inventaires des armes se trouvant dans le KWSA, de prendre des mesures pour
faire appliquer les directives relatives à la KWSA, de faire rapport à l’échelon
supérieur c'est-à-dire au Commandant de la Force, le Général canadien Roméo
Dallaire. Or, dans tous ses rapports notamment ceux donnant l’inventaire de
l’armement dont disposaient les FAR, le colonel Marchal n’a jamais fait état de
missiles et encore moins de missiles français Mistral ni dans quel camp ils
étaient stockés. De deux chose l’une : ou bien le général Dallaire a envoyé un
inventaire inventé ex-nihilo (non établi par ses hommes sur le terrain) à New
York, ou alors cet inventaire n’a jamais existé.
Est-ce que ceux qui ont rédigé ce doccument sont tous morts
pour qu'on comprenne pourquoi il a fallu quelqu'un d'autre pour y mettre la main
18 ans après?
Il est clair que les lobbies pro-Kagame très puissants et
tentaculaires, ayant des relais dans la presse dite de gauche (Libération)
veulent faire pression sur le nouveau président de gauche François Hollande pour
qu’il emboîte le pas à Bernard Kouchner et sacrifie la justice qu’exigent 3
citoyens français tués le 6 avril 1994, aux bonnes relations avec le dictateur
Paul Kagame commanditaire de cet attentat. En même temps, ces milieux
hyperpuissants exercent de fortes pressions sur les juges en leur indiquant
presque de façon caricaturale et contre toute logique, comment ils doivent
rédiger leurs conclusions : désigner l’entourage de Habyarimana comme auteur de
l’attentat.
Espérons que les juges Marc Trévidic et Nathalie Poux feront
leur boulot comme il se doit.