Rwanda, croissance économique mais inégalités accrues
KIGALI, 21 août (AFP) - Neuf ans après
le génocide, l'économie rwandaise a renoué avec la croissance mais les inégalités
se sont creusées entre les villes et les zones rurales, où vivent l'immense
majorité des huit millions de Rwandais.
Les deux principaux candidats à l'élection présidentielle du 25 août, le président
sortant Paul Kagame et l'ancien Premier ministre Faustin Twagiramungu, font
d'ailleurs du développement rural une priorité.
Selon le ministère des Finances, le Produit intérieur brut (PIB) est en nette
progression depuis le génocide de 1994 et le taux de croissance était de 9,4%
en 2002.
La croissance de la richesse nationale a été en moyenne de 6% sur les trois
dernières années mais les prévisions font état d'un taux de croissance de
seulement 4,1% pour 2003.
Les économistes jugent assez bonne la situation macroéconomique du Rwanda, qui
s'est engagé dans une politique de privatisations qui devrait concerner à
court terme l'opérateur de téléphonie terrestre Rwandatel, et deux des plus
importantes entités théicoles du pays.
Le thé est devenu la principale exportation du pays, devant le café et le
coltan (colombo-tantalite, un minerai très utilisé dans la téléphonie
mobile), dont les cours mondiaux se sont effondrés.
Des efforts ont été accomplis également dans le domaine de la lutte contre la
pauvreté.
Le Rwanda, tout en demeurant l'un des pays les plus pauvres d'Afrique, est passé
de la 173e place à la 158e dans la liste des pays les plus défavorisés.
Le PIB par habitant a également progressé, passant de 228 dollars en 1994 pour
s'établir à 260 dollars en 2002.
"La progression est plus lente dans ce domaine, car la croissance démographique
consomme l'essentiel de la croissance économique", a expliqué à l'AFP le
ministre de l'Economie, Donald Kaberuka, également chargé du programme économique
du FPR.
La croissance de la population est en effet l'un des grands handicaps de ce
petit pays d'Afrique centrale déjà surpeuplé. Selon les prévisions, avec une
croissance démographique annuelle de 3% (elle était de 3,1% en 2001), la
population devrait doubler d'ici 2020.
"Il faudrait une croissance économique de 7 à 8% par an en moyenne pour
pouvoir absorber cette explosion " sur la longue durée, estime M.
Kaberuka.
Mais ce problème est d'autant plus aigu que l'immense majorité de la
population vit dans le milieu rural, qui est également le plus défavorisé.
Plus de 90% de la population active travaille dans l'agriculture et l'élevage,
qui ne représentent que 41% du PIB.
"Les inégalités se creusent entre les villes et les campagnes, surtout
entre Kigali et le reste du pays, mais elles augmentent aussi entre les plus
riches et les plus pauvres", a affirmé à l'AFP un observateur étranger,
sous couvert d'anonymat.
"Le salaire moyen est de 20.000 francs rwandais (environ 37 dollars) par
mois", souligne Martin Kampayana, le secrétaire général de la Centrale
des syndicats des travailleurs rwandais (Cestrar).
"C'est la débrouillardise qui permet de joindre les deux bouts, mais dans
les milieux ruraux la population a moins d'opportunités pour arrondir les fins
de mois", déplore-t-il.
Un lecteur du
Rwanda (ne veut pas citer son nom), qui a longtemps travaillé dans
l'administration centrale, vient de nous rappeler que déjà en 1988, le PNB par
habitant dépassait 320 $. Après treize ans, le pouvoir FPR se vante des 260 $.
Quel pas de développement?
En ce qui
concerne la pauvreté, le même lecteur nous fait savoir que les rwandais à la
campagne meurent encore de malnutrition et que la mortalité infatile n'a jamais
été aussi inquiétante que celle qui sévit actuellement au Rwanda . Quel est
alors le mode de développement de ce régime pour se targuer d'avoir combattu
la pauvreté?