CONFIDENTIEL
COMITE DES DROITS DE L'HOMME DES PARLEMENTAIRES
CAS N° RW/06 - LEONARD HITIMANA - RWANDA
Décision confidentielle adoptée par le Comité à sa 102ème session
(Genève, 7 - 10 juin 2003) Le Comité,
saisi d'une plainte concernant M. Léonard Hitimana, membre de
l'Assemblée nationale de transition du Rwanda,
1. note que la plainte a été déposée en bonne et due forme;
2. note que la plainte émane d'une ONG ayant le statut consultatif
auprès de l'ECOSOC, soit une source qualifiée aux termes de la
section C c) de la " Procédure d'examen et de traitement par
l'Union interparlementaire de communications relatives à des
violations des droits de l'homme dont sont victimes des parlementaires
" et d'une ONG locale des droits de l'homme jugée digne de foi,
soit une source qualifiée aux termes de la section C d) de la Procédure;
3. note qu'au moment des faits signalés, la victime présumée était
membre du Parlement du Rwanda;
4. note, quant au fond, qu'il s'agit d'une disparition forcée, ce qui
constitue une grave violation flagrante des droits de l'homme et des
libertés fondamentales énoncés dans la Déclaration universelle des
droits de l'homme;
5. en conclut que la plainte est recevable au regard des dispositions
de la section A de la Procédure et se déclare compétent pour connaître
de ce cas.
Le Comité,
se référant à l'exposé du cas de M. Léonard Hitimana, membre de
l'Assemblée nationale de transition du Rwanda,
considérant que M. Léonard Hitimana, député du Mouvement démocratique
républicain (MDR), a disparu dans la nuit du 7 au 8 avril 2003 après
avoir rendu visite à un ami à Kigali; que, selon l'une des
sources, il aurait été enlevé par le Service de renseignements
rwandais (DMI) ; que sa voiture aurait été retrouvée le 9 avril près
de la frontière ougandaise et aurait été emmenée là pour faire
croire que M. Hitimana a quitté le pays,
considérant également que, dans sa lettre du 12 mai 2003, le Président
de l'Assemblée nationale de transition confirme que M. Hitimana a été
porté disparu et que sa voiture a été retrouvée près de la frontière
ougandaise, dans la localité de Kaniga en province de Byumba; qu' il
a informé, dès qu'il a appris sa disparition, les services de sécurité
pour " qu'une enquête soit menée afin que toute la lumière
soit faite sur la situation "; que, s'agissant de l'allégation
d'enlèvement par le DMI, le Président observe que l'Assemblée
nationale de transition attend le résultat de l'enquête pour se
prononcer sur la question,
considérant en outre que M. Hitimana est cité nommément dans un
rapport établi le 17 mars 2003 par la commission parlementaire
extraordinaire de contrôle mise en place en décembre 2002 pour enquêter
sur les structures et politique du MDR; que dans ce rapport, dont le
Comité dispose d'une copie, M. Hitimana est accusé, avec d'autres
personnes, d'appartenance à un groupe de personnes dont le but serait
de diffuser l'idéologie de discrimination ethnique et divisionniste;
notant que le rapport ne comporte aucune preuve ni autre élément étayant
l'accusation portée contre lui,
notant que, par suite de ce rapport, le MDR, qui était l'un des huit
partis représentés à l'Assemblée nationale de transition, a été
dissous et ne peut donc participer aux élections législatives prévues
pour septembre 2003,
sachant que le Rwanda est partie à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples ainsi qu'au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui garantissent tous deux le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne,
1. remercie le Président de l'Assemblée nationale de transition des
informations fournies;
2. est alarmé devant la disparition de M. Hitimana, notamment au vu
des accusations non fondées portées contre lui dans le rapport de la
Commission parlementaire de contrôle et de l'allégation d'enlèvement
par le Service de renseignements rwandais;
3. souligne que les " disparitions forcées " constituent
une grave violation des droits de l'homme et rappelle à ce sujet
l'Article 1 de la " Déclaration sur la protection de toutes les
personnes contre les disparitions forcées " adoptée par
l'Assemblée générale des Nations Unies en 1992, qui prévoit que
" Tout acte conduisant à une disparition forcée constitue un
outrage à la dignité humaine. Il est condamné comme étant
contraire aux buts de la Charte des Nations Unies et comme constituant
une violation grave et flagrante des droits de l'homme et des libertés
fondamentales proclamés dans la Déclaration universelle des droits
de l'homme. ";
4. appelle l'attention sur l'Article 13.6 de cette déclaration, selon
lequel une enquête doit pouvoir être menée " tant qu'on ne
connaît pas le sort réservé à la victime d'une disparition forcée
";
5. demande instamment aux autorités de mettre tout en œuvre, comme
il est de leur devoir, pour retrouver sans délai M. Hitimana;
souhaite être informé des résultats de l'enquête;
6. prie le Secrétaire général de faire part de cette décision au
Président de l'Assemblée nationale de transition et aux Ministres de
la Justice et de l'Intérieur en les invitant à fournir les
informations demandées;
7. décide de poursuivre l'examen de ce cas à sa prochaine session
qui se tiendra dans le cadre de la 109ème Assemblée de l'UIP
(septembre/octobre 2003), à l'occasion de laquelle il portera, si
aucun progrès n'a été accompli dans les recherches menées pour
retrouver M. Hitimana, ce cas à l'attention du Conseil directeur.
Abatabizi
bicwa no kutabimenya.
Nikozitambirwa
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