Rwanda: série d'arrestations et d'accusations avant la présidentielle
KIGALI, 24 août (AFP) - A la veille d'un
scrutin déterminant au Rwanda, la tension est brusquement montée dimanche avec
l'arrestation de douze responsables de la campagne du principal candidat
d'opposition et le désistement d'une candidate en faveur du président sortant.
"Douze de mes observateurs ont été arrêtés hier soir à Kigali par la
police, et deux autres ont pris la fuite", a déclaré dimanche M.
Twagiramungu, ancien Premier ministre, principal candidat d'opposition à l'élection
présidentielle de lundi au Rwanda, lors d'une conférence de presse à son
domicile de la capitale, qui est également son QG de campagne.
Douze responsables de sa campagne ont été arrêtés dimanche par la police qui
les accuse d'avoir voulu préparer des "actes de violences" le jour du
scrutin.
Dans le même temps, la seule femme candidate, Alivera Mukabaramba, s'est désistée
en faveur du président sortant Paul Kagame, le grand favori de l'élection,
appelant à "barrer la route" à M. Twagiramungu.
Le scrutin de lundi est la plus importante élection depuis le génocide de
1994, qui a fait un million de morts parmi les Tutsis et Hutus modérés, et la
première présidentielle pluraliste depuis l'indépendance de ce pays d'Afrique
centrale en 1962.
Selon le porte-parole de M. Twagiramungu, Ismaël Mbonigaba, les douze personnes
arrêtées sont des "coordinateurs provinciaux accompagnés de leurs
assistants". Ils étaient toujours détenus dimanche en fin d'après-midi.
La police a assuré avoir arrêté les partisans de M. Twagiramungu pour "réunion
illégale dans un quartier pauvre" de la capitale.
"Ils étaient en train de coordonner des actions de violences dans toutes
les provinces pour demain", a déclaré à l'AFP le porte-parole de la
police, Tony Kuramba, précisant que "l'un des hommes était un soldat démobilisé".
M. Twagiramungu a expliqué que ses représentants avaient été emmenés dans
des pick-up "alors qu'ils prenaient un verre à Kigali". Il a une
nouvelle fois dénoncé des "harcèlements" à l'encontre de ses
partisans.
"Nous sommes très tristes que nos observateurs aient été arrêtés, ils
devaient quitter Kigali ce matin pour les différentes provinces", a-t-il
ajouté.
"Vu comment elles ont commencé, je dénoncerai ces élections car elles ne
sont ni libres ni équitables", a affirmé M. Twagiramungu.
La campagne a officiellement pris fin dimanche à 06h00 (04h00 GMT), soit 24
heures avant l'ouverture des bureaux de vote. "Parler aux médias n'est pas
vraiment faire campagne", a estimé M. Twagiramungu.
Samedi, la tension était déjà montée d'un cran, quand le président de la
Commission électorale, Chrysologue Karangwa, a accusé M. Twagiramungu de préparer
un "complot" afin de "truquer" le scrutin.
Pour éviter d'être accusé de tricherie ou d'incitation à la violence, M.
Twagiramungu a aussitôt décidé de ne pas envoyer ses représentants dans les
bureaux de vote lundi.
Les partisans de M. Twagiramungu ont appris sans surprise ni inquiétude le désistement
de Mme Mukabaramba au profit du président sortant.
Ce désistement "ne changera presque rien. Elle n'était pas valable, ne
représentait rien en tant qu'adversaire", a déclaré à l'AFP Ismaël
Mbonigaba, le porte-parole de M. Twagiramungu.
"Avec la candidature de M. Twagiramungu, et ses propos divisionnistes, le
Rwanda est en danger", avait affirmé un peu plus tôt dans la journée
Christian Marara, président du Parti du Progrès et de la Concorde (PPC,
gauche), dont Mme Mukabaramba était la candidate.
"Nous appelons à voter pour Paul Kagame pour barrer la route à M.
Twagiramungu", avait-il ajouté.
Après ce désistement, outre MM. Kagame et Twagiramungu, un seul petit candidat
reste en lice, l'ancien ministre Jean-Népomuscène Nayinzera, qui a confirmé
qu'il allait "lutter jusqu'au bout".