Présidentielles rwandaises: la victoire de Paul Kagame dérange sérieusement le Rcd-Goma de Ruberwa

 

Le Rwanda est entré depuis mardi 26 août dans le cercle des pays africains démocratiques avec la victoire de Paul Kagame aux élections présidentielles

Véritable plébiscite, la victoire du président résident rwandais sortant l’est au regard du score réalisé : 95,5 % pour, 5 contre. Si l’occasion aura été propice pour certains de sabler le champagne, elle ne l’aura pas été pour autant pour d’autres, effrayés désormais de la suite des événements. En RDC, le Rcd doit se sentir malheureux, car tous ses futurs faits et gestes vont continuellement a être interprétés en fonction de ceux d’un Paul Kagame interpellé par le sort d’un certain Charles Taylor, l’ex-rebelle devenu chef de l’Etat, élu même au suffrage universel, mais qui ne s’empêcha pas d’insécuriser la Sierra Leone voisine. Lâché par ses « parrains » lassés de ses fantasmes, Taylor est aujourd’hui à la merci de la Cour pénale internationale…,

Il est de ces liaisons qui deviennent dangereuses, donc fatales, lorsque les intérêts fondamentaux commencent à diverger. Celles établies entre, d’une part, le Pouvoir rwandais et, de l’autre, le Rcd-Goma, peuvent le devenir pour l’un comme pour l’autre.

Puisqu’on ne peut pas ne pas les personnaliser, le premier cite représente Paul Kagame, le second Azarias Ruberwa. Et puisqu’on ne peut pas ne pas le dire, les deux sont des Tutsi et, à ce titre, peuvent partager la même aspiration d’exercer les fonctions de président de la République. Si Paul l’est déjà, Azarias n’est pas interdit de l’être.

Seulement voilà : même si les deux ont a développer le même parcours en éliminant « à la Mingusti », les présidents non Tutsi (Pasteur Bizimungu pour la République du Rwanda et successivement Ernest Wamba dia Wamba, Emile Ilunga et Adolphe Onosumba pour le Rcd), les deux n’ont pas les mêmes atouts.

Paul Kagame, par exemple, est déjà chef de l’Etat. Il dispose d’un Fpr qui fonctionne à la manière d’un Parti-Etat avec un seul président de la République, un seul Parlement, un seul Gouvernement, un seul « Cours et Tribunaux »~, une seule Administration publique dont une seule Armée, une seule Police, un seul Service de sécurité, mais aussi une seule Classe politique et une seule Société civile qui, même sans obéir à l’oeil et au doigt, n’en coopèrent pas moins avec le « guide » de Kigali. Leur survie en dépend.

C’est ce qui lui a permis de réaliser ce fabuleux score mobutien de 95,5%. Azarias Ruberwa, lui, est vice-président de la République. Il dispose d’un Rcd qui fonctionne également à la manière d’un Parti-Etat, mais un Rcd qui a affaire avec des composantes, des entités, des non-composantes et non-entités qui ne jouent pas toutes son jeu.

Déjà, ces structures entendent voir ce que l’ex-Goma fera, maintenant que Paul Kagame est réelu. Car si le mouvement de Ruberwa continue de compliquer la Transition comme il le fait jusque-là avec sa politique de surenchère (notamment sur l’Armée), l’opinion n’y verra que l’ombre de l’homme décidément fort du Rwanda. Et même s’il agit en autonomie, on soupçonnera celle-ci d’inspiration rwandaise, contrôlée à distance... Moralité : la victoire de Kagame dérange sérieusement le Rcd.

Le Rwanda devra s’occuper du Rwanda, le Congo du Congo

Normalement, cela doit cesser d’être le cas. Dans la mesure où, ce Paul Kagame élu président de la République est condamné désormais à ne s’occuper que des siens. Le discours sur la sécurisation du Rwanda ayant cessé de prendre, c’est maintenant au discours sur le développement de produire des actes pouvant lui garantir la réélection.

L’essentiel des exportations rwandaises est constitué de café et de thé. C’est sur ce terrain-là, et non sur celui de l’or ou du coltan, que sera jugé son mandat.

En faisant passer le mandat de la Monuc du chapitre VI au chapitre VII, et en s’impliquant sérieusement dans la pacification de l’Ituri après avoir imposé sa « paix », sur tout le reste du Congo, la Communauté internationale (lisez l’Occident) qui va certainement cautionner le processus électoral rwandais agit de façon à mettre un terme à toute confusion. Le Rwanda devra s’occuper du Rwanda, le Congo du Congo quitte à l’Onu à régler définitivement avec le concours de l’Union africaine la question des Interahamwe et ex-Far.

C’est pour dire que le Rcd est convie à une sorte de sevrage vis-à-vis du Fpr. Il y a, en cette matière, le précédent libérien avec Charles Taylor.

Voilà un ex-rebelle devenu chef de l’Etat puis élu comme tel, mais en commettant l’erreur de se comporter en marginal, en s’en allant, insécuriser la Sierra Leone voisine. Pourtant toléré pour ne pas dire parrainé par les Etats-Unis, bénéficiant du soutien français via la Côte d’Ivoire d’Houphoët Boigny et de Konan Bédié, Taylor est devenu encombrant en raison des crimes qu’il n’a cessé de faire corn mettre. Et, il a été lâché non pour ceux perpétrés au Liberia, mais plutôt en Sierra Leone.

Il est évident que sa défenestration décidée par Washington avec la bénédiction de Paris et Londres écrase le mouvement rebelle léonais dont il se servait pour un leadership pour le moins utopique.

Paul Kagame doit avoir reçu et compris le message. Puisse le Rcd le saisir, lui aussi.

Des chiffres semant le doute...

Avec ses 7.500.000 habitants en 1987 dont 1 million ont disparu pour cause de génocide en 1994, comment le Rwanda a-t-il pu aligner 10 ans plus tard 4.000.000 d’électeurs pour une population ne pouvant pas dépasser 10 millions d’âmes ? Avec en plus les Tutsi représentant-15 % et les Hutu représentant+ de 85 % de la population rwandaise, par quel miracle Paul Kagame-le-tutsi est-il parvenu à emporter 95,5 % des suffrages exprimés contre 3,62 % à Faustin Twagiramungu-le-hutu, même si le vote ethno-tribal a vivement été découragé. Un tel exploit ne peut être que l’expression d’un terrorisme d’Etat très subtil...

Les présidentielles qui se sont déroulées au Rwanda se sont caractérisées par deux faits contrastants. Le premier au niveau des chiffres le second à celui de la sécurisation des opérations.

Les Rwandais auront réalisé les élections les plus calmes qui se soient déroulées en Afrique au cours de ces dix dernières années : pas un seul coup de fusil tire, pas un blessé, et surtout pas de décès, abstraction faite de l’arrestation de 12 observateurs provinciaux de Faustin Twagiramungu accusés par la police de tentative de troubler le vote.

>Le mérite de Paul Kagame à cet effet et indéniable. Le bémol survient toutefois avec le chiffrage. D’abord en ce qui concerne les votants. Ils sont 4 millions. Si l’on part du principe généralement admis établissant que la masse électorale représente le tiers de la population, cela revient à dire que le Rwanda doit avoir aujourd’hui prés de 12 millions d’habitants!

Or, cela n’est pas le cas. Le Petit Larousse 1987 évalue sa population à 7.500.000 âmes. Sept ans plus tard, est survenu le génocide dont le bilan chiffré est d’un million de morts, en majorité adultes.

Qu’en 15 ans l’on soit passé de 7.500.000 à près de 12.000.000 avec le « trou » de 1 million tués froidement en 1994, voilà des chiffres de nature à semer le doute! Et, par effet d’entraînement, de jeter également le doute sur le vrai nombre de victimes du génocide.

A ce propos, toujours en partant de l’évaluation de 1987, la communauté tutsi avec ses —15% devrait comprendre 1.125.000 âmes, tandis que la communauté hutu avec ses +85% près de 6.375.000 âmes. Sept ans plus tard, avec le génocide ayant frappé plus les Tutsi que les Hutu, la communauté tutsi a dû être durement frappée au point où elle ne peut raisonnablement représenter plus de 2.000.000 d’âmes!

De toutes évidences, en appliquant la même base « -15 % et + 85 % », sur les 4.000.000 votants, les évaluations donnent 600.000 Tutsi pour 3.400.000 Hutu ! Dans la même logique, les 95.% des Rwandais à savoir donné leur voix à Paul Kagame représentent 3.800.000 votants contre à peine 120.000 favorables à Faustin Twagiramungu...

Même si l’on admet pour impensable qu’un seul des 600.000 Tutsi ait voté pour Faustin Twagiramungu, on ne peut que mal concevoir que 120.000 Hutu seulement sur les 3.800.000 Hutu votants se soient prononcés pour leur « frère ». Cela donne 1 hutu pour Faustin pour 30 hutu pour Paul!

Même si le vote ethno-tribal a été ouvertement stigmatisé, ce « partage » est des plus surprenants.

Par ailleurs, le score genre « 95% » n’est pas pour rendre heureux le gagnant, surtout après la perestroïka.

A l’analyse de tous ces chiffres, la première déduction facile à tirer est l‘existence, au Rwanda, d’un terrorisme d’Etat extrêmement subtil. Celui qui maintient dans la peur la population hutu; encore consciente de la présence de la lourde machine répressive que représente le FPR.

Cette population a probablement refusé de prendre le risque d’un vote favorable à un Faustin Twagiramungu qui, à tous points de vue, n’a aucun instrument de réplique face à Paul Kagame. Il n’a ni parti politique il n’a aucune emprise sur l‘Armée, la Police ou la Sécurité, aucune non plus sur le Parlement, le Gouvernement, les Cours et Tribunaux.

Ainsi, les Rwandais majoritaires ont choisi la voie de la sagesse : celle de voter chacun pour sa propre sécurité...

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