Send an Instant Message "GAHIRE Pierre" <gahirep@yahoo.fr>
CC: "John Philpot" <jphilpot@alarie-legault.qc.ca>, "Robin Philpot" <rphilpot@sympatico.ca>, "Phil Taylor" <bruin56@hotmail.com>, Democracy_Human_Rights@yahoogroupes.fr
De: "Christiaan DE BEULE" <christiaan.debeule@skynet.be> Ajouter au carnet d'adressesAjouter au carnet d'adresses
Date: Wed, 2 Mar 2005 21:17:35 +0100
Objet: Re: [DHR] RWANDA: ACTE D'ACCUSATION CONTRE LE GÉ NÉRAL ROMÉO DALLAIRE



LES IMPLICATIONS DU GÉNÉRAL ROMÉO DALLAIRE DANS LE DRAME RWANDAIS
 LA MISSION DE LA MINUAR

Le Général Roméo Dallaire a failli à sa mission de paix devant favoriser la mise en œuvre de l'Accord de paix signé entre le Gouvernement rwandais et le FPR : Il est le principal responsable du drame rwandais.

Les responsabilités du Général Dallaire dans l’hécatombe du peuple rwandais découlent de ses actes et de ses omissions.
Au lieu de s'attacher à sa mission de commandant de la force internationale neutre telle que définie et consigné dans les accords d'Arusha, le Général Dallaire a pris fait et cause pour le FPR en vue de le porter au pouvoir, tout en foulant aux pieds son devoir de neutralité. Il aurait pu décourager ou contraindre Paul Kagame et ses hommes à fléchir et à s'engager dans la logique de paix. A défaut de le faire fléchir dans ses visées belliqueuses, il aurait dû sonner l'alarme à l'intention de ceux qui l’avaient envoyé assumer une mission de paix en vue de la matérialisation des accords d'Arusha. C'est l'inverse qui s'est produit. Fort de sa complicité, le FPR est resté insensible à tous les appels et a rejeté toute solution de compromis qui aurait permis pourtant de stopper le " cataclysme " qu'il avait intentionnellement enclenché.

La guerre fut l’option de certains pays membres de l’ONU. Le Commandant de la Mission au Rwanda, le Général Roméo Dallaire, ne l’a jamais caché ni dans ses écrits ni dans ses déclarations. L’accusation formulée à son endroit par son supérieur hiérarchique Monsieur Jacques Roger Booh-Booh, Représentant Spécial du Secrétaire Général de l’ONU, est accablante: " Dallaire n’a pas joué son rôle", a-t-il déclaré à la journaliste Collette Braeckman.

1.1 Quelle était la mission des Forces de l'ONU au Rwanda ?

La mission de la MINUAR est définie d'une façon globale par les textes juridiques des Nations Unies en matière de prévention de génocide et de crimes contre l’humanité et, d’une façon particulière, par la Résolution 872 du 5 octobre 1993, portant sa création. Elle a été explicitée par le protocole de consignation des armes signé entre le Gouvernement rwandais, le FPR et le Commandant de la force des Nations Unies au Rwanda (MINUAR).
L’obligation d’empêcher le génocide découle concrètement de :
1. La convention sur le génocide ;
2. Les instruments de droit international humanitaire ;
3. Les instruments protecteurs des droits de l’homme ;
4. Le droit des Nations Unies :


1. Le mandat conféré à la MINUAR par la résolution 872 du Conseil de sécurité ;

ii) Les règles d'engagement de la MINUAR ;
iii) Certains rapports du Secrétaire général ;

Sur base des textes fondamentaux des Nations Unies, le Professeur belge Eric David a conclu à l’obligation fondamentale des Nations Unies de veiller au respect des droits de la personne humaine.

1.2 Le droit des Nations Unies.
Le droit des Nations Unies. met l’accent, tant de manière générale que de manière spécifique au Rwanda, sur l’obligation des États de coopérer entre eux pour assurer le respect des droits de l’homme. Ainsi, l’article l, § 3, de la Charte énonce parmi les buts des Nations Unies celui de "Réaliser la coopération internationale en résolvant les problèmes internationaux d'ordre [...] humanitaire, en développant et en encourageant le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion."
Dans un sens analogue, l’article 55 de la Charte prévoit que: "[...] les Nations unies favoriseront: [... ] c) le respect universel et effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion."
La doctrine a souligné que cette disposition répondait à la volonté exprimée à Dumbarton Oaks de conférer à la future Organisation "l’obligation de promouvoir le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales." Le fait que l’article parle de, "respect universel et effectif" signifie qu’on a voulu marquer ainsi qu’il ne s’agissait pas simplement d’un vague respect formel mais d’une réelle observance des droits de l’homme.
La disposition implique que l’O.N.U. "doit mener et développer une action positive, concrète ‘en faveur’ des droits de l'homme", et même s’il s’agit d'une obligation énoncée sur un mode général, il demeure qu'une obligation générale n'en est pas moins une obligation!
Si l’article 55 concerne directement l’O.N.U., l’article 56 s’applique aux États. Il dispose:
"Les membres s’engagent, en vue d’atteindre les buts énoncés à l’article 55, à agir tant conjointement que séparément en coopération avec l’Organisation." Ainsi qu’on l’a écrit, il s’agit ‘d’un engagement de caractère général des États en vue de réaliser les buts énoncés à l'article 55’ " Il implique en tout cas qu’au Rwanda les États ne devaient rien faire qui puisse entraver les fonctions attribuées à la MINUAR.

1.3 La responsabilité de l’ONU largement engagée.
Peut-on déduire de ces dispositions que l'O.N.U. devait agir pour empêcher les massacres? La réponse est fournie par l’O.N.U., elle-même à travers:
1. les termes du mandat conféré à la MINUAR par la résolution 872 du Conseil de sécurité ;
2. les règles d'engagement décidées par l'O.N.U. ;
3. le protocole de consignation des armes ;
4. l’Accord de siège du 5 novembre 1993.

1.3.1 Le mandat conféré à la MINUAR par la résolution 872 du Conseil de sécurité
Sur les huit tâches confiées à la MINUAR par la Résolution 872 du Conseil de sécurité, trois consistaient à " contribuer à ", " superviser " et " contrôler " la sécurité à Kigali, au Rwanda en général ; et à propos des réfugiés et déplacés en particulier (supra § 2, 5 octobre 1993). Contribuer à la sécurité d'une population n’implique nullement qu’on puisse rester passif lorsqu'elle se fait massacrer.

Comme on peut le constater, contrairement à ce qui a souvent été avancé, le texte même du mandat conféré à la MINUAR non seulement lui permettait, mais même l’obligeait d’agir afin d’empêcher les massacres.

1.3.2 Les règles d’engagement de la MINUAR
La formulation des règles d’engagement de la MINUAR confirme qu’elle devait agir pour empêcher les massacres. On lit en effet aux § 15-17 des règles d’engagement établies par l’O.N.U, que la MINUAR peut être amenée à intervenir non seulement "pour le maintien de la loi et de l’ordre ", mais aussi, " pour empêcher tout crime contre l'humanité"
Les "Criminal Acts" se définissent comme suit:
"The recent history of Rwanda is burdened with civil war, dislocation of large elements of the population, terrorist, ethnic and political violence, armed banditry and virtual economic collapse. The potential for a dramatic rise in armed banditry during the UNAMIR mandate, due to the rapid demobilization of approximately 35 000 military personnel, high unemployment, overpopulation and mass desertion from the army is very high.

For the most part, the maintenance of law and order, and therefore responding to control criminal activity is the responsibility of the local police, monitored by the UNAMIR UN Civilian Police (UNCIVPOL) monitors. However, during the period of demobilization, the ability of the local police may be severely taxed. As a very real possibility, UNAMIR military personnel may be required to assist UNCIVPOL and local authorities in maintaining law and order. In these circumstances, these RoE would be used in support of local authorities and UNCIVPOL. In these circumstances, military personnel or units would be placed in support of UNCIVPOL, who would act to support local police in the maintenance of law and order."

Les "Crimes against humanity" se définissent comme suit:
"There may be ethnically or politically motivated criminal acts committed during this mandate which will morally and legally require UNAMIR to use all available means to halt them. Examples are executions, attacks of displaced persons or refugees, ethnic riots, attacks on demobilized soldiers, etc. During such occasions, UNAMIR military personnel will follow the RoE outlined in this directive, in support of UNCIVPOL and local authorities or in their absence, UNAMIR will take the necessary action to prevent any crime against humanity."

1.3.3 L’Accord de Siège du 5 novembre 1993
L’obligation de la MINUAR d’intervenir pour empêcher des violations du droit international humanitaire ressort encore du fait que l’Accord de siège O.N.U.-Rwanda du 5 novembre 1993 prévoyait l’application des conventions de Genève et leurs protocoles additionnels dans leurs relations mutuelles et que, comme on l’a vu (supra § 2), selon l’article commun aux quatre conventions de Genève et l’article 1er, § 1er du 1er protocole additionnel, les parties à ces instruments " s’engagent à respecter et à faire respecter ces instruments en toutes circonstances." En vertu de ce texte, la MINUAR était donc tenue d’agir pour empêcher les violations du droit international humanitaire qui se commettaient au Rwanda ; que ce fût au préjudice de ses propres soldats ou au préjudice de la population rwandaise.

De manière générale, la Force de l'ONU (MINUAR) avait pour mission :
* Assurer la mise en place saine et paisible d'un gouvernement de Transition à Base élargie au Rwanda ;
* Assurer la sécurité de la communauté des expatriés résidant à Kigali et de toute la population résidant à Kigali ;
* Contrôler le mouvement et l'emploi des éléments militaires des FGR (Forces du Gouvernement Rwandais) et du FPR (Front Patriotique Rwandais) et autres éléments armés se trouvant à Kigali et ses environs.

1.3.4 Le protocole de consignation des armes.
Les responsabilités découlant de ce protocole s’apprécient comme suit :

* Le commandant du Secteur Kigali est responsable de la mise en place de la zone de consignation des armes de Kigali en collaboration avec la Gendarmerie nationale et la police locale.
* Les bataillons d'infanterie et les observateurs militaires des Nations Unies déployés à Kigali fourniront le personnel et assureront le contrôle de la zone de consignation d’armes.

Dans ces conditions, un observateur objectif est amené à la conclusion suivante : d’après les dispositions internationales qui régissent l’ONU et les États membres en général ainsi que les règles d’engagements, la mission de la MINUAR était beaucoup plus étendue qu’on ne semble vouloir l’admettre. Les défaillances de la MINUAR, de l’ONU et des Etats membres ont été prises en compte lors de la mise en place du TPIR. Manifestement, les fondateurs de cette Juridiction ad hoc ont tout fait pour exonérer les fonctionnaires onusiens et cibler certains rwandais pris comme des boucs émissaires devant répondre de leurs propres manquements.
Le dossier préparé par le Professeur Eric David pour la Commission du Sénat de Belgique est très édifiant sur les devoirs et les manquements des uns et des autres.



LES MANQUEMENTS DU GÉNÉRAL ROMÉO DALLAIRE

2.1 Violation délibérée des Accords de paix d’Arusha
Roméo Dallaire s’est rendu coupable de complicité dans la reprise de la guerre par la rétention volontaire et intentionnelle d’information. Il a noué des amitiés avec Paul Kagame qui l’ont amené à sacrifier sa mission. Ces liens sentimentaux, voire passionnels, lui ont fait perdre l’essentiel de sa mission : la neutralité.

Ils ont permis l’introduction des armes dans la zone démilitarisée de Kigali et suite au laxisme dans les contrôles, le FPR a pu infiltrer dans la Capitale plus de 10.000 hommes.

Par ses accusations en miroir, Roméo Dallaire accusa le régime Habyarimana et les forces gouvernementales de bloquer la mise en place des accords de paix, de préparation à la guerre par la distribution et les stockages d’armes ainsi que les entraînements des milices. Il rapportait ce que disait le FPR sans se soucier de voir ce qu’il fait. Quand il le savait, il fermait les yeux. C’est le cas notamment pour l’entreposage des missiles dans le CND qui étaient pourtant signalés par une personnalité de très haute crédibilité, le Colonel Cussac, attaché militaire de l’ambassade de France. Dallaire négligea cette information mais prit avec tout le sérieux les bobards du fameux Jean Pierre Turatsinze. Roméo Dallaire attribua toute la préparation du drame aux FAR, au Président Habyarimana et à son parti. L’histoire fera la démonstration que les préparatifs étaient dans le camp du FPR et que le Général Roméo Dallaire en avait la connaissance indiscutable.

Dallaire n’a pas informé les décideurs sur l’évolution de la situation ; il a mal informé pour ne pas dire qu’il a tout simplement menti à ses patrons de New York.

Pour s’en convaincre, il suffit d’analyser la situation telle qu’elle était perçue et les décisions qui ont été prises à New York pendant la période cruciale de la crise rwandaise.

Bien avant la désignation de Roméo Dallaire l’avenir de la mission avait été hypothéqué comme l’écrit Madame Albright, ancien Secrétaire d’Etat sous l’Administration Clington, dans son livre : "Unlike the UN force in Somalia, this was designed as a traditional mission, dependent on the willingness of the Hutus and Tutsis to abide by their agreement. A force of 2,500 was authorized, under the command of Brigadier General Roméo Dallaire of Canada, and told not to take sides or engage in fighting". La suite des événements a prouvé que la réussite de la mission ne dépendait pas de la volonté des Hutu et des Tutsi de se soumettre à leurs engagements mais bien de l’engagement de Roméo Dallaire en faveur d’une partie au conflit.

Dès lors que Roméo Dallaire avait pris fait et cause pour le FPR et s’était engagé à ses côtés pour lui faciliter la prise du pouvoir par la force, le FPR n’avait plus d’intérêt à respecter les Accords d’Arusha.

Dans son livre "Shake Hands with the Devil", Roméo Dallaire confirme sa préférence pour une partie au détriment d’une autre qualifiée "d’extrémiste". Selon lui, ce terme signifie "Believers in Hutu Power, not prepared to bring refugees home, and unwilling to share power in a multi-ethnic, multi-party democracy respecting human rights. Predominantly MRND and CDR, but present in all parties other than the RPF."

Le Général Roméo Dallaire a toujours été informé par la mission de l’ONU stationnée à Kabale et placée sous son autorité qu’il y avait des approvisionnements militaires du FPR en provenance de l’Uganda ; mais il n’en a jamais informé New York. Dans son livre, il confirme les approvisionnements massifs en hommes et en matériel en provenance de l’Uganda sur base des rapports de la MUNUOR : "(a)There was increased activity on the RPF side as well. On February 28, I took one of the Belgian helicopters for an aerial reconnaissance of the RPF zone. As I flew over the green hills-sometimes low enough that I came eye to eye with startled RPF soldiers. I saw large concentrations of troops being trained, as well as evidence of defensive positions being dug on the northwest border of the demilitarized zone, near the presidential stronghold of Ruhengeri. In the middle of the zone, where it narrowed to less than a kilometer near Yuma, I spotted soldiers swarming around the rich sienna of freshly turned mounds of earth; they were like giant anthills bracketing the city on both flanks. It looked like Kagame was realigning his forces, pushing for a good secure start line from which he could launch an offensive. (b) The next day, I received a report from the new commander of the UNOMUR Sector, Colonel Azure Hague, confirming that shipments of weapons and ammunition were going from the NRA to the RPF. At the same time, Claeys’s intelligence team reported that Ugandan army officers had held meetings about supporting an RPF offensive to be launched at either Byumba or Ruhengeri."

Lors des cérémonies du 10e Anniversaire du génocide à Kigali, le Président Museveni s’en est vanté en ces termes : "I hear people saying that they stood aloof when this genocide was happening. Uganda did not stand aloof when this genocide was happening. We stood with RPF and RPF is the one that eventually saved the people it saved. (applause). Of course, we were under threat. Uganda was under threat. We were being investigated. The UN was investigating us. They were in Kabale, UNAMIR, to see whether anything is coming from Uganda to help the people of Rwanda to fight. They were watching me, not the genocidaires. But I managed to pass through.(applause). You all know the story. So, Uganda does not plead guilty to the charge of standing aloof. Those who had the power, who are confusing the world should be the ones to plead guilty to this charge: a terrible crime which happened here."

Cette confession faite publiquement par un chef d’état, se vantant d’avoir su contourner la surveillance de la mission des Nations Unies, qu’était la MINUAR et, d’avoir maintenu son soutien militaire au FPR durant le conflit qui l’opposait au gouvernement rwandais ne laisse pas de doute quant à l’internationalité du conflit.

Le Général Roméo Dallaire n’informera jamais New York que le FPR a introduit des missiles dans son cantonnement à Kigali, ce qui constituait une menace sérieuse à la paix recherchée. En effet l’information avait été transmise à la MINUAR par le Colonel Cussac, chef de la mission militaire française. Roméo Dallaire savait sans doute à quoi serviraient ces missiles et il savait que cet usage mettrait en péril la mission et l’avenir de la paix au Rwanda. Sûrement que si New York avait été informé de ces visées belliqueuses du FPR, les décideurs à New York auraient réagi autrement. Cette attitude de la part du Général Roméo Dallaire ne peut s’interpréter autrement qu’une complicité dans l’attentat contre le Président Habyarimana.

Pour masquer la préparation du coup de force par le FPR, le Général Dallaire envoya à ses chefs à New York, le fameux fax du 11 janvier 1994 dans lequel il parlait de tout sauf des actes que le FPR préparait à commettre y compris l’assassinat du Président Habyarimana. Le Général Dallaire concocta avec les politiciens alliés du FPR le plan machiavélique consistant à simuler les plans de catastrophe et à les imputer aux forces gouvernementales et au Parti MRND. En effet les recherches menées par les équipes de la Défense auprès des Nations Unies au sujet de ce fameux fax du 11 janvier 1994 et les documents déposés par Roméo Dallaire lors de son contre-interrogatoire dans le procès Bagosora et alii ont permis de démasquer les manœuvres qui ont permis à Roméo Dallaire et ses complices de réussir leur funeste manipulation.

Aujourd’hui il n’est plus sérieux de se fier sur les manœuvres de manipulation de Twagiramungu, considéré comme le VVIP ou PM(D). Elles ont subi un sérieux coup en décembre 1994, lorsque l’ancien Ministre de la Justice Alphonse Louis Marie Nkubito, devant les membres de la Commission rogatoire belge, révéla certaines des manœuvres de Faustin Twagiramungu et ses allies de l’opposition.

Alphonse Marie Nkubito a expliqué les circonstances dans lesquelles a été écrite la fameuse lettre du 3 décembre 1993 que des "officiers modérés" de l’armée rwandaise ont adressée au Général Dallaire au sujet du plan machiavélique. Cette lettre visait à l’informer du plan d’extermination des Tutsi, plan conçu par le Président Habyarimana et ses hommes. Il sera découvert par la suite, lors du procès Bagosora et alii que ce document n’était autre qu’une manœuvre de manipulation conçue par les politiciens qui cherchaient à pousser la MINUAR à réagir. Malgré cette révélation, ce document continue à être exhibé par les défenseurs de la thèse du génocide planifié, comme l’une des preuves irréfutables de la préméditation des massacres d’avril-juillet 1994, au Rwanda.

C’est également dans ce cadre que des caches d’armes imaginaires et des entraînements des milices furent inventés. Déjà au mois de janvier 1994, Jacques Bihozagara discutait avec la MINUAR de l’éventualité pour l’ONU d’intervenir pour écarter le Président Habyarimana et le remplacer par le Président de la Cour Constitutionnelle, Joseph Kavaruganda : "Cette réflexion s’impose à lui car, depuis la signature des accords d’Arusha, le président Habyarimana ne cesse de diviser les partis de l’opposition, ce qui le place en position d’arbitre incontournable. Concernant la sécurité des Tutsis, le message est on ne peut plus clair : en cas de crimes dont ils seraient victimes, le FPR n’hésiterait pas à réagir violemment. Or, le pourrissement de la situation actuelle porte en lui les germes de ce scénario. Aussi plaide-t-il pour un engagement plus volontariste de la Minuar, suggérant même que l’Onu impose le remplacement du président de la République par le président de la Cour constitutionnelle, M. Joseph Kavaruganda, afin de sortir de l’imbroglio politique que nous connaissons.

Cette suggestion rappelle curieusement la stratégie du FPR pour la prise totale du pouvoir en se servant des Accords d’Arusha comme tremplin pour éloigner par la violence s’il le faut le Président Habyarimana et tout son entourage huit mois après la signature des accords de paix. Le FPR estimait que la voie des élections définie par les accords de paix ne pourrait en aucun cas satisfaire ses ambitions de prendre le pouvoir et de l’exercer seul sans partage.

Dans son livre, "Madame Secretary", Madeleine Albright écrit: "On February 23, Dallaire warned UN headquarters that Hutu militias were preparing for massive violence. A representative of the UN High Commissioner for refugees also raised concerns." Pourquoi n’a-t-elle jamais parlé des préparatifs du FPR qui avaient un caractère offensif et constituaient une menace réelle à la paix au Rwanda et dans la région?

Le projet d’attentat contre le Président Habyarimana était un acte terroriste dont il était difficile de prévoir les conséquences dans toutes ses dimensions. Quand il fut commis, le Rwanda s’est embrasé et les flammes ont connu des extensions dont la région souffre encore actuellement. Comment peut-on donc exonérer Roméo Dallaire de cette responsabilité criminelle personnelle ?

Dans le même livre, Madame Madeleine Albright écrit: "On March 24, I began a two-week trip to Europe, Africa, the Balkans, and South America. While I was away, my deputy, Ambassador Edward Walker, met with the incoming Security Council president to discuss the council's April agenda. No fewer than a dozen topics were reviewed, including four dealing with Africa. Rwanda didn't make the list"

……………………………

It would be weeks before most of us understood the nature and scale of the violence. At the beginning we saw only that the Rwandan president had been killed and that Hutu security forces were launching a coup against civilian authority", ……"Many Western embassies had been evacuated, including our own, so official reporting was curtailed. Dallaire was making dire reports to UN Headquarters, but the oral summaries provided to the Security Council lacked detail and failed to convey the full dimensions of the disaster. As a result, the council hoped unrealistically that each new day would bring a cease-fire"……. There was also confusion about who was to blame. The French, historically favourable to the Hutus, supposed initially that Tutsi extremists had shot down the president's plane to provoke Hutu attacks and justify Tutsi counterassaults. American analysts unhelpfully narrowed the culprits to radical Hutus, moderate Hutus, and Tutsis - just about everybody. Meanwhile, those actually directing the killing put forward a steady stream of lies about what they were doing and why."

Ainsi donc, il y a lieu de conclure que les décideurs du monde à New York et Washington étaient mal informés ou pas informés du tout. Comme le dit encore l’ancien Ambassadeur des Etats Unis aux Nations Unies, Madame Madeleine Albright, "Many Western embassies had been evacuated, including our own, so official reporting was curtailed. Dallaire was making dire reports to UN Headquarters, but the oral summaries provided to the Security Council lacked detail and failed to convey the full dimensions of the disaster."

Il semble que les informations transmises par Roméo Dallaire manquaient cruellement de précisions qui auraient permis une bonne appréciation de la situation. Deux exemples pour illustrer ce point de vue : (a) la mise en place du Gouvernement intérimaire et ses efforts et (b) les efforts déployés par les FAR pour amener le FPR à la table de négociations. Ces efforts de la partie gouvernementale n’ont pas été pris en considération pour recevoir l’encouragement qu’il fallait. Ces quelques message que nous avons pu réunir prouvent à suffisance que Roméo Dallaire ne s’est pas soucié de faire la paix. Ainsi par exemple, dans son message 091200B April 1994, il a informé New York de la mise en place du gouvernement intérimaire en ces termes : "political activities: a new government has been formed. the national radio of rwanda broadcast the speech of the current president of rwanda, mr theodoi, the former president of cnd. he announced the name of the members of the interim government of rwanda."

Un rapport aussi sommaire sur un événement de cette importance ne rend pas compte de la situation exacte. Un gouvernement vient d’être mis en place ; quel est son programme d’action ? Quel est son message à la population rwandaise et à la Communauté internationale ? Le Général Dallaire n’en dit rien, probablement, pour saboter ce gouvernement qu’il qualifiait de "gouvernement autoproclamé" et "composé d’extrémistes Hutu". Visiblement, le Général Dallaire avait pris l’option de combattre ce gouvernement malgré ses appels d’apaisement en direction du FPR et la ferme volonté de mettre tout en œuvre pour arrêter les violences et trouver une solution négociée avec le FPR, en passant par la médiation de la Communauté internationale, représentée par la MINUAR.

Toujours dans son livre, Madame Madeleine Albright écrit : "As I listened to the informal debate led by Nigerian Permanent Representative Ibrahim Gambari, I became increasingly convinced we were on the wrong side of the issue. I asked my deputy to take my seat and went to one of the phone booths in the hall. Even though my instructions came from the State Department, I thought I might be able to get faster action from the NSC, which on peacekeeping played a critical coordinating role and where Tony Lake's knowledge of Africa was crucial. Speaking to one of his top aides, I described what was going on in the council and reported that the American position was being viewed as obstructionist. I first asked for more flexible instructions, then yelled into the phone, demanding them. I was told to calm down. The NSC would look again at what to do……: "On April 20, I met with the Secretary General, who described his dilemma. African members of the council wanted UNAMIR to be reinforced. The Belgians wanted a full UN pullout to cover their own withdrawal. African leaders were trying to arrange peace talks. If a cease-fire were reached, troops would be needed to monitor it. The decision on Rwanda would be critical to the image of the UN, so Boutros-Ghali wanted the UN mission to remain".

Les autorités américaines ont proféré des menaces contre les forces gouvernementales et contre le gouvernement intérimaire nouvellement installé tel que cela ressort du document du Département d’Etat daté du 11 avril 94. Il était question de retirer les forces de la MINUAR jusqu’à ce que la paix soit rétablie. Le Document déclassifié No 3 stipule que "the ‘UN will likely withdraw all forces’; and the US will not get involved ‘until peace is restored’ ". Cette position correspond parfaitement à la volonté du FPR de faire partir toutes les troupes étrangères stationnées au Rwanda.

Dans sa déclaration du 9 avril 1994, Paul Kagame avait lancé un ultimatum à toutes les forces étrangères en leur donnant 48 heures pour quitter le pays et lui laisser la place pour rétablir la paix tout seul. C’est le soutien à cette menace proférée par Paul Kagame qui explique la position incompréhensible du Gouvernement américain, car le retrait de la MINUAR rendait impossible toute chance de retour à la paix. Le conflit venait d’opposer les deux belligérants pendant plus de trois ans.

Pendant que la situation se détériore, les Etats Unis décident de retirer sans discussion les forces de la MINUAR. C’est ce qui ressort du Document déclassifié No4 des "US National Archives unclassified documents". On se rappellera que cette décision des Etats-Unis a été entérinée par le Conseil de Sécurité le 21 avril 1994 ; une grave erreur que Madame Madeleine Albright regrettera encore longtemps en ces termes :

"Like others, I had become both defensive and cautious about UN peacekeeping in general and didn’t see any practical way for the UN to restore order in Rwanda at this point. Mindful of my conversations with the parents of Americans killed in Somalia, I worried that more of the lightly armed UN peacekeepers might be victimized. At the same time, I agreed with my Security Council colleagues that the UN should not withdraw completely. As I listened to the informal debate led by Nigerian Permanent Representative Ibrahim Gambari I became increasingly convinced we were on the wrong side of the issue."

Bien que le déficit d’informations n’explique pas toute la politique de Washington et des Nations Unies au Rwanda, il y a une grande partie attribuable à la désinformation. On voit clairement que les décideurs n’ont pas eu les bonnes informations au bon moment. Les regrets que tout le monde est prêt à exprimer, comme beaucoup l’ont déjà fait du reste, ne suppriment pas les responsabilités qu’il faut situer à leur vrai niveau.

Ainsi par exemple le message câblé que le Général Dallaire a envoyé à son ami et compatriote le Général Maurice Baril, le 7 avril 1994, montre combien Roméo Dallaire faisait sien la cause du FPR. Il est clair que Dallaire tenait à cacher les détails de ce qui se passait alors qu’il avait toutes les informations:

1. Les causes de la chute de l’avion : les soldats stationnés au tour de côntrole avaient observé les missiles touchant l’avion. Dallaire ne peut pas prétendre que cette information ne lui était pas parvenue alors qu’elle avait été transmise selon la chaîne de commandement, comme l’atteste le témoignage de Gerlache Matthieu devant la Gendarmerie de Bruxelles.

2. Au lieu de passer la vraie information, les chefs militaires de la MINUAR ont inventé une explosion du dépôt des munitions, chose invraisemblable pour des professionnels de leurs rangs;

3. Alors qu’il suivit le déroulement de toutes les discussions dès les premières minutes après la chute de l’avion et que les FAR ne lui ont caché aucune information en leur possession, Dallaire ment sur sa connaissance des victimes de l’attentat.

4. Alors qu’il est tout à fait au courant des mouvements des troupes du FPR, Dallaire continue à demander aux FAR de rester dans leurs casernes comme s’il voulait les faire prendre comme des poules dans leurs poulaillers. Nous savons que des ordres ont été donnés aux soldats de la MINUAR près de l’aéroport, de laisser passer les troupes du FPR qui étaient sortis de leur campement et faisaient mouvement vers le camp militaire des FAR à Kanombe.

5. Dans toute la correspondance envoyée à New York les jours qui ont suivi, Dallaire ne fera jamais état de l’ultimatum que le FPR a donné aux troupes étrangères. Pourtant, le service de renseignements militaires belges en a informé sa hiérarchie à Bruxelles le 9 avril 1994.

Pourquoi aucun rapprochement n’a-t-il été fait entre cet ultimatum et la décision du gouvernement belge de retirer son unité de la MINUAR et de faire pression sur le Conseil de Sécurité pour supprimer toute la MINUAR?

Finalement, il faut se demander qui a voulu qu’il y ait escalade de la violence. Avant de parler du plan machiavélique d’extermination des Tutsi, il fallait analyser les mobiles qui ont poussé Paul Kagame et Roméo Dallaire à agir et à se comporter comme ils l’ont fait.

2.2 Complicité de Roméo Dallaire dans l’assassinat du Président Habyarimana et la reprise de la guerre.

Le Général Roméo Dallaire s’est rendu coupable de complicité avec le FPR, bien avant sa reprise de la guerre après l’attentat du 6 avril 1994.

Le 2 avril 1994, Paul Kagame avait définitivement pris la décision de déclencher le cataclysme. Le Général Roméo Dallaire, Commandant en chef des forces onusiennes au Rwanda en a été informé et il l’a couvert. Il s’explique dans son livre en ces termes :

"Je devais absolument entrer en contact avec les chefs militaires des deux parties pour me faire une idée de la situation. Le samedi matin, le 2 avril, j’ai rencontré le Ministre de la Défense […] Je suis arrivé en lui débitant à toute allure la liste de ses omissions et de ses engagements non remplis […]

Après l’avoir quitté, j’ai pris un hélicoptère pour Mulindi pour rencontrer Kagame après le déjeuner. Il m’a paru distant et un peu renfermé lorsque je lui ai posé la même longue liste de questions épineuses. Il a réagi à peine, même lorsque je lui ai annoncé que j’avais reçu mes hélicoptères et que nous allions commencer nos opérations de reconnaissance de façon régulière au-dessus de tout le pays, y compris de sa zone d’opérations. Son attitude était un peu surprenante, étant donné qu’il s’ingéniait à garder le secret sur les mouvements des troupes du FPR et leurs capacités de frappe […]

Finalement, je lui ai demandé s’il avait des questions à me poser. Il a voulu savoir ce qui se passait relativement à la proposition concernant l’admission du CDR et du PDI. J’ai regardé son visage. Jamais, je ne l’avais jamais vu aussi sombre. Il a seulement ajouté que nous étions à la veille d’un cataclysme et qu’une fois enclenché, aucun moyen ne permettrait de le contrôler." [notre soulignement]

Paul Kagame, de commun accord avec Roméo Dallaire, a donné l’ordre d’abattre l’avion du Président Habyarimana en sachant qu’il déclenchait un cataclysme qu’aucune force ni personne n’allaient contrôler ni arrêter. Ce cataclysme, ce sont les massacres de millions de Rwandais (Hutu, Tutsi et Twa). Kagame et Dallaire sont donc les auteurs de ce cataclysme. Paul Kagame l’avait longuement préparé. Il l’a déclenché "au moment opportun et convenu", comme annoncé dans "L’environnement actuel et avenir de l’Organisation".

A son tour, alors qu’il a été averti personnellement et directement du déclenchement imminent d’un tel cataclysme, le Général Roméo Dallaire n’a pas alerté l’ONU. Plutôt que d’agir rapidement pour éviter l’irréparable, il a adhéré au plan de Kagame.

Par cette attitude, le Général Dallaire franchissait le Rubicon surtout que la veille, à l’instar du FPR, il avait rejeté la solution de compromis reprise dans la Déclaration du 28 mars 1994 faite par les diplomates occidentaux et le Représentant spécial du Secrétaire Général de l’ONU, pour sortir le pays de l’impasse et mettre en place les institutions de transition prévues par l’Accord de paix d’Arusha.

Paul Kagame et Roméo Dallaire n’ont pas accepté la teneur du § 3 de cette déclaration qui se lit comme suit: "Ils sont d’avis, après examen des dispositions pertinentes du protocole d’accord sur le partage du pouvoir, que tous les partis politiques agréés au Rwanda à la date de la signature de ce protocole et le FPR doivent être représentés à l’Assemblée nationale de transition dès sa mise en place, à condition qu’ils respectent l’accord de paix"

C’est clair, même le parti CDR combattu par le FPR et Roméo Dallaire ne devait pas être exclu de cette Assemblée Nationale de Transition. Comme il l’a écrit dans son livre, Roméo Dallaire en fut révolté; il fut, comme le FPR, en désaccord avec les diplomates signataires de cette déclaration : "Le corps diplomatique de Kigali, dirigé conjointement par le Nonce apostolique et le RSSG, endossaient la proposition du Président, qui soutenait la présence au sein du GTBE de tous les partis qui avaient été reconnus à Arusha. Ils ont produit une déclaration conjointe signée aussi par des représentants du Zaïre, de l’Ouganda, du Burundi et de la Tanzanie – en fait par tous les pays de la région des Grands lacs. De main de maître, Habyarimana avait réussi à isoler le FPR, à en faire le seul parti entravant le succès politique. Le département des Affaires politiques (DAP) à New York, l’ONU et l’entière communauté politique et diplomatique sont tombés dans son piège. La communauté internationale tout entière a causé la mort d’Arusha le jour où ses membres, les diplomates, le RSSG des Nations Unies en tête, ont été dupes de la ruse du Président."

Face à ce silence complice qui lui a permis de réaliser son dessein criminel, Paul Kagame, comme s’il se moquait de tous ceux qui l’ont couvert, déclare aujourd’hui avec un cynisme digne d’un vrai terroriste : "Les Nations Unies savaient comment le génocide était planifié, bien avant la mort de Habyarimana et l’attentat contre l’avion….L’ONU savait tout cela : Les responsables du Département des opérations de maintien de la paix, les gens du bureau du Secrétaire Général, les membres du Conseil de Sécurité. En ayant ces informations ils auraient dû agir pour empêcher le génocide et pour empêcher la mort de Habyarimana."

2.3 En sa qualité de Commandant militaire de la MINUAR, le Général Roméo Dallaire a agressé le Gouvernement légal rwandais, aux côtés du FPR et de l’Armée Ugandaise.

Selon sa déposition dans l’Affaire Bagosora et alii, Dallaire est parti de New York avec une vision manichéenne de la situation qui prévalait au Rwanda. Pour lui les rwandais étaient classés: les modérés d’un coté et les extrémistes de l’autre. Son point de vue était que ceux qui n’étaient pas du coté du FPR étaient des extrémistes auxquels il ne fallait prêter aucune attention. Au contraire, il fallait exploiter leurs erreurs pour assurer au FPR l’accès au pouvoir.

Il l’a écrit en ces termes: "When I woke up the next morning……… I was convinced that we were on the verge of regaining the initiative or at least of throwing off the extremists off balance, making them vulnerable to defections, to panic, to making foolish mistakes". Roméo Dallaire a toujours travaillé selon cette logique destructrice. Il a combiné les efforts avec le FPR pour miner le système de l’intérieur et le démolir. Alors qu’il avait la mission de maintenir la paix, il a préféré provoquer et entretenir le chaos en vue de faire accéder le FPR au pouvoir. Il était au courrant de l’introduction des armes à partir de l’Ouganda mais n’a rien fait pour arrêter ces opérations. Dallaire a participé à l’étude des plans de manœuvres du FPR à l’hôtel Méridien. Comme le signale son supérieur hiérarchique, Monsieur Roger Booh-Booh, son objectif était d’abattre le régime Habyarimana.

Le commandement de la MINUAR a laissé les hommes du FPR porter la tenue des forces de l’ONU pour créer la confusion et faciliter les attaques des points sensibles et les infiltrations dans les secteurs et dans les rangs des FAR. Ainsi par exemple : "Le 8 avril vers 8 h, le Quartier Général avertit que des éléments du FPR portaient des casques bleus. Cette rumeur ne se vérifiera pas". Ils n’avaient pas besoin de vérifier puisque le Commandement le savait déjà pour l’avoir permis.

Directement après l’attentat contre l’avion présidentiel, les infiltrés FPR se trouvant dans la ville de Kigali se sont regroupés au cantonnement de la MINUAR sans aucun problème. "A 23 h, le QG secteur signale à OSCAR (opérateur transmissions) que tous les réfugiés de nationalité rwandaise doivent avoir quitté les cantonnements pour le lendemain à 6 h…A 6 signale que les pères de Franciscus (ATS) s’opposent à la décision de l’ONU".

Lors de son contre interrogatoire du 1er octobre 1997 dans l’Affaire Rutaganda, le Capitaine Luc Lemaire a reconnu qu’il y avait des gens armées dans son cantonnement.

Les munitions confisquées par le Général Dallaire n’ont pas été remises au ministère de la Défense. D’aucun estiment qu’elles furent données au FPR.

Dans son rapport confidentiel du 12 avril 1994, le Service Général de Renseignements belge rapporte que selon l’Ambassadeur François Ngarukiyintwali, le Ministère rwandais des Affaire Etrangères estimait que des "défaillances inexplicables" des Casques Bleus avaient "permis à des criminels d’abattre l’avion présidentiel". Il a aussi accusé des éléments de la la MINUAR de "participer activement aux opérations du FPR contre les positions de l’armée rwandaise" à Kigali et de fournir une assistance technique au FPR. La déclaration de l’Ambassadeur rwandais n’a jamais été démentie.

Dans son rapport confidentiel du 13 avril 1994, le Service Général de Renseignements belge rapporte ce qui suit : "Le FPR prétend avoir amené 2.400 hommes de troupes dans la capitale. Il déclare attendre que l’évacuation des étrangers soit terminée pour prendre le contrôle de la ville. Il a même déclaré qu’il pensait pouvoir atteindre cet objectif dans la journée de mercredi. Le Comd de l’UNAMIR, le Gén DALLAIRE, estimerait que les FAR n’ont aucune chance de l’emporter militairement sur le FPR."

On voit donc que, non seulement des belges de la MINUAR étaient activement engagés aux cotés du FPR, mais surtout le Général Dallaire souhaitait vivement que le FPR gagne et s’y employait bien activement. Il s’est particulièrement investi dans une stratégie qui devait amener le FPR et les modérés à conjuguer leur effort pour prendre les choses en mains après l’assassinat du Président.

Dans cet engagement pour créer le chaos, le Major Delporte va faire en sorte que les institutions clé ne puissent pas fonctionner après l’assassinat du Président. Le Procureur de la République à Kigali, François-Xavier Nsanzuwera, l’exprime en ces termes : "Le lendemain, très tôt le matin, j’ai appelé le major Delporte de la police civile de la MINUAR. Il m’a dit que la GP avait arrêté le président de la cour constitutionnelle et que la GP avait mis en place des barrages sur les routes. Il m’a dit de faire attention à moi.

En fait le major Delporte et moi-même travaillions sur le meurtre du Ministre Gatabazi Félicien commis en février 1994 et les enquêtes nous avaient démontré que c’étaient les éléments de la GP qui avaient assassiné ce ministre.

Delporte m’a conseillé de quitter ma maison parce qu’il me sentait menacé. Il m’a conseillé d’aller chez mon voisin, un adjudant chef gendarme rwandais".

Que signifiait le départ de Nsanzuwera pour la suite des événements ? Nsanzuwera n’était pas n’importe qui dans le dispositif sécuritaire de Kigali. En tant que Procureur de la République à Kigali, il était la cheville ouvrière du service de la poursuite des criminels. C’est à lui que le gouvernement intérimaire s’adressait quand il demandait au Parquet de se saisir de tous les actes criminels commis depuis le 6 avril 1994. En sa qualité de Procureur, il lui incombait de conseiller le Gouvernement quant aux actions à entreprendre pour arrêter les massacres et les pillages. Il a préféré se mettre à l’abri.

Le Major Delporte qui l’a soustrait de ses activités n’a pas visé l’intérêt général de la société rwandaise. Nsanzuwera n’était pas menacé et ne l’a jamais été contrairement à la manipulation de son ami Delporte. L’action de Delporte sur Nsanzuwera relevait de la stratégie de la MINUAR de paralyser le fonctionnement des institutions pour faire aboutir le plan de créer le chaos souhaité par le FPR et la MINUAR et ainsi, accélérer la défaite des FAR et le contrôle du pouvoir par le FPR.



2.4 Roméo Dallaire a favorisé le chaos dans lequel des personnes innocentes ont trouvé la mort.

Après l’attentat contre l’avion du Président Habyarimana, bien qu’il fut associé à la gestion de la crise par les hauts responsables des FAR, le Général Roméo Dallaire se montra d’un comportement déroutant. Il s’est employé à donner des contre-ordres pour créer le chaos dont le FPR devait profiter pour prendre rapidement le pouvoir par une victoire militaire.

A la réunion de la nuit du 6 au 7 avril 1994 à l’Etat Major des FAR, des mesures ont été prises en accord avec le Général Dallaire et son adjoint, le Colonel Luc Marchal, pour que des patrouilles soient effectuées conjointement par la MINUAR et la Gendarmerie.

Dallaire a tout saboté. D’abord, les hommes de la MINUAR ne se rendront pas aux endroits où se trouvaient les gendarmes commis à ces missions de patrouilles.

Ensuite, alors qu’il était convenu avec le Colonel Marchal de faire justement le maximum de patrouilles, le Général Dallaire en décida autrement. Il le dit lui-même en ces termes:

"Il était environ deux heures du matin à notre arrivée à l’EM/AR……avec Ndindiliyimana, Luc avait mis au point un plan intelligent pour organiser des patrouilles conjointes. Il y avait un seul problème. Cela exigeait le déplacement de nombreux soldats belges à l’intérieur de la ville pendant la nuit, mouvement qui pouvait être considéré comme une provocation. Je lui ai demandé de réduire leurs effectifs, car nous n’avions pas besoin de ce genre de réaction"

Le Général Dallaire a voulu entraîner la Première Ministre dans son plan de remettre le pouvoir au FPR et ses alliés opportunément qualifiés de "modérés": "J’ai également envoyé une escorte à la maison de la Première Ministre Agathe. Une fois son intervention radiophonique prête, je souhaitais qu’elle se rende au poste de radio en toute sécurité."

Comme le Général Ndindiliyimana le lui a rappelé dans la lettre du 12 février 1994, le Général Roméo Dallaire savait que la Première Ministre n’était plus à même de jouer son rôle de Premier Ministre, mais il a profité de cette situation pour provoquer des luttes intestines entre ce qu’il appelle les "modérés" et les "extrémistes". Il espérait que pendant qu’ils s’entre-déchireraient, le FPR en profiterait pour prendre le pouvoir, puisque pendant ce temps les troupes du FPR faisaient mouvement pour prendre le camp des FAR à Kanombe.

De même, le Général Dallaire a participé à la réunion à l’École Supérieure Militaire, le 7 avril 1994 dans la matinée. Il a approuvé et même félicité les officiers présents pour leurs sages décisions. En venant à cette réunion, Dallaire avait vu ses soldats de la MINUAR, belges et les Ghanéens qui couraient un réel danger. "Nous avons rebroussé chemin pour prendre l’avenue de l’Hôpital et nous nous sommes dirigés vers l’entrée de l’Ecole militaire, en passant devant la deuxième entrée du Camp Kigali. A l’intérieur, j’ai aperçu ce qui me semblait être deux soldats belges allongés par terre. Ce fut un choc brutal." A son arrivée à la réunion, Roméo Dallaire n’a averti personne pour une éventuelle intervention au secours de ses hommes menacés d’être tués.

Quant à Madame le Premier Ministre, Agathe Uwilingiyimana, elle doit avoir compris le jeu combien dangereux dans lequel on voulait l’entraîner, d’où son refus de s’adresser à la Nation comme souhaité par Dallaire. La suite est qu’elle fut abandonnée à son triste sort. Pourtant, le Général qui avait renforcé son escorte pour le conduire à la Radio aurait pu intervenir pour la sauver et sauver les hommes du Lieutenant Lotin. Il a préféré les sacrifier à ses plans. La responsabilité du Général Dallaire dans la mort d’Agathe Uwilingiyimana et des casques bleus est totalement engagée.

2.5 Responsabilité de la MINUAR dans l’assassinat des politiciens de l’opposition placés sous sa protection.

Nous assistons au cas flagrant de manquements à la mission contenue dans la Résolution créant la MINUAR, les Règles d’engagement et le protocole de consignation des armes ; des manquements graves qui engagent la responsabilité du Général Dallaire et ses adjoints. Connaissant probablement le plan du FPR de ne pas partager le pouvoir et de n’admettre aucune opposition, Dallaire a voulu l’aider en laissant éliminer tous les politiciens opposés au régime Habyarimana qui s’étaient volontairement placés sous sa protection. De cette façon, il rendait service au FPR qui ne demandait pas mieux que réduction de concurrents potentiels. A part les cas d’enlèvements connus, personne ne peut affirmer que tous les assassinats ont été commis par la garde présidentielle. Le FPR se trouvait déjà dans le quartier de Kimihurura dès la nuit du 6 au 7 avril 94. Certains ministres et de hauts fonctionnaires rwandais se sont réfugiés dans le camp de la Garde Présidentielle tandis que les politiciens de l’opposition attendaient le FPR et la MINUAR. Dallaire reconnaît avoir été en liaisons téléphoniques avec certains d’entre eux mais il n’a pas apporté l’assistance nécessaire à ces personnes en détresse. "Je ne peux supporter de penser à la quantité de rwandais à qui, ce jour là, on a annoncé l’arrivée des secours et qui ont été massacrés par la suite".

En effet, comment peut-on comprendre que le 7 avril 1994 dans la matinée, sollicité par le commandant de la Compagnie Sécurité VIP, le Lt Colonel Bavugameshi pour intervenir, lui même se trouvant dépassé par les événements, le Général Dallaire ait interdit toute intervention. . Dans son discours à l’ESM le 7 avril 1994 vers 11h, il a notamment déclaré : "…Nous, la MINUAR, nous ne bougerons pas. Je continuerai à vous donner un appui pour éviter l’obstruction de l’Accord d’Arusha et je vous aiderai à empêcher une nouvelle guerre civile avec le FPR".

Comment aurions-nous pu empêcher la guerre que lui-même était en train de conduire. Ne savait-il pas que le FPR avait lancé des attaques directement après l’attentat contre l’avion présidentiel ? Pourquoi refusait-il à ses hommes d’intervenir pour limiter les dégâts en portant secours aux personnes menacées?

Dallaire a boycotté la réunion de chez l’ambassadeur des USA, le 7 avril 94 à 9h. Pourtant, comme le fait remarquer Monsieur Booh-Booh, c’était l’occasion de connaître l’état de la situation et parier aux dérives. Non seulement le Général Dallaire s’est abstenu d’y participer mais il n’a pas fourni les moyens de sécurité au Représentant du Secrétaire Général de l’ONU pour s’y rendre . Ni l’Ambassadeur des USA ni Dallaire, personne n’a informé la délégation des FAR qui était au rendez-vous sur les motifs qui avaient empêché les autres invités de venir.

D’après le rapport Kibat, la situation décrite ci-après requérait des ordres précis du Général Roméo Dallaire: "A 6 h 32, K 9 (Colonel Marchal) demande à Kibat de constituer un peloton complet dans la rue où se trouve Viking. C’est en effet, le quartier des ministres et des personnalités et il commence à être systématiquement nettoyé par la garde présidentielle et la gendarmerie…pour intervenir, il faudrait au moins qu’ils se joignent pour former un groupe suffisamment fort, mais ils sont bloqués par les FAR et les gendarmes. S6 (Lt Colonel Dewez) propose alors à K9 de faire intervenir Rubat (bataillon bengladeshi) qui est regroupé avec tout le bataillon dans le stade Amahoro et qui dispose d’APC (véhicules blindés)". Pourquoi ni Dallaire, ni ses adjoints, personne ne s’est senti interpelé par la gravité de cette situation?

Ce rapport confirme que le quartier de Kimihurura était sous la surveillance de la MINUAR. Les casques bleus étaient cantonnés dans une villa désignée par le mot code de "Viking". Cette villa avait été occupée par les gendarmes avant leur retrait du quartier. Il est faux de dire que les gendarmes se sont attaqués aux gens qu’ils devaient normalement protéger. Rappelons que les seuls gendarmes dans les environs gardaient l’Etat Major de la Gendarmerie et les bureaux de la Primature. Ils appartenaient justement à la compagnie "sécurité des VIP" sous les ordres du Colonel Bavugamenshi. Celui-ci s’est présenté le 7 avril 94 à 7h auprès du Colonel Marchal pour lui demander d’intervenir dans le quartier sous le contrôle de la MINUAR. Il n’y a pas eu d’intervention.

Il est également faux de dire que ce sont les barrages qui ont empêché la réunion programmée à la résidence de l’Ambassade des USA.

Dallaire poursuit l’exploitation hypocrite de la situation pour entretenir la crise au profit du FPR. C’est ainsi que le 7 avril 1994 vers 15h30, quand le Colonel Bagosora, le Général Ndindiliyimana et un officier de l’Etat Major de l’Armée ont proposé de mettre à la disposition de la MINUAR, une équipe d’AML du Bataillon de Reconnaissance pour arrêter les assassinats et rétablir l’ordre, le quartier général de la MINUAR de Roméo Dallaire se montra désintéressé: "A 16h 14, le QG (quartier Général) secteur de la MINUAR annonce que les FAR mettent quatre AML (auto mitrailleurs légèrement blindés) à la disposition de l’ONU, S6 demande que la première mission de ceux-ci soit d’aller chercher le personnel de Viking. En fait, les AML n’arriveront jamais". C’est bien le manque d’intérêt manifesté par la MINUAR qui aura empêché l’arrivée des AML.

C’est bien ce qui ressort du contre-interrogatoire dans le procès Bagosora et alii :

"Maître Constant [Avocat de Bagosora]: Est-ce que vous auriez eu ou été témoin d’une discussion entre Bagosora et Ndindiliyimana et un autre officier concernant le projet d’envoyer un bataillon de reconnaissance pour récupérer les gardes présidentiels qui étaient dans la ville et les ramener à leur camp ? Est-ce que ça vous dit quelque chose ?

Général Dallaire : Oui, ça me dit deux choses : Premièrement, c’est tout fait…c’est une initiative qu’ils ont pu discuter, mais le bataillon de reconnaissance était principalement de véhicules blindés, et je ne me rappelle pas le nombre de soldats, mais la qualité des soldats entre le bataillon de reconnaissance et le rattachement de véhicule vers ce...la compétence du bataillon de la Garde présidentielle, c’était pas à mon idée, c’était absolument inutile. Envoyer deux, trois bataillons pour essayer de régler la Garde présidentielle, là, peut-être qu’on a une chance, mais il y avait le bataillon de garde présidentielle avec des lances roquettes et puis… (inaudible) rapidement lié à ces véhicules blindés très légers. C’était certainement, au point de vue tactique, absolument pas une solution. On envoie au moins deux à trois fois la force et, avec un plan déterminé pour régler quand même avec le bataillon de reconnaissance avec ses canons 76mm…(inaudible), là ok".

Dallaire préféra amener les bataillons supplémentaires du FPR et lancer la guerre au milieu de la ville de Kigali, plutôt que d’utiliser les éléments du bataillon de reconnaissance pour stopper la dérive et stabiliser la situation.

En fait, les éléments du bataillon de reconnaissance n’ont pas pu intervenir parce que: "A 16h30, K3 propose à Kibat de profiter de la confusion provoquée par la sortie du FPR pour essayer de récupérer les gens de Viking".

Personne n’aurait pensé que les politiciens de l’opposition qui avaient choisi d’être gardés par la MINUAR connaîtraient un tel sort. C’est suite à un incident avec le Colonel Bagosora, que la MINUAR avait décidé d’assurer elle-même la sécurité quartier de Kimihurura habité par les Ministres et les hauts fonctionnaires de l’Etat. Le sort subi par la famille Ngango est un des plus poignants dans le rapport Kibat. En effet : "Depuis le 6 avril à 18h, trois hommes du Groupe sud montaient la garde chez monsieur Ngango, tout près de Viking. Ngango n’est pas à son domicile mais bien sa femme et ses enfants……. Après avoir expliqué la situation, la garde prend contact avec B6,Lieutenant Lemaire, (celui ci va abandonner les gens de Kicukiro) qui, finalement, autorise ses hommes à partir sans la famille."

C’est le même scénario qui se répéta avec les réfugiés de l’ATS. Remis aux éléments du FPR, ils seront tués au cours de combats.

2. 6 La MINUAR a livré au FPR certains des réfugiés du Stade Amahoro, en sachant très bien que le FPR prenait ces gens pour les exécuter sans jugement.

Beaucoup de témoignages font état du triste sort des personnes réfugiées au stade Amahoro, auprès de la MINUAR, qui ont été enlevées par les militaires du FPR et exécutées atrocement.

2. 7 La MINUAR a abandonné à leur sort les réfugiés de l’ETO-Kicukiro.

Dès la nuit du 6 au 7 avril 1994, des gens se sont réfugiés dans les cantonnements des troupes de la MINUAR. Ces positions ont été cédées aux militaires FPR dont la plupart étaient des infiltrés. Au lieu d’avertir et de demander aux forces de sécurité gouvernementales d’assurer la sécurité à ces personnes menacées, les soldats de la paix ont préféré se retirer après avoir cédé leurs positions et leurs équipements au FPR.

A Kicukiro comme ailleurs où ils étaient prêts à collaborer avec les éléments de la MINUAR, les gendarmes, considérés comme des ennemis, n’ont pas eu le droit de protéger leurs concitoyens. Ainsi par exemple, quand ils se sont présentés à l’ETO-Kicukiro pour assurer la protection aux réfugiés, le capitaine Lemaire les a ignorés. Le capitaine Luc Lemaire n’a pas voulu non plus remettre ces réfugiés de Kicukiro aux militaires français. Le Capitaine Luc Lemaire s’en explique en ces termes : "Le fait que les français interviennent était un signe évident que, finalement, l’arrivée du FPR au Centre ville n’était qu’un intermède et que de nouveau on allait retomber dans le bon vieux temps avec de nouveau un parti hutu soutenu par une politique étrangère."

L’acharnement contre les français ne date pas d’aujourd’hui ni le fait du seul FPR. L’officier de renseignements belge de la MINUAR, le Capitaine De Cuyper s’en est pris au Conseiller du Chef d’Etat-major de la Gendarmerie qu’il qualifia de planificateur du génocide en ces termes : "Le Colonel Français Dany assistait également aux réunions. Il intervenait régulièrement pour soutenir le Général Major (Ndindiliyimana). Des réunions hebdomadaires se tenaient régulièrement au secteur. On n’y a jamais rien dit d’intéressant et je n’ai guère pu prendre garde……Quant à la responsabilité des événements, je crois qu’il faut la trouver dans la mouvance présidentielle avec Bagosora et d’autres rwandais mais aussi avec le français Dany."

La meilleure preuve de l’engagement aux côtés du FPR de certains membres au sein de la MINUAR, le Général Roméo Dallaire en tête, est celle qui a été fournie par le Major Podvijn à la Commission parlementaire belge : "Nous étions pro FPR", a-t-il déclaré.

Le refus de collaborer avec la Gendarmerie, malgré l’appel insistant des victimes et du commandant de la compagnie sécurité VIP, est pour le Général Dallaire une omission très grave. Il doit en répondre personnellement au lieu de se réfugier derrière l’immunité diplomatique qui n’a aucun fondement quand il s’agit de punir les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.

2.8 Roméo Dallaire doit répondre de l’assassinat des trois évêques catholiques à Kabgayi, malgré l’appel au secours du Pape Jean Paul II qu’il a préféré ignorer.

Les évêques de Kabgayi, Kigali, Byumba avec beaucoup de réfugiés, toutes les ethnies confondues, étaient regroupés à Kabgayi sous la protection des gendarmes. Quand le FPR a pris Gitarama, ces évêques n’ont pas voulu abandonner leurs ouailles. Ils ont prié les gendarmes de partir pour ne pas servir de prétexte à l’agressivité des soldats du FPR. Ces pasteurs et les notables hutus ont été massacrés sauvagement. Les hauts responsables du FPR ont alors prétendu que des militaires indisciplinés avaient commis ce forfait. Dans la suite, les mêmes responsables ont avoué qu’ils les avaient faits tuer volontairement parce qu’ils les considéraient comme des génocidaires.

Le Général Roméo Dallaire à qui le Pape Jean Paul II avait demandé d’assurer la protection des pasteurs de l’Église Catholique à Kabgayi n’a rien fait alors qu’il en avait les moyens et le temps. Il semble même approuver cet acte ignoble des hommes de Paul Kagame puisqu’il fait tout son possible pour les justifier : "Or, les soldats savaient pertinemment que l’Eglise était mieux avec la famille de Habyarimana et les membres du précédent gouvernement. Ils avaient simplement assassiné les prélats par pure vengeance, leur discipline ayant été mise à rude épreuve par les atrocités dont ils avaient été témoins dans tout les pays."

2.9 Le Général Roméo Dallaire complice dans l’assassinat des Présidents Habyarimana et Ntaryamira.

Le Général Roméo Dallaire, dans son câble du 7 avril 94 adressé à son compatriote Maurice Baril, rapporte cet événement comme un incident banal l’assassinat de deux chefs d’Etat avec tous les membres de leurs suites y compris les français membres de l’équipage. Il s’exprime en ces termes : "Je ne me suis même pas arrêté pour leur offrir mes condoléances. Je leur ai dit qu’en ce qui concernait la MINUAR et le monde entier, le Rwanda avait encore un gouvernement dirigé par Madame Agathe. Tout allait passer sous contrôle."

Bien que le Général Dallaire et ses collaborateurs belges soient informés directement du tir de missiles sur l’avion, ils vont d’abord créer la confusion en parlant d’explosion d’un dépôt de munitions à Kanombe avant de prétendre un peu plus tard qu’il s’agissait d’un crash alors qu’en réalité c’était un attentat terroriste.

Dallaire ne pouvait pas ignorer la provenance de missiles qui ont abattu l’avion puisqu’il en avait discuté quelques temps auparavant avec le Colonel Cussac même si aucune action sérieuse n’avait été entreprise pour mettre la main dessus, malgré le cataclysme lui annoncé par Paul Kagame.

Une rwandaise qui séjournait à l’Hôtel Méridien a vu, dès 21h00, tous ces militaires belges de la MINUAR s’emparer de tout le stock de Champagnes pour célébrer le crash de l’avion du Président Habyarimana. Leur conduite semblait programmée. Ils devaient avoir été préalablement mis au courant de l’assassinat. Le Général Dallaire, en tant que leur chef, ne pouvait pas ne pas être au courant.

Dallaire est suspecté d’être impliqué dans l’attentat contre l’avion du Président et, surtout, d’avoir favorisé l’assassinat des casques bleus belges et Madame Agathe Uwingiyimana par omission incompréhensible. Des questions importantes restent sans réponse. Pourquoi Dallaire s’est-il substitué à ses chefs directs pour envoyer le Lieutenant Lotin et son équipe en mission d’escorter la délégation du FPR ? Comment une délégation du FPR pouvait-elle se rendre dans la zone sous contrôle gouvernemental avec les tensions qui prévalaient ? Pourquoi c’est le groupe Lotin qui rentrait de mission qu’on a de nouveau envoyé chez Agathe ? Comment a-t-on oublié le groupe Lotin de 3h00 du matin jusqu’à 12 H00 malgré la situation qui prévalait ?

Alors que son omission d’agir pour assurer la protection du Chef de l’Etat pouvait s’interpréter comme résultant du hasard des circonstances, son attitude et ses déclarations le rendent suspect de cet attentat.

Sa haine non dissimulée pour Président Habyarimana, haine qu’il partageait avec le sénégalais Amadou Ly Représentant du PNUD au Rwanda les rend suspect de ce qui lui est arrivé.. Le livre de Dallaire lève le voile sur le rôle du Représentant Résident du PNUD dans la désinformation sur la situation qui prévalait au Rwanda. Considéré comme le "spécialiste" des problèmes sociopolitiques rwandais, Amadou Ly était le principal conseiller et informateur de Dallaire. Les informations qu’il donnait à Dallaire étaient des accusations contre Habyarimana et son régime.

Le rôle de ce fonctionnaire de l’ONU dépêché à Kigali dès les premiers mois de la guerre d’octobre 1990, sera déterminant dans les prises de position du Commandant de la MINUAR. C’est l’aveu même du Général Dallaire dans sa déposition devant le TPIR, le 19 janvier 2004 dans l’Affaire Bagosora et alii. Interrogé sur une lettre non signée qu’il déposait comme preuve du plan machiavélique de Habyarimana, Dallaire répondit: "Cette lettre du 3 décembre 1993 confirmait une information que nous avons reçue du Représentant Résident du PNUD, Monsieur Amadou Ly du Sénégal qui nous a été d’un très grand secours dans l’évolution de la mission ; puisqu’il était dans le pays depuis trois ans."

La lettre en question a été identifiée par Monsieur Alphonse Marie Nkubito qui a indiqué qu’elle a été rédigée par des gens de l’opposition bien connus, qui voulaient tester la réaction de Roméo Dallaire et ses hommes.

Le Professeur Filip Reyntjens a bien perçu la gravité de cet attentat que Roméo Dallaire présente comme un banal incident.

Devant la Chambre I présidée par le Juge Laïty Kama, à la question de Maître Tiphaine Dickson qui lui demandait pour quel motif l’attentat du 6 avril 1994 était si important pour comprendre ce qui s’est produit dans les mois qui ont suivi, le Professeur Filip Reyntjens a répondu :

"Pour deux raisons. Parce que d’abord, c’est l’étincelle qui a allumé le feu. Je n’exclus pas du tout que s’il n’y avait pas eu l’attentat, qu’une autre étincelle aurait allumé le feu, je ne sais pas.

Mais en tout cas, l’attentat a été l’étincelle. Donc, il faut savoir qui l’a fait. Parce que, et ça, c’est la deuxième raison, ça c’est un intérêt historique, disons, politique à la limite, historique.

Mais il y aurait également un intérêt juridique. Ceux qui ont descendu cet avion, savaient très bien quelles seraient les conséquences de cet attentat et dans ce cas-là, porteraient une responsabilité juridique, et je ne dis pas politique, maintenant, mais juridique, dans le génocide. Parce qu’ils auraient, sachant très bien quelle serait la conséquence, ils auraient déclenché un génocide".

Dernièrement, Filip Reyntjens a réaffirmé ses propos lors de sa déposition, le 22 septembre 2004, dans le procès Bagosora et alii.

Il est important de noter que ces propos qui retiennent actuellement l’attention du public, ne diffèrent pas de ceux tenus par les autres experts appelés par le Procureur du TPIR. Ainsi, le 5 novembre 1997, le Professeur André Guichaoua soutenait devant la Chambre II présidée par le juge William Sekule :

"Très certainement, le déclenchement des événements avec l’assassinat -- enfin, avec l’attentat envers l’avion présidentiel -- est certainement un acte décisif qui, à partir de ce moment-là, rendait certainement fatale la suite des événements, mais je pense que jusqu’à ce jour, il y avait des issues et qu’un certain nombre de personnes imaginaient qu’il était parfaitement possible[----] je pense que beaucoup imaginaient que le pire n’est pas toujours fatal.

Par contre, à partir du moment où l’avion présidentiel a été abattu, je crois que ceux qui en ont pris l’initiative ont effectivement placé les enchères à un niveau très élevé, c’est-à-dire que la mobilisation politique échappait, en tout cas à une large partie de la classe politique, qui n’était plus en mesure de peser sur les événements ou de maîtriser les forces que l’on libérait avec cet assassinat.".

La complicité de Roméo Dallaire a été discutée lors des travaux de la Commission d’enquête du Sénat de Belgique.

Dans une lettre du 22 mars 2000 au Premier Ministre belge Guy Verhofstadt, le Général Ndindiliyimana parle de faits impliquant les Belges en tant qu’acteurs dans la catastrophe de 1994. Il a notamment signalé que des Belges sous le drapeau onusien relevant du commandement de Roméo Dallaire étaient impliqués dans l’attentat contre le Président Habyarimana.

Un télégramme de l’APR daté du 07 avril 1994, destiné à ses unités combattantes et intercepté par les Forces armées rwandaises révèle que des éléments du FPR se trouvant dans Kigali avaient reçu l’appui des belges de la MINUAR.

Les actions des belges de la MINUAR étaient bien connues du Général Dallaire et de son Adjoint le Colonel Luc Marchal.

Les missiles avec lesquelles l’avion présidentiel fut abattu, ont été acheminés sur Kigali avec la complicité du Général Dallaire. Tout comme son collaborateur, le colonel Marchal, Dallaire avait des informations que ces missiles anti-aériens se trouvaient au CND.

L’intervention intempestive du Général Dallaire pour faire accepter aux autorités rwandaises que les avions atterrissant sur l’aéroport de Kanombe empruntent un seul corridor et un seul sens entre sans aucun doute dans le plan global des préparatifs de l’attentat du 6 avril 1994 puisque l’axe d’approche du Falcon présidentiel était connu à l’avance par les auteurs de l’attentat du 6 avril 1994.

Le 6 avril 1994, le Général Dallaire a donné une mission suspecte au Lieutenant Lotin à l’insu du Colonel Luc Marchal d’escorter des membres du FPR. Au moment de l’attentat, ces casques bleus se trouvaient dans la zone de tir à Masaka. Après l’attentat, les mêmes casques bleus ont été envoyés chez le Premier ministre Agathe, en remplacement du détachement du Capitaine Theunissen commis à cette mission. Ces casques bleus avaient la mission de conduire le Premier ministre Agathe à la Radio Rwanda alors qu’elle pouvait être enregistrée à la maison. Si on ajoute à ces anomalies, le fait que le Lt. Lotin et ses hommes n’avaient pas reçu les équipements appropriés pour ce genre de mission vu le contexte du moment, on est amené à la conclusion que Dallaire avait décidé de liquider ces témoins gênants qui venaient de participer à l’assassinat des Présidents Habyarimana et Ntaryamira.

Le Général Dallaire s’est dénoncé lors de la célébration du dixième anniversaire du "génocide" au Rwanda. Il a laissé entendre qu’il ne comprenait pas ce qui se passait à l’ONU avec la boîte noire de l’avion du Président Habyarimana puisque c’était lui-même qui l’avait envoyée à New York.


DE MULTIPLES AVEUX JUSTIFIANT LES POURSUITES PÉNALES CONTRE ROMÉO DALLAIRE
.

Pour quelqu’un comme Romé Dallaire qui a la prétention de traiter les autres de diables, toutes ses décisions, omissions criminelles et compromissions renseignées et documentées comme nous venons de l’établir, justifient largement l’ouverture d’un dossier pénal à sa charge. Comme il y a manifestement conflit d’intérêts, le TPIR ne devrait pas se baser sur le témoignage de Roméo Dallaire pour condamner les gens pour des crimes dont il est le principal auteur.

Mais, ce serait naïf de penser que le Procureur du TPIR renoncera à sa funeste stratégie de poursuites sélectives et discriminatoires et de subornation des témoins.

Définitivement, une telle action ne peut pas aboutir devant le Tribunal Pénal International pour le Rwanda politisé à outrance, pour servir les intérêts du FPR victorieux et assurer l’impunité aux fonctionnaires et responsables onusiens impliqués dans le drame rwandais. C’est pourquoi nous devons le traduire devant les juridictions de son pays, le Canada.

L’entreprise n’est pas très compliquée dès lors que, par orgueil ou par ignorance, le Général Roméo Dallaire a offert de sérieux et nombreux aveux dans son fameux livre "J’ai serré la main du diable". Par ailleurs il a fait de nombreuses concessions aux avocats de la Défense qui l’ont confronté à ses grossiers mensonges lors du contre-interrogatoire après sa déposition à charge dans le Procès Bagosora et alii. Au titre de ces multiples aveux, il y a lieu de citer quelques exemples.

3.1 Pour Roméo Dallaire, les bons rwandais étaient avec le FPR.

Déjà lors de sa mission de reconnaissance en avril 1993, Dallaire avait choisi son camp. Cela apparaît dans le rapport de mission déposé comme pièce du Tribunal lors de sa déposition dans le procès Bagosora et alii.

A son arrivée au Rwanda, le 25 octobre 1993, Roméo Dallaire avait une vision manichéenne de la situation qui prévalait au Rwanda. Les bons étaient du côté du FPR, les extrémistes du côté des FAR. Dallaire avait choisi d’être du côté du FPR et va travailler pour l’installer au pouvoir. Roger Booh Booh tire cette conclusion dans l’interview à Collette Braeckman. Dallaire ne dit pas le contraire : "A l’intérieur du QG, j’ai été mis au courant des derniers événements. Kagame avait lancé son offensive et pénétré la zone démilitarisée presque vingt quatre heures après son avertissement. …… Cette fois-ci, il n’y avait pas de force française pour lui mettre les bâtons dans les roues et la MINUAR n’avait pas le mandat pour le stopper" ; ou encore : "Les combattants étaient pratiquement des enfants, des êtres jeunes, résistants et dévoués. Je ne doutais pas un seul instant qu’ils gagneraient la guerre. Mais pourraient-ils sauver leurs concitoyens ?"

3.2 Roméo Dallaire a consciemment laissé Paul Kagame sacrifier des innocents à ses ambitions de pouvoir.

Roméo Dallaire avoue avoir été informé par Paul Kagame : "Cette guerre sera la cause de bien des sacrifices. Si les réfugiés doivent être sacrifiés pour la bonne cause, on considérera qu’ils étaient inclus dans ce sacrifice" Il n’y a donc aucune équivoque, Paul Kagame a sacrifié des vies humaines pour assouvir ses ambitions, et Roméo Dallaire l’a laissé faire en parfaite connaissance de cause.

3.3 Roméo Dallaire a fermé les yeux sur les préparatifs de la reprise de la guerre et s’est compromis dans l’attentat terroriste contre l’avion présidentiel du 6 avril 1994.

La MINUAR a laissé le FPR infiltrer des hommes et du matériel de guerre dans la Capitale sous le couvert des convois de ravitaillement. C’est ainsi que les missiles qui ont servi pour abattre l’avion présidentiel ont été introduits au CND. Roméo Dallaire l’a avoué lors de son contre-interrogatoire par la Défense dans l’Affaire Bagosora et alii en ces termes : "Ce qui était plausible, c’est que ces missiles auraient pu être infiltrés dans la zone CND" Ainsi donc Roméo Dallaire a assisté sans réagir aux préparatifs de la reprise de la guerre, l’assassinat du Président Habyarimana et c’est la raison pour laquelle il a été obligé d’avouer à l’Avocat de Bagosora : "C’est pour ça que je vous dis… et j’ai écrit dans mon livre…que ma mission n’a pas été un succès" Il doit répondre de l’assassinat des présidents Habyarimana et Ntaryamira ; de celui des membres de leurs suites et des membres de l’équipage du Falcon 50 présidentiel.

3.4 Roméo Dallaire reconnaît avoir été tenu informé de l’implication de l’Ouganda dans le drame rwandais.

Le FPR recevait ses approvisionnements en matériels et ses renforts en hommes de la part de la NRA et Dallaire qui le savait n’a jamais rien fait pour arrêter ce mouvement : "Le jour suivant, j’ai reçu un rapport du nouveau commandant du secteur de la MUNUOR, le Colonel Azrul Haque, confirmant des envois d’armes et de munitions entre l’Armée Nationale de Resistance de l’Ouganda (ANR) et le FPR. Au même moment, l’équipe de renseignements de Claes a envoyé un rapport stipulant que les officiers de l’Armée Ougandaise avaient tenu des réunions pour supporter l’offensive du FPR qui devait commencer à Byumba ou à Ruhengeri. Claes avait également entendu parler d’un bateau chargé d’armes pour le FPR que les autorités avaient saisi à Goma sur la rive zaïrois du lac Kivu."

Le Président Yoweri Museveni a confirmé l’implication de son pays et de son armée dans le conflit rwandais, lors de son intervention publique à Kigali, à l’occasion des cérémonies commémoratives du "10ème Anniversaire du génocide". Il l’avait déjà dit dans un discours prononcé au sommet de Harare en 1999 et l’a répété à Kigali. (voir note bas de page # 22)

Quand Museveni prétend qu’il a su contourner la surveillance des Nations Unies, personne ne peut le suivre dans son mensonge. L’ONU savait mais n’a pas voulu intervenir parce que Dallaire avait décidé de faciliter la victoire du FPR par tous les moyens.

3.5 Roméo Dallaire a caché les résultats des enquêtes menées sur les massacres de Kirambo et Mutura.

Tout le monde sait maintenant que le rapport préliminaire sur les massacres de Kirambo a été caché pour ne pas compromettre le FPR. Dallaire prétendait vouloir sauvegarder le processus de paix par la mise en œuvre des Accords d’Arusha. Or, ce rapport a été déposé comme pièce du Tribunal dans l’Affaire des Media et récemment encore dans celle de Bagosora et alii. Roméo Dallaire a tout fait pour imputer ces massacres aux Forces armées rwandaises et il l’a écrit dans son livre déjà cité, page 158 à 160.

3.6 Roméo Dallaire a ouvertement soutenu le FPR dans son attaque qui a fait échouer les Accords de Paix d’Arusha

Le Général Roméo Dallaire avoue avoir discuté les plans des opérations avec Paul Kagame, que ses hommes fraternisaient avec les soldats de Kagame et que, des fois, il dormait au Quartier Général du FPR. Cet extrait est fort significatif.

"Puis nous avons commencé à discuter de la situation de la bataille elle-même, et j'ai étendu ma carte militaire entre lui et moi sur le sol". Il était évident que Kagame avait bloqué, sans grand effort, un certain nombre de bataillons de l’AGR qui défendaient le cœur de la terre hutue, Ruhengeri. Cela lui permettait une fois prise la ville de BYUMBA et la route principale se dirigeant vers l’Est, de se rendre vers le Sud, jusqu’à la frontière de la Tanzanie et de boucler avec le fleuve. Il faisait aussi avancer son armée vers l’Ouest, juste en dessous de Kigali, sur l’axe principal qui menait à la capitale. Il était clair que Kigali était encerclé et devait s’attendre à une épreuve de force. Après avoir insinué une possible consolidation de son armée le long du fleuve, dans une direction nord-sud, il a terminé la discussion de ses plans militaires de façon brutale et a détourné la conversation sur les négociations d’Arusha, qui devaient commencer le matin suivant. Il ne s’y était pas rendu, car il soutenait que la solution revenait aux politiciens. Pessimiste quant à l’issue potentielle de la réunion, il pensait qu’au départ les ententes d'Arusha que j’avais le mandat d’appuyer - servaient exclusivement " à sauver la vie de militaires et non point celle de civils. Une fois notre session de travail terminée, il m’a invité à dormir chez lui, car retourner à Kigali la nuit tombée était trop dangereux….

Au cours de notre entretien, j’ai demandé à KAGAME pourquoi il ne sautait pas directement à la gorge de ses ennemis à Kigali. Il a complètement ignoré les implications allant de pair avec ma question. Il savait très bien que chaque jour de bataille dans la périphérie de Kigali entraînait la mort des Tutsi qui se trouvait derrière les lignes de l’AGR."

Cette position d’aveu de Roméo Dallaire vient d’être confirmée par Roger Booh Booh en ces termes : "Durant longtemps, par respect pour les victimes, je me suis abstenu de toute polémique. Mais aujourd’hui, je veux rappeler les problèmes qui se posaient. Il faut d’abord savoir que Dallaire voulait être le responsable, à la fois politique et militaire, de toute la mission et qu'il a mal accepté mon autorité, essayant de minimiser mon rôle. Sur le plan militaire, qui était de son ressort, bien des problèmes se posaient : la zone démilitarisée était devenue une passoire, sans cesse des armes arrivaient d’Ouganda pour approvisionner le FPR, et Habyarimana, qui en était tenu informé par ses amis, nous le reprochait, précisions à la clé. Mais selon les rapports de Dallaire, il n’y avait jamais aucun problème de ce côté-là... En fait, le général ne disait pas la vérité, ses contrôles n’étaient pas assez serrés. Le travail militaire de la Minuar n’était pas fait et Dallaire préférait faire de la politique; ce n’était pas son rôle. De plus, il était partial : plusieurs fois, on a noté que des militaires du FPR travaillaient avec Dallaire, dans la salle d’état-major de la Minuar, à l’hôtel Méridien. Là, il y avait des cartes montrant les positions des forces d’Habyarimana sur le terrain... A la Minuar tout le monde savait cela. Quand les hostilités ont commencé, notre quartier général était plutôt dans la zone du FPR et ce dernier venait se renseigner pour savoir où se trouvaient les poches de résistance. Enfin, Dallaire n’était même pas obéi par ses troupes."

3.7 Roméo Dallaire a laissé le FPR tuer des réfugiés places sous sa la protection de la MINUAR.

Dallaire avoue que des réfugiés ont été enlevés par le FPR des installations gardées par les hommes de Roméo Dallaire et ont été exécutés sommairement. Il l’exprime en ces termes : "Un seul incident avait eu lieu au stade Amahoro : des soldats du FPR étaient entrés sans rencontrer aucune résistance de la part des bangladais et ils s’étaient emparés d’une douzaine de civils accusés par d’autres Rwandais présents à l’intérieur du stade d’avoir commis des atrocités. Ils furent exécutés sommairement à l’extérieur des murs d’Amahoro."

3.8 Roméo Dallaire a laissé tuer les politiciens de l’opposition et leurs familles sous la protection de la MINUAR.

Roméo Dallaire a avoué avoir failli à sa mission de porter secours à des personnes en danger, dont les politiciens de l’opposition qui s’étaient délibérément placés sous la protection de la MINUAR.

"Tous inquiets, les chefs des partis modérés, des Rwandais ordinaires et des employés civils de l’ONU continuaient d’appeler pour obtenir des renseignements et exiger une protection. Nous n’avions qu’un nombre limité de soldats et chaque homme occupé à un poste de garde était un homme en moins pour patrouiller et pour s’occuper des urgences. Nous avons demandé aux personnes qui téléphonaient de demeurer chez elles ou de se cacher jusqu’à ce que la situation se stabilise J’ai finalement pu joindre New York en utilisant le téléphone par satellite. Ce n’était pas le moyen le plus sûr, mais je n’avais d’autre choix. Maurice était en permission (j’ai su par la suite qu’au moment où l’avion du président s’écrasait à Kigali, Maurice et son épouse se trouvaient chez moi, dans mon salon, à Québec, où ils rendaient visite à Beth pour la rassurer sur mon état). J’ai fait mon rapport à Iqbal Riza et il m’a répondu ‘La MINUAR ne doit pas, je répète, ne doit pas tirer à moins qu’on ne lui tire dessus.’ Je lui ai rappelé que nos règles d’engagement nous permettaient d’intervenir et de procéder à une escalade des moyens à employer, ce qui incluait l’utilisation de nos armes afin d’empêcher des crimes contre l’humanité. Il a répété que la MINUAR ne devait pas tirer sauf si on tirait sur elle. Nous devions négocier et, surtout, éviter les conflits. Il a ajouté qu’il avait tout à fait compris la crise à laquelle nous devions faire face, mais que nous ne devrions pas créer d’incidents exploitables. Pas moyen de le persuader. Je lui ai annoncé l’envoi de mon rapport écrit, et nous avons raccroché "

3.9 Roméo Dallaire a laissé le FPR massacrer des innocents dans ses arrières sans rien faire.

Roméo Dallaire a tout fait pour couvrir les tueries exécutées dans les positions arrières du FPR par des réfugiés Tutsi nouvellement rentrés et intégrés dans les rangs après un entraînement sommaire. Il avoue en ces termes : "Demé avait également eu des nouvelles de l’autre faction. Le FPR était en train de recruter nombre de Tutsis derrière ses lignes. Après un entraînement sommaire, ces hommes étaient déployés en tant que forces de sécurité dans les secteurs déjà pris. Nos observateurs militaires commencèrent à rencontrer de nouvelles troupes derrière les lignes du FPR, et ils remarquèrent que certains de ces soldats ne parlaient qu’un dialecte swahili, la preuve qu’ils provenaient de la diaspora ougandaise. Nous reçûmes des rapports faisant état de massacres d’anciens agents et d’employés du gouvernement hutus et de leurs familles. Ces tueries avaient surtout lieu dans les régions de Byumba et de Ngarama. Selon Demé, un grand nombre d’orphelins hutus vivaient à Byumba, où Bernard Kouchner, de Médecins sans frontières, était allé vérifier s’il pouvait y faire oeuvre utile. Pour corser les choses, le FPR avait imposé des restrictions quant aux endroits où pouvaient se rendre nos observateurs. La dernière ligne du rapport de Demé disait ceci : ‘Nous avons la preuve qu’on nous a imposé des restrictions afin qu’il [le FPR] puisse poursuivre ses activités, en particulier les massacres.’ "

3.10 Roméo Dallaire reconnaît certaines victimes de ses propres manquements.

Parmi les victimes des manquements de la MINUAR que Roméo Dallaire reconnaît, nous pouvons d’ores et déjà citer quelques noms au hasard :

* Habyarimana Juvénal et sa suite,

* Ntaryamira Cyprien et sa suite,

* Les Français, membres de l’équipage du Falcon 50 présidentiel,

* Renzaho Juvénal,

* Nsabimana Déogratias,

* Sagatwa Elie,

* Ngurinzira Boniface,

* Kavaruganda Joseph,

* Ndasingwa Landouald et toute sa famille,

* Ngango Félicien et toute sa famille,

* Nzamurambaho Fréderic,

* Niyoyita Joseph,

* Les Evêques et leurs compagnons tués à Kabgayi,

* Les casques Bleus belges

* Etc.

S’agissant de ces derniers, Roméo Dallaire s’est abstenu d’intervenir pour leur porter secours quand il est passé au Camp Kigali, le 7 avril 1994, où ils étaient en difficulté. Il a par ailleurs refusé de comparaître devant la Commission du Sénat belge pour l’éclairer sur les circonstances de la mort de leurs para-commando massacrés par les soldats mutins du Camp Kigali. Un dossier exhaustif portant sur l’identification des victimes sera constitué ultérieurement.

Mars 2005

 

2.4 Le fameux fax du Général Roméo Dallaire ; cf. Annexes 7 A et B.

 

Il serait d’une hypocrisie excessive de nier que le fameux fax du Général Roméo Dallaire du 11 janvier 1994, fax câblé au Quartier Général des Nations Unies à New York, ne fut pas la pièce maîtresse à la base de laquelle la Communauté internationale a conclu que les événements tragiques d’avril-juillet 1994 au Rwanda devaient être qualifiés de “génocide des Tutsi, planifié et exécuté par les Hutu”.

Dès lors que dans ledit fax, l’organisation “Interahamwe za MRND” est particulièrement mise en cause, il était nécessaire qu’en ma qualité de 2ième Vice-président des Interahamwe za MRND durant la période visée, j’y accorde toute l’attention voulue.

 

L’Humanité a le droit d’être éclairée sur les circonstances dans lesquelles ce fax a été élaboré et publié, d’en savoir un peu plus sur le pourquoi de la disparition des archives de l’ONU et de la MINUAR de l’original du fax envoyé par le Général Roméo Dallaire au Général Maurice Baril et sur le mobile de la fabrication d’un nouveau fax manipulé dont des copies non conformes audit fax original ont été mises en circulation. Il est particulièrement important de mener les enquêtes jusqu’au bout pour identifier les responsables de cette incroyable manipulation qui a conduit à la diabolisation de tout un peuple, accusé avec légèreté de génocide sur base d’éléments non vérifiés.

 

A ce sujet, de laborieuses investigations ont été conduites par la Défense depuis la production par le Procureur Richard Prosper d’une copie caviardée de ce fax du 11 janvier 1994 dans le procès de Jean Paul Akayesu.[1]

 

Ces enquêtes ont été confortées récemment par les pièces produites par le Général Roméo Dallaire lors de sa déposition dans l’Affaire Bagosora et alii. A cette occasion, les avocats de la Défense ont méthodiquement démonté les mensonges minutieusement arrangés par le Général Roméo Dallaire, avec le concours intéressé du Premier Ministre Désigné, Faustin Twagiramungu.

 

Le fameux formateur top niveau des “Interahamwe za MRND”, Jean Pierre Turatsinze, alias Abubakar, alias Kassim, était un civil sans aucune connaissance militaire. Il avait été renvoyé du MRND depuis novembre 1993 et, partant, il n’avait pas d’accès aux informations sensibles ou confidentielles qui se trouveraient au niveau du Secrétariat National du MRND en janvier 1994.

 

Du reste, c’est une sérieuse indication de constater que le Procureur n’a rien fait pour le protéger contrairement aux autres transfuges, entourés de toutes les garanties de sécurité et bénéficiant d’importants et réguliers versements de fonds pour leur entretien. Malgré le poids de son témoignage devant le TPIR, eu égard aux informations lui attribuées qui auraient permis au Général Roméo Dallaire de rédiger son fameux fax du 11 janvier 1994, Jean Pierre Turatsinze aurait été éliminé par le FPR, faute de protection par le TPIR qui, pourtant, depuis 1996, le présente comme un important témoin de l’Accusation. On a donc préféré garder la légende et faire disparaître la source qui risquait de changer de version ou d’être contredite.

 

En effet, il est franchement inconcevable que l’Accusation n’ait pas jugé opportun d’appeler Jean Pierre Turatsinze comme témoin à charge dans le procès mettant en cause le 2ème Vice-Président des “Interahamwe za MRND”, alors qu’il était encore en vie. Lors des plaidoiries finales en première instance, Me Tiphaine Dickson est allée jusqu’à interpeller la Cour à ce sujet en stigmatisant l’absence d’éléments justifiant la diabolisation excessive des “Interahamwe za MRND” en ces termes : “Où sont d’ailleurs les Interahamwe à la barre ? Où sont les entraîneurs d’Interahamwe ? Où sont les entraînés ? On n’en a pas vu un seul ! Où est Jean Pierre Turatsinze, l’informateur du Général Dallaire, celui qui se prépare à tuer tous ces mille Tutsi en 20 minutes ? Nous avons l’impression de confronter des fantômes.”[2] [notre soulignement]

 

 

L’original du fameux télégramme du 11 janvier 1994 s’est avéré introuvable dans les archives des Nations Unies. En effet, M. Ralph Zacklin, Assistant du Secrétaire Général des Nations Unies aux Affaires Juridiques l’a reconnu, en répondant aux Conseils de Joseph Nzirorera et d’Aloys Ntabakuze en ces termes: “We have conducted an extensive research of the organization’s archives, both for the original of the document that was signed by Brigadier-General Dallaire and transmitted from Kigali and for the original of the transmission that was received in New York. We regret to inform you that we have not been able to locate either of those original documents.”[3]

 

L’examen physique de chacun des documents produits par Roméo Dallaire lors de sa déposition dans le procès Bagosora et alii et leur comparaison ont permis à la Défense d’amener le Général Roméo Dallaire et son assistant, le Major Brent Beardsley, à abandonner leurs certitudes de départ, créant ainsi un sérieux doute sur l’authenticité des copies qu’ils ont mises en circulation. Les versions contradictoires soutenues par Roméo Dallaire, Brent Beardsley et Frank Claes constituent un argument  de plus pour douter de la conformité à l’original des copies de ce fax du 11 janvier 1994 que l’Accusation présentait jusqu’ici comme une des preuves irréfutables de la planification du génocide des Tutsi” de 1994. L’analyse ci-après le confirme.

 

Des preuves irréfutables de la manipulation montée par le Général Dallaire.

 

Les documents[4] divulgués par Roméo Dallaire à l’occasion de sa déposition dans le procès Bagosora et alii, ajoutés à ceux qui étaient déjà connus du public[5] ainsi qu’à la connaissance que nous avons des événements marquants qui ont précédé l’initiative de Roméo Dallaire[6], ne laissent plus aucun doute sur les objectifs visés quand il a rédigé son Fax du 11 janvier 1994, dont l’original n’est ni trouvable dans les archives de l’ONU et ni dans celles de la MINUAR, comme déjà précisé ci-avant.

 

Avec le fax du 11 janvier 1994, le Général Roméo Dallaire s’est engagé dans une véritable conspiration contre le Président Habyarimana et son parti, le MRND. Pour mener cette opération criminelle, il a compté sur le concours intéressé du Premier ministre désigné, M. Faustin Twagiramungu. Le FPR était parfaitement au courant du complot et, après son échec suite à la méfiance de Kofi Annan et du général Baril, il a pris ses propres dispositions pour exécuter son projet d’assassiner le Président Habyarimana[7]. L’examen physique des documents ci-avant mentionnés et leur confrontation ne débouche que sur cette seule conclusion : le complot ourdi par Roméo Dallaire et Faustin Twagiramungu a échoué parce que le général Maurice Baril et M. Kofi Annan se sont montrés très sceptiques face aux informations transmises par Roméo Dallaire dans ce fax  du 11 janvier 1994 qui sollicitait leur couverture pour saccager le siège du parti MRND et renverser le Président Habyarimana par la force ; le tout au profit du FPR et des “Modérés”.

 

Dès le départ, le Général Roméo Dallaire suggérait une attaque de grande envergure:

“It is our intention to take action within the next 36 hours with a possible H HR [H hours] of Wednesday at dawn (local)” (pt 9). [notre explication]

Il recommandait: “It is recommended the informant be granted protection and evacuated out of Rwanda ” (pt 10).

Il avouait avoir pris le risque de doubler Roger Booh Booh, son patron, et promettait de l’informer le lendemain:

“Force Commander to inform SRSG first thing in morning to ensure his support” (pt 11).[8]

 

Plus tard, Roméo Dallaire avouera à ce sujet:

“Une fois Luc parti, j’ai décidé de mettre au courant Booh Booh, le RSSG, dès le lendemain, et d’envoyer au Général Baril un câble soigneusement codé le plus tôt possible. En agissant ainsi, je rompais totalement avec le protocole. La procédure standard voulait que toutes les communications importantes entre un commandant en poste et le DOMP passe obligatoirement par l’hiérarchie civile et politique dans le cas présent, par Booh Booh et son bureau… Le 11 janvier, ma décision d’envoyer ce câble avec ma signature à un conseiller militaire-Maurice Baril en l’occurrence -était absolument sans précédent. J’ouvrais une ligne de communication dans un domaine où je n’avais aucune autorité pour le faire.[9] [notre soulignement]

 

Le général Maurice Baril accusa réception du câble de Roméo Dallaire mais se montra plutôt sceptique:

Acknowledge receipt of your cable dated 11 Jan 1994 at 20 15 (NYT). Content being studied. Well get back to you with guidance as soon as possible”.[10]

 

Le chef des opérations de maintien de la paix, à l’époque, M. Kofi Annan, dans son câble Mir 74, s’adressa, non au Général Roméo Dallaire mais, au Représentant spécial du Secrétaire général au Rwanda, M. Roger Booh Booh, en date du 11 janvier 1994. Il faisait référence au câble CNR 12 envoyé le 11 janvier 1994 à New York par le Général Roméo Dallaire et se montrait à son tour très prudent:

“Information is cause for concern but there are certain inconsistencies. We must handle this information with caution.”[11]

 

Le même jour, i-e le 11 janvier 1994, le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies au Rwanda, M. Roger Booh Booh, a réagi à cette correspondance qui lui arrivait de New York.

Dans son câble MIR 79 du 11 janvier 1994, répondant au câble N° 74 de M. Kofi Annan, M. Roger Booh Booh révèle l’implication de Faustin Twagiramungu dans le complot monté minutieusement par le Général Roméo Dallaire contre le MRND:

4. The person who asked PM (D) [Premier Minister Désigné] to approach FC in order to establish the contact is a Councillor in Foreign Ministry with whom the PM (D) has had a very privileged, professional relationship within the party MDR. The informant is the brother-in-law of the Councillor. 5. The PM (D) expressed total confidence in the veracity and true ambitions of the informant. He is a 100% that the individual wants out of all this killings and disruption. Such an endorsement can not be ignored nor taken lightly[12] (§ 4 et 5). [notre explication]

 

Les personnes dont il est question dans ce câble sont : M. Faustin Twagiramungu, PMD-Premier Ministre désigné, Roméo Dallaire, FC-Force Commander, M. Jean Pierre Turatsinze, l’informateur et M. Charles Ntazinda[13], un membre agitateur du MDR, voisin de Jean Pierre Turatsinze et fraîchement promu Conseiller au Ministère des Affaires Etrangères, par le Ministre Anastase Gasana.

 

Toujours dans son câble No 79, M. Roger Booh Booh a repris l’idée avancée par le Force Commander (FC), le Général Roméo Dallaire, d’utiliser la force:

“FC is prepared to pursue this operation with military doctrine with reconnaissance, rehearsal and implementation using concentrated overwhelming force. Should at any time during reconnaissance, planning or preparation, any sign of a possible contravening or possibility of an undue risky scenario present itself, the operation will be called off.”(§7) [notre soulignement]

 

Dans sa réponse au câble MIR 79 contenue dans le câble UNAMIR 100 relatif aux “Contacts with the Informant”, Jean-Pierre Turatsinze, M. Kofi Annan est allé au-delà de la simple interdiction faite au Général Roméo Dallaire de lancer des opérations militaires contre le Président Habyarimana et le MRND. Il a instruit M. Roger Booh Booh et le Général Roméo Dallaire de se conformer aux limites du mandat de la Mission en ces termes :

“We have carefully reviewed the situation in the light of your Mir 79, we cannot agree to operation contemplated in paragraph 7 of your cable as it clearly goes beyond the mandate entrusted to UNAMIR under Resolution 872 (1993)” (§1)

 

En même temps, M. Kofi Annan leur a instruit d’effectuer les contacts suivants :

-          Rencontrer le Président Habyarimana et le mettre en garde contre les activités illégales imputées aux “milices Interahamwe”, susceptibles de compromettre le processus de paix ;

-          Rencontrer préalablement les Ambassadeurs de Belgique, de France et des Etats-Unis à Kigali pour leur informer de leur démarche et leur suggérer d’en faire de même auprès du Président Habyarimana ;

-          Juger de l’opportunité de rencontrer le Premier Ministre désigné avant ou après les entretiens avec le Président, pour lui expliquer les limites du mandat de la MINUAR et lui assurer que, même si le mandat de la MINUAR ne leur permettait pas d’accorder la protection à l’informateur, son identité et leurs contacts ne seront pas révélés.

 

Devant cette ferme position de New York, M. Roger Booh Booh amena le Général Roméo Dallaire à se conformer aux instructions leurs données dans le câble UNAMIR 100. Dans son câble MIR 95 du 13 janvier 1994, Roger Booh Booh présenta à Kofi Annan le rapport sur les initiatives prises en rapport avec la situation sécuritaire et conclut en ces termes:

“We have taken the following initiatives pursuant to the guidance provided to us in your Fax UNAMIR 100 of 11 January 1994 ”.[14] (§1)

“My assessment of the situation is that the initiative to confront the accused parties with information was a good one and may force them to decide on alternative ways of jeopardizing the peace process, especially in the Kigali area”.[15](§8)

 

Outre le Rapport fait par Roger Booh Booh dans son fax MIR 95, Roméo Dallaire lui-même a été obligé de s’expliquer dans un fax qui serait apparemment resté sous forme de draft[16]. Il avoue: “In accordance with direction received, no offensive military action has been taken. Discussion with President (Head of State) and at his request, the President and National Secretary-general of MRND party were held. The VVIP was not met due to conflicting schedules. A meeting is set up for today[17](§1).

 

Démasqué, Roméo Dallaire ne désarme pas pour autant.

 

Frustré par la position de ses supérieurs, M. Kofi Annan et le général Baril, le général Roméo Dallaire va répéter inconsidérément qu’on l’a empêché d’agir pour stopper les préparatifs du génocide, alors qu’il n’en est rien. Pour crédibiliser la thèse du génocide planifié, cette version des faits inventée par le Général Roméo Dallaire semble avoir été récupérée et renforcée dans un autre fax fabriqué sur commande, longtemps après la création du TPIR, pour remplacer le fax initial envoyé le 11 janvier 1994 par Roméo Dallaire à Maurice Baril qui ne parlait ni de l’extermination des Tutsi (§7), ni de la provocation des soldats belges (§2).

Cette hypothèse est loin d’être une simple spéculation comme pourrait le penser un lecteur pressé. Pour se convaincre de sa vraisemblance, il suffirait de comparer les développements consacrés par Alison Des Forges au fax du 11 janvier 1994 dans son livre, “Aucun témoin ne doit survivre”[18] et ceux consacrés au même fax par Roméo Dallaire dans son livre, “J’ai serré la main du diable”[19] ou ceux faits par Luc Marchal dans son livre, “La descente aux enfers”[20]. La seule conclusion possible est que Alison Des Forges et Roméo Dallaire ont eu accès aux mêmes informations et se sont concertés avant de les traiter. Bien plus, il est très probable que les deux aient largement contribué à la fabrication du fax de substitution dont les copies ont été mises en circulation[21].

 

Dans cette opération de fabrication d’un fax de substitution à celui du 11 janvier 1994 et de diffusion de copies manipulées, le Général Roméo Dallaire a bénéficié d’importantes complicités, tant au niveau du Secrétariat général des Nations Unies pour retirer des archives et de la circulation le fax du 11 janvier 1994 et, auprès de ses anciens collaborateurs au sein de la MINUAR pour fabriquer et procéder à sa diffusion à Londres[22], à Bruxelles, à New York et, un peu plus tard au TPIR. C’est le Procureur américain, Pierre Richard Prosper qui a le premier déposé la copie manipulée du fameux fax controversé, lors de l’audience du 13 février 1997 dans le procès Akayesu. A l’époque, le Procureur avait refusé de déposer le document original et la Cour se serait contentée de la copie qui, elle-même, a été caviardée avant d'être servie à la Défense.[23]

 

Le dernier document qui conforte la conclusion suggérée dans cette analyse est la lettre que l’Assistant du Secrétaire général pour les affaires juridiques, M. Ralph Zacklin, a adressée aux avocats de J. Nzirorera et A. Ntabakuze en reconnaissant que l’original du fameux câble adressé le 11 janvier 1994 au général Maurice Baril par le Brigadier général Dallaire était introuvable dans les archives de l’ONU et celles de la MINUAR. Nous en avons discuté plus haut, cf. footnote # 15.

 

Pour être tout à fait complet, il faut citer la lettre du 19 janvier 1994 adressée par le Comité National Provisoire des “Interahamwe za MRND” au Dr Jacques Roger Booh Booh, Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies au Rwanda, ainsi que le Communiqué du  Comité national provisoire des "Interahamwe za MRND" concernant les problèmes cruciaux auxquels notre pays fait face, du 1er février 1994[24]. Ces deux derniers documents font l’objet d’un commentaire ad hoc au point 2.7 et sont intégralement repris en annexe IV, V et VI du présent témoignage.

 

En réalité, pas plus que Roméo Dallaire et Faustin Twagiramungu qui n’ont jamais accordé une quelconque crédibilité à leur témoin alibi Jean Pierre Turatsinze[25] à l’origine du fax original envoyé le 11 janvier 1994 au Général Maurice Baril mais retiré du dossier et remplacé par une copie d’un nouveau fax fabriqué postérieurement à la mise en place du TPIR pour servir comme élément de preuve de la thèse du génocide planifié, le Procureur n’a jamais considéré Jean Pierre Turatsinze comme un témoin à faire comparaître devant les Chambres. C’est la raison pour laquelle aucune mesure de protection le concernant n’a jamais été prise.



[1] Affaire le Procureur C/Jean Paul Akayesu, Audience du 13 février 1997. A l’époque déjà le Procureur Pierre Richard Prosper avait déposé une copie caviardée et refusé d’en montrer l’original ou la copie non caviardée à la Défense.

[2] Voir transcrits d’audience du 17 juin 1999 dans le procès Rutaganda, p. 119.

[3] Lettres réponses de Monsieur Ralph Zacklin, Assistant du Secrétaire Général des Nations Unies aux Affaires Juridiques, en date du 27 janvier 2003 et du 6 juin 2003, aux Conseils de Joseph Nzirorera et d’Aloys Ntabakuze.

[4] Il s’agit des pièces à conviction de la Défense: DNT 21 ; DNT 23 ; DNT 24 ; DNT 26 et DNT 27.

[5] Communiqué N° 6/94 du 9/01/1994 émanant du Bureau d’information, d’Education et de presse (BIEP) de la MINUAR ; communiqué du FPR du 8/01/1994 ; Lettre du 19/01/1994 adressé par le Comité National Provisoire des “INTERAHAMWE ZA MRND” à M. Roger Booh Booh, Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies à la MINUAR, notamment.

[6] Le 05 janvier 1994, lors des cérémonies de la mise en place des Institutions du GTBE, les Représentants du FPR ont boycotté la cérémonie de prestation de serment du Président de la République qui a eu lieu dans la matinée. Ils se sont absentés à celle des députés qui était prévue le même jour à 15 heures. Le Président de la Cour Constitutionnelle, Joseph Kavaruganda, le Premier Ministre, Agathe Uwilingiyimana et le Premier Ministre désigné, Faustin Twagiramungu, les Représentants des factions pro-FPR au sein des partis MDR et PL, ainsi que les Représentants du PSD dans les Institutions de Transition à base élargie ont, tous, boycotté les cérémonies de prestation de serment reportées à 15 heures, le 5 janvier 1994. Depuis, ils vont tenter sans succès d’organiser les cérémonies de mise en place de ces Institutions à l’insu du Président comme ce fut le cas le 08 janvier.

[7] André GUICHAOUA, témoin-expert du Procureur l’a récemment confirmé lors d’une interview dans le Quotidien Le Monde du 6 mai 2004 en ces termes : “Le scénario de l’assassinat du président Habyarimana a été programmé dès la fin de l’année 1993 comme préambule à la reprise de la guerre”.

[8] Extrait du Câble 126 du 11 janvier 1994 de Général Roméo Dallaire à Baril reçu le 10 janvier 1994 à New York à 20h15, heure de New York : Request for protection for informant.

[9] Roméo Dallaire : “J’ai serré la main du diable”, pages 198-199.

[10] Câble de Maurice Baril au nom de Kofi Annan pour le Général Roméo Dallaire daté du 11 janvier 1994 : Contact with informant.

[11] Câble de Kofi Annan à Roger Booh Booh daté du 11 janvier 1994 : Contacts with informant.

[12] Câble Mir 79 de Booh Booh à Kofi Annan : Contacts with informant.

[13] M. Ntazinda Charles était le conseiller au MINAFFET, originaire de Nyanza (Butare), voisin de Jean Pierre Turatsinze à Kanombe devant l’aéroport.

[14] Câble Mir 95 de Roger Booh Booh à Kofi Annan daté du 13 janvier 1994 et ayant pour objet : Initiatives undertaken relating to latest security information (§1).

[15] ibidem, §8.

[16] Draft du Fax adressé le 12 janvier 1994 par Roméo Dallaire à Kofi Annan avec copie au général Baril relatif aux renseignements obtenus de l’informateur. Lors de sa déposition dans le procès Bagosora et alii, Roméo Dallaire a reconnu ledit draft et confirmé son envoi à New York.

[17] Ibidem, §1.

[18] Alison Des Forges : “Aucun témoin ne doit survivre”, pages 176 à 209; spécialement les bas de pages car révélatrices d’informations inédites.

[19] Roméo Dallaire : “J’ai serré la main du diable”, pages 187 à 205.

[20] Luc Marchal : “La descente aux enfers”, pages 165 à 176.

[21] Aux pages 203 à 204 de son livre: “Aucun témoin ne doit survivre”, Alison Des Forges donne une version étonnante sur le trajet du fax de Roméo Dallaire et sa disparition des archives onusiennes.

[22] Le nouveau fax fabriqué a été publié dans les journaux à Londres, par le Journal “The London Observer, November 1995”; à Bruxelles, par le Quotidien “La Dernière Heure, du 06 décembre 1995” et à New York, dans “The New Yorker, May 1998”.

[23] Les enquêtes menées par Me Peter Robinson dans les archives de l’ONU ont permis de découvrir que l’original du fax de substitution fabriqué ne se trouve non plus dans les archives et que la copie classée y a été déposée le 28 novembre 1995, selon Lamin J. Sise. Le Procureur Pierre Richard Prosper a pris soin de gommer l’entête qui indiquait la date de dépôt de cette copie dans les archives de l’ONU.

[24] Ce communiqué du 1er février 1994 a été déposé par la Défense de Georges Rutaganda comme pièce à décharge N° GAR 00853-GAR 00854.

[25] Roméo Dallaire ne l’a jamais rencontré, tandis que Faustin Twagiramungu a dit de lui que c’était un escroc attiré par l’argent qu’il espérait toucher de la MINUAR. Dans la Revue Diplomatie Judicaire No83, mars 2002, page 16 : «  Faustin Twagiramungu n’accorde donc aujourd’hui pas de crédibilité à Jean Pierre Turatsinze qu’il qualifie de ‘petit bandit’ ».

 

--------------------

 

Annexe 7.A : Copie de la copie manipulée du fameux fax du 11 janvier 1994[1].

 

 

 

 

Annexe 7. B : Copie manipulée du Fax du 11 janvier 1994, versée dans le dossier onusien à New York, le 28 novembre 1995, mais dont l’original s’est avéré introuvable.

 

 

 

 


 

La documentation utilisée



[1] Cette copie versée dans le dossier onusien le 28 novembre 1995 a été déposée par le Procureur du TPIR, pour la première fois, dans l’affaire Akayesu le 13 février 1997, comme pièce à conviction après l’avoir amputée de certaines indications utiles pour la Défense, éléments repérables sur l’Annexe 7.B.

 

La vérité sacrifiée à l’autel de la manipulation politico-judiciaire

 

Les révélations de l’ancien 2è Vice Président des Interahamwe za MRND

 

Georges Nderubumwe Rutaganda

 

 

Arusha, Octobre 2005