Enquêtes truquées sur le génocide rwandais
Les secrets de la justice internationale

L'actuel président du Rwanda Paul Kagame, Chef rebelle de L'APR (Armée patriotique rwandaise), soutenu par le gouvernement de Bill Clinton, est, mis en cause par de nouveaux documents accablants publiés dans le livre-enquête du journaliste camerounais Charles Onana intitulé Les secrets de la justice internationale, Paris, Editions Duboiris, 2005,480 p. 20 euros.

Le mercredi 14 décembre 2005

 

AGOUILLES au Tribunal Pénal International pour le Rwanda, recrutements de faux experts, détournements de fonds des victimes de l'attentat du 6 avril 1994, mensonges sur la « planification du génocide », dissimulation de preuves par la CIA, correspondances personnelles du Pentagone à Kagame, les complicités belges dans la falsification des preuves sur les crimes de Kagame, le Livre est explosif et préfacé par l'écrivain- Enquêteur Pierre Péan.

 

Kagame impliqué dans l'assassinat de Melchior Ndadaye

Lorsque le président Melchior Ndadaye est tué dans la nuit du 20 au 21 octobre 1993, l'Internationale Démocrate Chrétienne (IDC), qui suit de près la situation dans les Grands Lacs, publie un communiqué explosif dans lequel elle souligne l'implication de Paul Kagame dans l'assassinat du président burundais. Selon ce document :

« L'IDC a été alertée dès le 18 octobre des manœuvres visant la préparation d'un coup d'Etat, sous l'impulsion de l'ancien dictateur le colonel Bagaza, de l'ancien ministre des Affaires Etrangères Cyprien Mbonimpa, déjà mêlé en mars 1992 à une tentative de putsch, du major Paul Kagame, dirigeant de l'aile dure du FPR, venu réclamer à Bujumbura la réintégration dans l'armée burundaise de certains combattants du FPR ».

Dans un autre communiqué publié le 22 octobre 1993, l'IDC dénonce le putsch et demande aux Occidentaux de suspendre toute coopération avec les putschistes. L'appel de l'IDC ne rencontre que peu d'échos.

Et pour cause, le travail de déstabilisation du Burundi et des Grands Lacs venait de commencer sous les apparences d'un « crime politique accidentel ». Pour empêcher le décryptage de l'assassinat du président burundais, le FPR met en route une stratégie de menaces et de propagande. Il ouvre les hostilités à travers un communiqué de presse virulent contre l'IDC :

« Le Front Patriotique Rwandais s'érige énergiquement contre les allégations de l'Internationale Démocrate Chrétienne (IDC) selon lesquelles le major Paul Kagame, vice-président du FPR et chef de l'Armée Patriotique Rwandaise, serait impliqué dans le putsch qui a eu lieu au Burundi le 21 octobre 1993 ».

Ce communiqué, signé Jacques Bihozagara, annonce déjà le plan caché de l'APR/FPR. Il dévoile ce qui risque de se produire au Rwanda quelques mois plus tard : la guerre. Nous avons interrogé un très proche collaborateur de Paul Kagame, membre des services de renseignements, qui était avec lui à Bujumbura. Il nous a raconté que Kagame a eu, à cette occasion, une rencontre secrète avec le chef de l'Etat sortant du Burundi, Pierre Buyoya. Il affirme que Paul Kagame soutenait le renversement du président élu du Burundi. Selon des sources belges bien informées, le FPR a soutenu financièrement les putschistes burundais. C'est aussi ce qu'affirme l'universitaire burundais Raphaël Ntibazonkiza dans sa biographie consacrée à Melchior Ndadaye

Kagame aurait détourné 2 millions de dollars attribués, par les compagnies d'assurance britanniques, aux victimes de l'attentat du 6 avril 1994

L'événement le plus intéressant dans cette affaire est, sans doute, le malentendu qui va survenir brusquement entre Luc de Temmerman et Jean-Pierre de Bandt. Une fois que l'argent des victimes a été mis à disposition, tout le monde a commencé à s'affoler. C'est Luc de Temmerman qui, après une discussion avec son confrère de Bandt, se demande si lui-même et ses clients ne vont pas voir l'argent leur filer entre les doigts. Le 21 septembre 1998, inquiet, il envoie un fax à maître de Bandt dans lequel il parle au nom des veuves françaises, Mme Minaberry et Mme Perrine :

« Je confirme notre agréable entretien téléphonique de cet après-midi et je fais donc immédiatement le nécessaire pour demander une saisie-arrêt conservatoire sur le compte CARPA KB de Bandt, VAN HECKE LAGAE et le compte de la SONARWA auprès de la Belgolaise. Je regrette que je dois ainsi bloquer l'ensemble du compte CARPA de l'association et que la Belgolaise et la SONARWA devront être informées de ce malentendu. Nous y perdrons tous les deux en crédibilité. Il me paraît plus judicieux de demander à votre banque, qui n'a certainement pas encore effectué le transfert de verser la somme à la Caisse de dépôt et de consignation en attendant une solution, si la SONARWA refuse aujourd'hui un versement direct aux bénéficiaires nonobstant leur accord à ce sujet dans la lettre du 14/05/1998 et lors de ma dernière visite au mois de juin ».

Dès que Luc de Temmerman a envoyé ce fax, le même jour, un virement de 2 312 365 dollars a été effectué au profit de la SONARWA. Maître de Bandt lui confirmera cela quatre jours plus tard dans une lettre du 25 septembre 1998 : « Je suis le conseil de la SONARWA à laquelle j'ai transféré le 21 septembre dernier une somme de 2 312 365 dollars US par le débit de mon compte X auprès de la Kreditbank. J'ai reçu le 22 septembre du bâtonnier de l'Ordre néerlandais des avocats du Barreau de Bruxelles de prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de garder les fonds en Belgique ».

La preuve existe donc que l'argent des victimes de l'attentat terroriste du 6 avril 1994 a été payé. Acculé par les faits, le président rwandais va-t-il enfin dire où est passé l'argent des familles des victimes et surtout pourquoi ce refus catégorique de mener des investigations sur l'attentat qui a entraîné la mort de son prédécesseur Habyarimana ?

Les salaires exorbitants des experts bidon du TPIR : Jean-Pierre Chrétien et Jean-François Dupaquier

Après l'obtention d'une agrégation d'histoire en 1962, Jean-Pierre Chrétien, nostalgique de l'époque coloniale, décide de poursuivre sa carrière en Afrique. Il choisit le Burundi. Pendant quatre ans (1964-1968), il enseigne l'histoire dans ce pays. En fait, l'Afrique lui sert de tremplin car il craint de finir sa vie comme professeur au lycée Fontenelle de Rouen. Pour gonfler son parcours, il devient enseignant à l'Ecole Normale Supérieure du Burundi au titre de la coopération. Un véritable saut de puce qui lui permettra de revenir rapidement en France pour négocier une place d'assistant à l'université de Lille III. En trois ans seulement et avec une simple agrégation de l'enseignement secondaire, Jean-Pierre Chrétien passe, grâce à l'Afrique, de professeur de lycée à maître-assistant à l'université. Un trajet difficile à effectuer dans la stricte logique du système universitaire français où l'on exige d'être au moins titulaire d'une thèse de doctorat pour enseigner à l'université.

Il n'a donc sur son curriculum vitae ni DEA (Diplôme d'Etudes Approfondies) ni doctorat. Il a néanmoins bénéficié d'un système de passerelles et de dérogations qui lui a permis de diriger des recherches et des thèses de doctorat tout en siégeant au CNRS. C'est ainsi qu'il commence à se présenter comme un spécialiste des Grands Lacs. (…)

Des sommes colossales et supérieures à la moyenne des experts du TPIR ont été allouées à Jean-Pierre Chrétien et à Jean-François Dupaquier.

S'agissant de Jean-Pierre Chrétien, il était payé 7500 dollars par mois de travail, soit 200 dollars par jour de travail d'après son contrat daté du 8 octobre 2001. Ce contrat allait du 1er octobre 2001 au 15 janvier 2002. Quant à Jean-François Dupaquier, l'autre « expert maladroit », il a touché 18 000 dollars du 1er juillet au 31 octobre 2001, soit 200 dollars par jour de travail. Au mois de novembre 2001, il touche 6000 dollars pour un piètre travail partisan. Leurs deux collaborateurs, deux « nègres » de service, Joseph Ngarambe et Jean Kabanda étaient, eux, rémunérés avec beaucoup de respect et de dignité en plusieurs contrats à durée déterminée de 125 dollars par jour de travail soit 1750 dollars allant du 5 mai 2002 au 18 mai 2002 par exemple. Il n'est pas nécessaire de faire des comparaisons entre les rémunérations des « experts » Chrétien-Dupaquier et celles de leurs « nègres » Jean Kabanda et Joseph Ngarambe. Certains des contrats ci-dessus évoqués ont transité par l'association Survie en provenance du TPIR sous le numéro de fax 43 20 55 58 de cette association.

Derrière l'image prétendument africaniste de Survie, on constate que cette association lutte d'abord pour sa propre survie et non pour celle de l'Afrique et des Africains. Assez tapageuse, peu rigoureuse et surtout très partisane et manipulatrice dans le dossier du Rwanda, elle travaille bras dessus, bras dessous, avec le régime des extrémistes tutsi de l'APR/FPR. On a vu par exemple, en avril 2002, la vice-présidente de Survie, Sharon Courtoux, soutenir, sans sourciller, l'Etat rwandais et son président, aujourd'hui considéré comme l'organisateur de l'attentat terroriste du 6 avril 1994 au Rwanda. Jamais l'association Survie n'a manifesté le moindre intérêt pour les victimes rwandaises, burundaises et françaises de cet attentat terroriste. A plusieurs reprises, l'association a plutôt exprimé beaucoup d'enthousiasme à défendre le dictateur Paul Kagame contre les journalistes professionnels qui le mettaient en cause dans les crimes commis contre des Rwandais et des Congolais.

Les magouilles du procureur Bernard Muna

En avril 1998, une requête dite conjointe portant sur un projet d'accord entre le bureau du procureur et Jean Kambanda est établie avec maître Inglis, l'avocat camerounais que l'ancien Premier ministre rwandais refuse de toutes ses forces et qui lui a été imposé par le procureur adjoint, Bernard Muna. Ce document, signé par le même Bernard Muna, est la pièce maîtresse du « marché ». Dans son paragraphe 1, il est dit :

« Le procureur et l'accusé, Jean Kambanda, représenté par son conseil, Olivier Michaël Inglis, ont décidé de conclure un accord aux fins que l'accusé plaide coupable aux chefs d'accusation de génocide, d'entente en vue de commettre le génocide, d'incitation directe et publique à commettre le génocide, de complicité dans le génocide et de crimes contre l'humanité, crimes prévus aux articles 2 et 3 et punis en application des articles 22 et 23 du Statut du Tribunal pénal international pour le Rwanda, annexé à la résolution 955 (1994) du 8 novembre 1994 du Conseil de sécurité (ci-après le statut), tels qu'indiqués dans les chefs d'accusation 1 à 6 de l'acte d'accusation du 16 octobre 1997. Le but de l'aveu de culpabilité est de renforcer l'entente entre les parties quant aux conditions juridiques et aux bases factuelles de l'aveu de culpabilité, afin de servir d'instrument permettant d'assurer la validité de l'aveu de culpabilité et d'assister la Chambre de première instance ».

En annexe de ce document, Jean Kambanda, sous la pression de M. Duclos, de maître Inglis et de Bernard Muna, le chef des opérations de manipulation, signe le 29 avril 1998 son arrêt de mort : « l'accord sous scellé aux fins d'un aveu de culpabilité ». Une grande partie des jugements va s'appuyer sur ce vrai faux document obtenu sous la torture psychologique, la menace et la corruption de l'accusé. (…)

A la veille de son procès, le procureur adjoint, Bernard Muna et son ami maître Inglis, savourent déjà leur victoire. Jean Kambanda raconte :

« Alors qu'il était convenu de rester en contact pour la rédaction de mon mémoire, maître Inglis s'organisa pour disparaître complètement de la circulation et pour ne réapparaître qu'à quelques jours de la sentence non sans avoir déjà déposé, sans m'en avoir parlé, quatre feuillets qu'il m'avait attribués comme étant ''mon mémoire'', et qui ne reprenait, ce de façon incomplète, que mon curriculum vitae.

Le 2 septembre 1998, en présence de M. Muna Bernard, quand je lui demanderai d'intervenir auprès des juges pour obtenir un délai supplémentaire avant la sentence afin de pouvoir nous permettre de rédiger un mémoire digne de ce nom, il ne semblait même pas intéressé par ce que je lui racontais. Pressés, lui et son ami Muna, comme ils étaient, ils l'affirmaient sans complexe, qu'ils s'apprêtaient à entrer dans l'histoire, pour avoir été les premiers, depuis la fin de la seconde guerre mondiale, à amener ''le plus grand criminel de guerre'', un chef de gouvernement, à plaider coupable de crime de génocide.

C'est dans ce contexte que le 3 septembre 1998, M. Muna fera un réquisitoire qui, de mon point de vue, avait le mérite d'être clair. S'adressant aux juges, tout en saluant ma coopération avec le parquet du TPIR, il s'indigna qu'ils ne puissent pas prononcer la peine capitale comme c'est le cas au Rwanda, sous-entendu celle que je mérite, et leur demanda de me condamner pour l'exemple, tout en sachant qu'il avait lui-même tout organisé pour que je ne puisse jamais me défendre. Les juges ont alors dit et répété ''accusé Kambanda'' faisant comme si derrière cet ''accusé Kambanda'' assis sur le banc des accusés, ce n'était pas le Premier ministre d'un gouvernement rwandais, accusé à tort ou à raison, comme Hutu qu'on jugeait. En fait, derrière cet accusé, c'était tout un peuple qu'on s'apprêtait à condamner sans lui avoir donné le droit et l'occasion de se défendre »1.

A la suite de cette mascarade judiciaire, Jean Kambanda est condamné à perpétuité. Révolté, l'ancien Premier ministre est aujourd'hui en colère et dénonce ce jugement.

Le Greffier du TPIR Adama Dieng organise le recrutement frauduleux du Français Pascal Besnier

Au mois de mai 2005, Pascal Besnier reçoit la convocation pour participer au test de recrutement. Il en informe son mentor Roland Amoussouga. Le scoop que reçoit le candidat Besnier de son mentor est que ce dernier fera parti du jury. Il est donc prêt à l'aider à préparer le test : « Je partage avec toi, la communication du service du personnel m'invitant à participer à l'interview ». Amoussouga propose en même temps au candidat Pascal Besnier de lui envoyer le questionnaire de l'examen et lui promet de l'appeler au téléphone pour qu'ils travaillent ensemble sur le test de recrutement. Le candidat Besnier ne manque pas d'exprimer sa joie devant cette proposition : « C'est avant même de prendre connaissance du questionnaire que je te dis un grand merci ! ! Je vais travailler sur ce document à partir de maintenant. Et bien sûr, j'attends ton appel demain soir. Tout ce que tu as fait et continues de faire pour moi me touche énormément ». Roland Amoussouga, qui a désormais l'ensemble des tests en main ne se gêne plus. Il veut le succès de son « frère » Pascal Besnier :

« Je t'envoie la version révisée suite à la communication par le personnel aux membres du panel des critères d'évaluation qui serviront aux membres à vous évaluer. Cette dernière version prend en compte les critères d'évaluation qui sont retenus. Du coup, le questionnaire est raccourci. Je suis sûr que cela ne changera pas beaucoup de la version finale que nous utiliserons le jour J. Le greffier adjoint me dira ce qu'il en pense. Mais, travaille dur là-dessus ».

Peu avant ce message, Roland Amoussouga donne carrément le détail des épreuves de recrutement à Pascal Besnier. (…) Le 28 juillet 2005, la décision est sans ambiguïté. C'est Pascal Besnier qui annonce la bonne nouvelle à son mentor Roland Amoussouga : « J'ai la joie de t'annoncer que Monsieur Dieng m'a personnellement téléphoné ce matin pour me dire qu'il venait de signer le papier de ma nomination. Tous nos efforts sont donc récompensés et tu es évidemment le premier que j'associe à ce grand succès. J'espère donc te retrouver bientôt à Arusha ».

Les secrets de la justice internationale,
Par Charles Onana

Editions Duboiris
Paris 2005, 480 pages, 20 euros.
Sortie en librairie : mercredi 30 novembre.


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